Addis-Abeba, 02 novembre 2014 (CEA) - L’Afrique souffre toujours d’une tendance au « copier-coller » dans la mise en œuvre de ses politiques, ce qui l’empêche de parvenir à des solutions pertinentes pour résoudre ses problèmes persistants, comme la pauvreté et du chômage.
Tel a été le cœur des échanges qui ont marqué les discussions d’un panel organisé au début de la Conférence économique africaine 2014, qui a démarré samedi 1er novembre 2014, à Addis-Abeba en Éthiopie.
Dans le cadre de cette session intitulée « Produire des connaissances pour la transformation culturelle », Nkosana Moyo, président exécutif du Mandela Institute for Development Studies sud-africain, a dit souhaiter voir les dirigeants se départir de « la facilité » consistant à adapter des politiques provenant du monde développé, et développer plutôt des politiques élaborées à l’échelle locale.
« L’Afrique semble continuer à imiter les pays développés, parfois aveuglément, au lieu de développer un savoir autochtone. Certes, il est bon d’observer et d’apprendre, mais nous ne pouvons convertir le continent en quelque chose qu’il n’est pas », a déclaré Nkosana Moyo.
« Imposer des idées et des systèmes qui ne sont pas viables a un impact négatif sur la majorité des gens qui ne les comprennent pas, a-t-il poursuivi. Si nous souhaitons nous développer de manière pérenne, il faut que les gouvernements investissent en masse dans la recherche et dans des politiques du cru, afin de résoudre les véritables problèmes. Focaliser sur ce qu’ont fait l’Angleterre, la France ou la Chine, sans tenir compte de leurs contextes spécifiques, ne constitue pas une réflexion à long terme ».
Ancienne ministre de la Coopération internationale pour le développement de Suède, Gunilla Carlsson a tenu à rappeler que, avant que l’Europe ne se transforme en un monde développé, elle avait été en prise avec de nombreux défis au cours des siècles précédents, dont beaucoup sont les mêmes auxquels l’Afrique se trouve aujourd’hui confrontée. Selon elle, les dirigeants politiques africains doivent tirer des enseignements de l’expérience européenne, mais avant tout instaurer un environnement favorable à l’esprit d’innovation, pour permettre à leurs citoyens de participer à la construction de leur pays. « La Suède est l’un des pays les plus développés d’Europe. C’est en grande partie parce que nous n’avons pris part à aucune guerre depuis 400 ans – ce qui nous a donné un formidable coup de pouce. L’Afrique doit d’abord mettre un terme à l’instabilité politique, car la plupart des politiques ne peuvent pas fonctionner sans sécurité », a-t-elle ajouté.
Steve Kayizzi-Magerwa, économiste en chef et vice-président de la Banque africaine de développement (BAD), est allé dans son sens, s’inquiétant de ce que plusieurs pays en Afrique prennent le risque d’essayer de « réinventer la roue », au lieu d’investir dans des politiques appropriées qui abordent leurs structures socioéconomiques et politiques directement à la base.
« Nous devons arrêter d’être des analystes fainéants et saisir à bras-le-corps nos défis nous-mêmes. Nous devons cesser de gaspiller nos ressources et mettre en œuvre nos propres idées. L’Afrique doit d’abord comprendre où nous en sommes, ce qui nous amenés ici, et ensuite tenter de comprendre ce qu’il faut faire autrement pour obtenir des résultats différents », a plaidé Steve Kayizzi-Mugerwa.
De l’avis de Moses Rugutt, directeur général par intérim de la Commission pour les sciences, les technologies et l’innovation au Kenya, plusieurs volets des systèmes éducatifs existant en Afrique nécessitent d’être transformés en profondeur, et il faut passer d’un enseignement théorique à la promotion d’innovations pratiques. « Au Kenya, notre politique relative à l’enseignement des sciences nécessitait une restructuration fondamentale, et nous nous sommes donc embarqués dans des changements conséquents. Nous avons adopté des lois fondamentales, qui ont modifié l’environnement de l’enseignement universitaire et nous en récoltons aujourd’hui des bénéfices majeurs », a-t-il affirmé.
« Depuis, plusieurs innovations technologiques ont vu le jour, a-t-il ajouté. Par exemple, M-Pesa, un service de transfert d’argent par téléphone mobile qui a été créé au Kenya a été adopté depuis en Tanzanie, en Afrique du Sud, en Afghanistan, en Inde et en Europe de l’Est. Non seulement ce service a eu un impact considérable sur la vie des Kenyans ordinaires, mais il représente aussi la plus grande exportation technologique de l’Afrique ».
Les panélistes ont également mis en lumière la situation difficile qui est celle des innovateurs africains, qui décident de céder leurs travaux à de grandes sociétés occidentales, conseillant aux organismes gouvernementaux d’instaurer des politiques qui encouragent et récompensent les innovations locales.
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