Une menace mondiale sans précédent qui mérite un leadership sans précédent

PAR ARKEBE OQUBAY, le 18 avril 2020

Le COVID-19 est la plus grande menace mondiale à laquelle le monde ait été confronté depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce n’est pas la maladie la plus meurtrière ou la plus infectieuse enregistrée, mais le niveau de mondialisation et d’interdépendance du monde la rend particulièrement destructrice. La profondeur de la crise économique mondiale est exceptionnelle ; non seulement elle est pire que la récession mondiale de 2008, mais elle est exacerbée par son apparition à un moment où la collaboration mondiale et les prises de position sur le COVID-19 sont affaiblies au niveau international et dans de nombreux pays. La riposte du monde face au virus a été brièvement mais parfaitement exprimée dans la déclaration du Gouverneur de New York, Andrew Cuomo, « C’est un ennemi que nous avons sous-estimé dès le premier jour et nous en avons payé le prix très fort ».

Des sacrifices héroïques ont été consentis par le personnel de santé et les travailleurs sur le terrain à travers le monde, tandis que le grand public, également touché par la tragédie et les sacrifices, démontre sa volonté de suivre les mesures visant à freiner la pandémie. De nombreux gouvernements nationaux et locaux, malgré le retard initial, ont fait preuve d’un leadership exceptionnel dans leurs efforts pour éviter les catastrophes et inspirer le public et les membres vulnérables de la société. Cependant, les actions, ou l’absence d’actions, de certains dirigeants ont semé la confusion et les perturbations.

Il n’y a pas de meilleur exemple que l’absence de leadership des États-Unis. Dans le passé, les États-Unis ont été à l’avant-garde des activités internationales, montrant un leadership mondial résolu visant à prévenir les crises potentielles et à répondre à une variété de menaces mondiales. Des exemples peuvent être trouvés, comme la création de l’Organisation de Bretton Woods et le rétablissement d’une Europe déchirée par la guerre grâce au Plan Marshall. L’administration américaine a joué un rôle essentiel dans des évènements récents tels que la reprise économique après la récession de 2008 et les pandémies de virus, y compris le SRAS en Asie, le MERS au Moyen-Orient et Ébola en Afrique de l’Ouest et du centre. Pendant sept décennies, les actions et le rôle de leadership assumé par les États-Unis ont contribué à la création d’un monde meilleur et d’un mécanisme d’intervention d’urgence efficace.

Pourtant, à une époque où le monde recherche une voie, les économies avancées et les grandes puissances ne doivent pas abdiquer leur rôle de leader mondial. Ils devront s’abstenir de recourir à une prise de position internationale et de diffuser des messages contradictoires sur la nature mortelle du virus, et rechercher des actions fondées sur les preuves et de meilleurs avis scientifiques disponibles. Les pays du G20 devront apporter un soutien total à l’OMS pendant la lutte résolue contre la crise mondiale, comme en témoignent les actions de l’Allemagne et de la France. Ces actions ont déjà affaibli la capacité du monde à présenter une riposte unie face au virus, avec des conséquences sans précédent qui se feront sentir dans les années à venir. Il n’y a pas de gagnant, suite à ces actions.

Il est temps de tirer les leçons de la riposte mondiale inefficace face au COVID-19 ; Il est temps de montrer un leadership exceptionnel et de mettre en place une coalition mondiale afin de mettre fin à la menace sans précédent et de travailler ensemble au-delà. Avec plus de 2,5 millions  de cas confirmés dans le monde et 150 000 décès au cours des quatre derniers mois, nous ne voyons pas encore la lumière au bout du tunnel. Il est possible qu’il y ait encore des vagues de COVID-19 jusqu’à ce qu’un vaccin soit créé, testé et administré dans le monde entier. Dans cette situation désastreuse, la collaboration mondiale devra se concentrer sur les trois piliers décrits ci-dessous. Comme l’a dit la Directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, il s’agit d’une menace mondiale sans précédent et une menace mondiale sans précédent requiert un leadership audacieux, clairvoyant et exceptionnel.

