La réforme fiscale, la numérisation au cœur du financement du développement de l’Afrique - Rapport de la CEA

Marrakech / Addis-Abeba, le 23 mars 2019 (CEA) - Un nouveau rapport de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) indique qu’il est urgent que les pays africains élargissent et approfondissent leurs bases de collecte des impôts et des recettes tout en tirant parti des technologies numériques pour intensifier la collecte et la conformité afin de réaliser les objectifs de développement urgents. [Téléchargez votre copie ici  www.uneca.org/fr/era2019

Lancé aujourd'hui à Marrakech, au Maroc, où se déroule la 52ème session de la CEA, l’édition 2019 du Rapport économique sur l’Afrique (ERA 2019) regrette le faible ratio recettes publiques / PIB du continent, qui était de 21,4% en 2018, soulignant que le continent doit considérablement augmenter ce ratio afin de financer de manière adéquate les programmes de développement nationaux cruciaux, ainsi que ceux énoncés dans l’Agenda 2030 et l’Agenda 2063.

Le rapport, dont le thème, « La politique budgétaire pour le financement du développement durable en Afrique », affirme que les recettes publiques sur le continent peuvent augmenter de 12 à 20% du PIB grâce à une collecte rigoureuse des recettes fiscales et non fiscales, notamment en harmonisant la politique fiscale avec le cycle économique.

Cela incite les États à investir dans des institutions solides et des méthodes de collecte de données avancées qui permettent de mieux contrôler les flux de revenus non fiscaux tout en les incitant à s’aventurer dans des domaines difficiles à taxer tels que l’agriculture, le secteur informel et l’économie numérique.

Réformer les systèmes d’administration fiscale en recourant à la numérisation, s’abstenir de toute incitation fiscale improductive et devenir très discipliné en matière de dette, sont d’autres propositions visant à élargir les ressources publiques au financement du développement en Afrique.

Le continent pourrait augmenter ses recettes fiscales de 99 milliards de dollars, soit 4,6% du produit intérieur brut (PIB) par an, s’il décidait rapidement de mettre en œuvre cette recommandation, selon le rapport.

Il y a beaucoup à faire en tirant parti des systèmes numériques pour générer des revenus.

Par exemple, le Rwanda a augmenté la collecte de ses recettes de 6% du PIB en introduisant la fiscalité électronique et l’Afrique du Sud a utilisé les paiements d’impôts en ligne pour réduire les coûts de mise en conformité de 22,4% tout en réduisant le délai de conformité à la taxe sur la valeur ajoutée de 21,8% cent.

Toutefois, l’amélioration des résultats en matière de fiscalité et de recettes ne peut être basée uniquement sur l’efficacité fiscale, mais également sur la prestation de services publics essentiels pour réduire les inégalités et encourager la croissance économique et la conformité, indique le rapport.

Cela devrait aller de pair avec la lutte contre la corruption et le renforcement de la responsabilité afin de réduire les inefficiences dans la collecte des impôts.

La publication souligne également l’importance des multinationales et des sociétés d’État qui dominent le secteur de l’exploitation des ressources naturelles.

« Toutefois, les sociétés multinationales ont également la capacité d’adopter des stratégies internationales complexes d’évitement fiscal qui transfèrent les bénéfices des activités économiques sous-jacentes vers des juridictions peu taxées ou non taxées, comportement qualifié d’érosion de la base et de partage des bénéfices », fait savoir le rapport.

L’élimination des lacunes des accords existants avec les multinationales pourrait augmenter les recettes fiscales des gouvernements concernés d’environ 2,7% du Produit intérieur brut (PIB), des fonds pouvant être utilisés pour réaliser les Objectifs de développement durable (ODD), ajoute le rapport.

L’Afrique a un énorme déficit de financement estimé entre 11 et 13% du PIB par an si elle doit réaliser les cibles des Objectifs de développement durable des Nations Unies et de l’Agenda 2063, mais l’édition 2019 montre que cet écart peut être rapidement comblé.

« Pour atteindre ces deux objectifs, l’Afrique doit augmenter son taux d’investissement intérieur à 30-35% du PIB annuel et tripler son taux de croissance de 3,2% à environ 10% par an », informe M. Adam Elhiraika, Directeur de la Division de la macroéconomie et de la gouvernance à la CEA qui a coordonné les travaux sur le rapport.

« ERA 2019 est très opportun pour l’Afrique, car il explore les moyens complets de financer le développement dans une période où les ressources de financement ont été réduites à néant par les retombées de la crise financière mondiale de 2008 et par le renversement du prix des produits de base en 2014 », affirme la Secrétaire exécutive de la CEA, Mme Vera Songwe.

Elle s’est montrée optimiste, « Bien que ces précédents aient rendu difficile la mise en œuvre du Programme de développement de l’ONU à l’horizon 2030 et du Programme de développement pour l’Afrique, l’Agenda 2063 de l’Union africaine pour une Afrique prospère, intégrée et en paix, je suis convaincue que la nécessité de générer des revenus supplémentaires pour financer ces programmes de développement sera beaucoup plus facile pour les pays africains qui tiennent compte des recommandations soigneusement formulées dans ce rapport ».

« La CEA a fait un si bon travail avec le Rapport économique sur l’Afrique 2019 dans la mesure où nous demandons à la Commission d’aller plus loin », dit M. Mambury Njie, Ministre gambien des finances et des affaires économiques, qui ajoute « nous savons maintenant où le problème [avec la mobilisation des ressources internes pour le développement] se situe ».

L’un des moyens d’aller plus loin se trouve dans la question, « Comment pouvons-nous faire en sorte que la politique budgétaire soutienne la transformation structurelle Afrique » ? s’interroge le Ministre égyptien de la planification, M. Ahmed Kamaly

Lors du lancement, les intervenants ont également demandé à la CEA d’approfondir ses recherches sur l’influence des incitations fiscales sur les investissements et la collecte des recettes, bien que les experts s’accordent généralement pour dire que les incitations ne font pas une grande différence.

D’autres ont suggéré que la Commission entreprenne des études sur la manière d’intégrer le secteur informel dans l’économie formelle pour obtenir davantage de recettes et cherche à accompagner les États membres dans la mise en œuvre des conclusions et des recommandations du rapport.

Un message global à retenir de ERA 2019 « est qu’en Afrique nous avons un défi à relever pour le financement des ODD mais ce défi n’est pas insurmontable, il peut être résolu avec des efforts sérieux et ciblés pour mobiliser davantage de recettes intérieures par le biais de la politique fiscale », résume M. Elhiraika.

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