Addis-Abeba, Éthiopie, le 7 mai 2020 (CEA) - Les pays africains se penchent sur les plans de déconfinement afin de limiter les dommages économiques et sociétaux, selon les chiffres de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) indiquant que le continent perd environ 2,5% de son PIB en un mois de confinement, soit 65 milliards de dollars.
Lors d’un débat mondial en ligne de la CEA sur les stratégies de déconfinement de l’Afrique face au COVID-19, les panélistes conviennent que l’Afrique ne peut pas supporter un confinement aussi prolongé, d’autant plus que 40% de la population du continent se bat pour survivre au jour le jour alors que les pénuries alimentaires s’intensifient.
Mais il reste beaucoup à faire pour que les stratégies de déconfinement soient couronnées de succès, s’accordent les panélistes y compris, Mme Vera Songwe, Secrétaire générale adjointe de l’ONU et Secrétaire exécutive de la CEA, Mme Arancha Gonzalez Laya, Ministre espagnole des affaires étrangères, de l’'Union et de la Coopération européennes, M. Ibrahim Assane Mayaki, Directeur général de l’Agence du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).
« Tester, tester, tester. Voilà le gros problème. Nos dirigeants travaillent maintenant très dur pour se procurer des kits de test afin que nous puissions tester plus, mieux et plus vite », indique Mme Songwe, ajoutant que cela est crucial pour freiner la propagation de la contagion.
Elle dit que les Africains ne sont pas contre le confinement en général.
« Il ne s’agit pas de confinement. Il s’agit de protéger des vies. Le confinement nous coûte une somme incroyable de 65 milliards de dollars par mois. Nous ne pouvons pas nous le permettre, mais nous ne pouvons pas non plus nous permettre de perdre des vies, alors il nous faut trouver rapidement des stratégies de déconfinement qui nous permette de renouer avec la croissance et ce de manière durable ».
Pour sa part, M. Mayaki déclare : « Nous avons besoin de mesures de confinement sages qui aboutissent à des mesures de déconfinement intelligentes où les plus vulnérables et les communautés locales sont vraiment préservés en termes de qualité de vie ».
Il affirme que, alors que l’Afrique s’achemine vers l’ouverture, il y a deux conditions critiques nécessaires pour garantir le succès des stratégies de déconfinement à savoir, la disponibilité des données et la coordination.
« Si vous n’avez pas les bonnes données pour connaitre les bons chiffres, effectuer le bon traçage, le bon traitement, alors votre stratégie de déconfinement est affectée en termes d’efficacité », indique M. Mayaki.
Il dit que les moyennes, petites et micro-entreprises (MPME) seront essentielles pour revitaliser les économies africaines une fois que les nations commenceront à sortir du confinement.
Pour sa part, Mme Laya fait part de l’expérience de l’Espagne face au COVID-19 et promet le soutien de son pays à l’Afrique.
« Il est important de réaliser que personne ne sera en sécurité tant que tout le monde ne l’est pas. Cette pandémie nécessite un engagement de part et d’autre pour une coopération mondiale. Si nous voulons protéger la vie de nos propres citoyens, nous devons également parler de la vie des autres citoyens », dit-elle.
« Ce qui nous inquiète le plus maintenant, c’est de maintenir cet esprit de coopération pour nous assurer de ne plus voir de fractures dans nos sociétés avec l’accentuation des inégalités ; entraînant une fracture de la communauté mondiale avec la division du monde en blocs ; une fracture de nos économies. Nous devons également insister sur la coopération et le multilatéralisme ».
Le Ministre rwandais des finances, Uzziel Ndagijimana, déclare que son pays prend actuellement des mesures visant à assouplir le confinement face au COVID-19 afin de relancer son économie. Il souligne l’importance des données et de la coordination dans les stratégies de déconfinement de la crise de COVID-19.
M. Kennedy Odede, PDG de Shining Hope for Communities, un mouvement populaire basé à Nairobi, au Kenya, déclare qu’il craint des soulèvements et des troubles sur le continent en raison de la montée des inégalités.
« Les gens sont confrontés à des difficultés et préfèrent mourir du virus que d’être enfermés. La situation peut exploser si nous ne travaillons pas ensemble pour résoudre les problèmes sur le terrain », dit-il.
M. Haroon Bhorat, Professeur d’économie et Directeur de l’Unité de recherche sur les politiques de développement de l’Université du Cap, quant à lui, évoque la nécessité de plans immédiats à court terme concernant la sécurité alimentaire ; les ménages vulnérables, aggravés par la pandémie et la forte contraction économique des grandes et petites entreprises, entre autres.
Il indique que l’Afrique, dans la conception de ses stratégies de déconfinement, doit tenir compte des effets indirects du COVID-19 comme les voies concernant le commerce, les IDE et les prix des produits de base et leur impact sur la réduction de la pauvreté et la croissance.
Pour sa part, M. Moustapha Mellouk, Fondateur de Casablanca Media Partners, déclare : « Alors que les pays sortent du confinement, les médias ont un rôle essentiel à jouer pour informer les citoyens, stimuler la confiance, l’optimisme et la foi parmi les populations ».
Les panélistes évoquent également la nécessité d’une bonne gouvernance sur le continent pour gérer les ressources disponibles afin de lutter contre la pandémie, la santé mentale et la sécurité alimentaire, avec Mme Songwe soulignant l’importance de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) et assurant le passage des produits alimentaires à travers les frontières pour éviter la famine.
Plus de 1 400 personnes ont assisté au débat en ligne.
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