Contexte

L’intégration régionale est l’objectif des pays africains depuis au moins leur accession à l’indépendance, il y a plus de 50 ans. De nombreux arguments en faveur de l’accélération du processus d'intégration ont été avancés depuis lors – tant de la part de dirigeants politiques et d’économistes au sein des gouvernements et du secteur privé, que de chercheurs d’universités et de centres de recherche. Il est désormais communément admis que l’intégration profiterait, aux plans politique et économique, à l’Afrique sur l’échiquier mondial.

En réponse, les pays africains ont tenté de renforcer les communautés économiques régionales, en rationalisant leurs mandats, et en concrétisant même avec certaines régions une union politique plus étroite. Des plates-formes pour une éventuelle union monétaire ont été mises en place en Afrique de l’Est et de l’Ouest. Surtout, l'Organisation de l'unité africaine, l’organe politique chapeautant l’Afrique, est devenue l'Union africaine. En dépit de ces efforts, l’objectif d'une Afrique économiquement intégrée est encore loin d’être atteint. La Conférence économique africaine prévue en 2013 – qui sera, comme les années précédentes, organisée conjointement par la Banque africaine de développement, la Commission économique pour l’Afrique et le Programme des Nations unies pour le développement –,  a pour objectif de répondre à ces défis et d’esquisser des solutions.

Avec 54 pays, dont plusieurs sont enclavés, qui se disputent tous les mêmes marchés extérieurs et qui tentent de surmonter les mêmes problèmes d’infrastructure, l'opinion qui prévaut est qu’en dépit des progrès récents, l’Afrique reste morcelée, politiquement et économiquement fragmentée. Sans intégration économique, l’Afrique ne sera pas en mesure de développer des économies d'échelle dans sa production, ni de profiter de la demande des grands marchés qui a, par exemple, stimulé et soutenu la croissance dans certains pays d’Asie. Si ce morcèlement n’est pas pris en compte, il continuera d’entraver le développement du continent.

Toutefois, en dépit de nombreux débats et de changements d’orientation politique, ce que doivent faire concrètement les pays africains pour consolider le processus n’est pas encore tout à fait clair. S’emparer des questions des goulets d'étranglement en termes d’infrastructure et des contraintes institutionnelles et réglementaires – par le biais, par exemple, de partenariats public-privé – serait un bon point de départ. Promouvoir la libre circulation des marchandises, des services, du travail et du capital, est essentiel pour l'intégration économique régionale ainsi que pour l'inclusion spatiale au sein même des pays.

Au cours de la dernière décennie, les économies africaines ont affiché des taux de croissance élevés, de près de 6 % en moyenne, des taux parmi les plus élevés au monde, selon les principales institutions. Le boom des ressources naturelles et les nouvelles découvertes de pétrole et de gaz dans de nombreux pays d’Afrique ont été un facteur-clé. Toutefois, le redressement de l'économie n’aurait pas été possible sans changements politiques et structurels au sein même de l’Afrique. Les réformes macroéconomiques ont permis d’ouvrir les économies, d’améliorer la performance, d’augmenter les investissements et de faire baisser de l’inflation. Plus que tout, les risques macroéconomiques associés aux économies africaines ont été considérablement réduits, et les pays ont pu, ces dernières années, emprunter sur les marchés. Surtout, une large part des emprunts récents sur les marchés internationaux a ciblé les infrastructures dans le but d’ouvrir les marchés, d’augmenter la production d'énergie et d’accroître la compétitivité. Cela entraîne des répercussions économiques au-delà des frontières de chacun des pays, et les aide à avoir un autre regard sur les avantages de l’intégration économique régionale.

De façon générale ces 50 dernières années, les monocultures des économies africaines ont démontré que l’accent avait été mis sur le commerce extérieur de l'Afrique – c’est-à-dire sur la recherche de devises étrangères. En conséquence, les pays africains ont davantage échangé avec leurs anciennes colonies qu’avec leurs propres voisins. Aujourd'hui, les choses changent considérablement dans certaines parties du continent. En Afrique de l’Est, par exemple, le commerce régional occupe une plus grande place dans le total des échanges de certains pays, que l’Europe et l’Asie. L’intensification des liens commerciaux est donc en train de modifier l’image de l’intégration. L’intégration régionale est désormais davantage poussée par le secteur privé et la société civile, qui y discernent les avantages en termes de coût et de compétitivité, plutôt que par les gouvernements. Construire des circonscriptions nationales pour l'intégration régionale est important.

La Conférence économique africaine 2013 sur l'intégration régionale est donc une occasion unique, offerte aux chercheurs, décideurs et praticiens du développement d’Afrique et d’ailleurs, pour débattre de l’intégration régionale, du point de vue de son impact sur la croissance et le développement, et de l’économie politique qui anime le processus d’adaptation. Au regard de la transformation économique que vise l’Afrique, le moment est venu d’étudier la contribution de l’intégration économique régionale en fonction des conditions économiques qui ont beaucoup changé en Afrique avec, désormais, une classe moyenne en expansion et des flux d'investissements plus élevés que dans le passé, outre les transferts de fonds de la diaspora. L’impact de ces facteurs nouveaux sur la demande intérieure, le commerce, la création d’emplois et, plus généralement, la croissance inclusive, doivent être mis davantage en perspective.

La Conférence économique africaine est aujourd'hui le premier forum de discussion sur les sujets brûlants de l’Afrique. Sa huitième édition, la Conférence 2013, se tiendra à Johannesbourg, en Afrique du Sud, du 28 au 30 octobre 2013.