Rabat, 16 juin 2020 (CEA) -Le contexte économique post COVID19, offre-t-il une opportunité au Maroc, et plus généralement l’Afrique du Nord, de réorienter et accélérer sa transformation structurelle ?
Réunis le 10 juin 2020 à l’occasion d’un webinaire conjoint du Bureau de la CEA en Afrique du Nord et du think tank marocain Policy Center for the New South (PCNS) sous le thème « Transformation structurelle de l’économie marocaine : l’avant et le post-COVID19 », trois experts se sont penchés sur l’impact du contexte économique généré par la pandémie sur le processus de transformation structurelle du Maroc, et les opportunités créées par la réorganisation des chaînes de valeurs mondiales entrainées par la pandémie.
Si le Maroc, à l’instar du reste de l’Afrique du Nord avant la pandémie du COVID19, connaissait un essoufflement de la croissance de sa productivité, la sous-région souffrait en général d’une faible transformation structurelle, selon Zoubir Benhamouche, économiste au Bureau de la CEA en Afrique du Nord.
Définie comme le processus de réallocation des facteurs de production (main d’œuvre, capital, etc.) entre les secteurs d’une même économie, la transformation structurelle est positive lorsqu’elle permet la réallocation des facteurs de production des secteurs ou activités les moins productifs vers les plus productifs.
En introduisant de nouvelles contraintes, qui remettent en cause le fonctionnement des chaînes de valeurs mondiales, le COVID19 est aujourd’hui en train de changer la donne pour beaucoup de pays et de redéfinir leurs priorités stratégiques. Une situation qui ne manquera pas d’impacter des partenaires commerciaux clés pour le Maroc, tels que l’Europe.
« La question de la souveraineté économique va devenir un thème central qui déterminera les politiques de développement, de croissance, ainsi que les plans de relance à moyen et long terme des économies », a indiqué Larbi Jaïdi, Senior Fellow au PCNS.
Une situation qui entrainera des changements significatifs sans aller forcément jusqu’à entrainer un changement complet de paradigme : « Aujourd’hui, le modèle de fragmentation est tel qu’il est impossible pour les pays de revenir à un modèle ancien, qui leur permettrait de s’approprier tous les segments de l’activité industrielle», a indiqué Larbi Jaïdi : « Aujourd’hui, ce ne sont pas seulement les Etats qui portent la dynamique de la mondialisation mais aussi les multinationales et derrière elles, des entreprises de différentes tailles».
« Je ne pense pas que le COVID19 va entrainer le genre de choc qui déclencherait la refonte des systèmes économiques ou une refonte structurelle des principes de base du commerce et de l’investissement. Les investisseurs internationaux continueront de rechercher des opportunités d’investissement là où elles semblent les meilleures, les entreprises veilleront à écouler leur production dans les marchés porteurs où le rendement est plus important, et les consommateurs ne sont pas prêts à payer davantage ou à voir leur bienêtre se détériorer à cause d’éventuels réajustements », a ajouté Abdelaziz Aïtali, Senior Economist au PCNS.
Malgré cela, selon lui, il est attendu que la révision des chaînes de valeurs mondiales dans la foulée du COVID19 et les tensions commerciales entre les grandes puissances mondiales comme les Etats-Unis et la Chine entrainent des formes de localisation ou relocalisation différenciées selon les secteurs, le degré d’intérêt stratégique, les aspects logistiques, etc.
Pour saisir les opportunités générées par ce contexte, il est nécessaire aux pays comme le Maroc et ses voisins de réduire les obstacles à la distribution efficiente de ressources au sein de leurs économies, tout en laissant aux gouvernements suffisamment de latitude pour mettre en place des incitations pour des secteurs ciblés, dans le cadre de stratégies de mise en place d’industries et de champions nationaux.
Une attention particulière devra ainsi être portée aux distorsions qui limitent la réallocation des ressources vers les entreprises les plus efficaces, causées par différents facteurs comme la taxation, les obstacles administratifs, ou la corruption, et qui réduisent les gains potentiels de productivité, ralentissant ainsi la transformation structurelle des économies, a remarqué Zoubir Benhamouche.
Autres facteurs clés qui joueront un rôle déterminant dans la capacité des économies à saisir les opportunités générées par le nouveau contexte économique mondial : la recherche et le développement, la transformation digitale et la propriété intellectuelle, et enfin la révision des accords de libre échange à la lumière d’une libéralisation maitrisée du secteur des services, générateur clé de valeur ajoutée et d’emplois au sein de l’économie marocaine.
Note aux rédacteurs
La Commission Economique pour l’Afrique (CEA) est l’une des cinq commissions régionales du Conseil Economique et Social de l’ONU (ECOSOC). Son Bureau en Afrique du Nord a pour mission de soutenir le développement des sept pays de la sous-région (Algérie, Egypte, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie et Soudan) en les aidant à formuler et mettre en œuvre des politiques et programmes à même de contribuer à leur transformation économique et sociale.
Le Policy Center for the New South (PCNS) est un think tank marocain dont la mission est de contribuer à l’amélioration des politiques publiques, aussi bien économiques que sociales et internationales, qui concernent le Maroc et l’Afrique, parties intégrantes du Sud global. Le PCNS défend le concept d’un « nouveau Sud » ouvert, responsable et entreprenant ; un Sud qui définit ses propres narratifs, ainsi que les cartes mentales autour des bassins de la Méditerranée et de l’Atlantique Sud.
Cliquez ici pour visionner la vidéo de la rencontre : https://www.youtube.com/watch?v=H5BAHGq_Fic&feature=youtu.be
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