Des stratégies, ripostes et leçons diverses

Il est important que la riposte de chaque gouvernement face au COVID-19 reflète ses conditions spécifiques, car des questions telles que la démographie, les schémas résidentiels, les systèmes de soins de santé, les conditions économiques et les systèmes politiques / de gouvernance diffèrent d’un pays à l’autre. Par exemple, certains pays peuvent opter pour un état d’urgence national ou régional, tandis que de nombreuses mesures d’urgence peuvent être similaires. Le principe directeur pour les pays doit être l’attachement indéfectible à ce programme en tant que priorité absolue du pays, ainsi qu’une approche audacieuse et globale qui comprenne des communications adéquates et une sensibilisation du public, ainsi qu’une prise de décisions fondée sur des faits établis et des avis scientifiques. Une distanciation sociale efficace et des mesures de prévention personnelle, qui sont essentielles à la riposte face au COVID-19, dépendent de la sensibilisation du public. Une approche globale implique que les mesures sanitaires d’urgence et les aspects de soutien économique ne s’excluent pas mutuellement. Cela signifie également une coopération maximale de tous les niveaux et organismes gouvernementaux, et en particulier une coordination avec l’OMS, d’autres organisations internationales ainsi que d’autres pays. Face à la menace créée par le COVID-19, soutenir l’OMS a été un acte politique semant la discorde. La politisation de l’OMS doit cesser et la collaboration mondiale mise à profit. À mesure que les risques et les incertitudes évoluent, un partage constant des expériences et un apprentissage rapide de nos propres actions et de celles des autres pays seront essentiels. C’est par ces actions que les résultats d’un leadership efficace seront jugés.

Une collaboration scientifique

La pandémie de COVID-19 est principalement un problème sanitaire dans lequel le progrès scientifique et les avancées en recherche jouent un rôle central. Le développement de nouveaux vaccins et traitements efficaces, abordables et efficaces sont des priorités clés. Les avancées technologiques intelligentes, les systèmes de recherche et de suivi sont essentiels, tout comme les technologies qui améliorent les processus d’analyse et de prise de décision. Cependant, la recherche et le développement et les avancées scientifiques nécessitent une collaboration internationale entre le secteur privé, la communauté scientifique et les universités de recherche, et les gouvernements. Les économies avancées et émergentes peuvent jouer un rôle de premier plan ; les organisations philanthropique de soins de santé peuvent s’avérer indispensables. Les avancées scientifiques devront être axées sur l’identification, la prévention et la protection et la guérison de ces pandémies. Ces efforts devront également s’attaquer au changement climatique, qui contribue grandement aux menaces sanitaires généralisées.

Une Alliance internationale pour aider les pays en développement

Alors que les diverses mesures prises en Europe et aux États-Unis commencent à voir un aplatissement de la courbe, la prochaine frontière et les plus vulnérables seront les pays en développement, en raison de leurs faibles niveaux de résilience économique, de progrès et de connaissances en matière d’innovation, de systèmes de soins de santé, de ressources bases et tissu social. Cependant, une menace mondiale comme le COVID-19 ne laisse aucune population ou zone géographique intacte. Tous les pays n’ont pas des capacités élevées et le soutien aux économies en développement doit faire partie de la coopération internationale. Le sommet du G20 de 2020 n’a pas reconnu le COVID-19 comme une menace mondiale sans précédent et s’est terminé sans aucune décision importante concernant la crise économique mondiale et l’urgence sanitaire. Les organisations internationales telles que le FMI et le Groupe de la Banque mondiale doivent être félicitées pour avoir exprimé leurs préoccupations et appelé à un soutien d’urgence international, à des relances économiques pour réduire les désagréments de la récession économique et à un allégement partiel de la dette. Des personnalités  influentes telles que l’ancien Premier ministre britannique Gordon Brown se sont tenues aux côtés des pays en développement pour promouvoir ce programme, contribuant à une riposte plus positive.

Les puissances traditionnelles, telles que les États-Unis et les autres pays du G7, et le G-20 et les puissances émergentes, telles que les BRICS, devront forger un front uni et diriger une alliance internationale avec les pays en développement pour gagner cette menace mondiale. « Une menace mondiale sans précédent mérite un leadership sans précédent ; et, finalement, un leadership efficace façonnera l’avenir de l’humanité ».

Arkebe Oqubay est un ministre chevronné et Conseiller spécial du premier ministre éthiopien. C’est un membre distingué de l’ODI, et ses publications récentes incluentAfrican Economic Development: Evidence, Theory, Policy (2020)How Nations Learn (2019), et The Oxford Handbook of Industrial Hubs and Economic Development (2020).