New Delhi, Inde, le 7 février 2014 (CEA) - Le Sous-Secrétaire général des Nations Unies et Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique (CEA) a mis en garde que les taux de croissance de la population africaine pourrait provoquer une sérieuse concurrence dans la quête des ressources telles que l'énergie, l'eau et la nourriture et même nuire à ses efforts de développement si les décideurs politiques et les scientifiques n’accordent pas l'attention voulue aux changements climatiques.
Prenant la parole ce matin, au Sommet de Delhi sur le développement durable 2014 en Inde, M. Carlos Lopes a appelé à une action volontaire sur l'industrialisation verte pour lutter contre les défis de l'énergie, de l'eau et de la sécurité alimentaire du continent, que les impacts négatifs du changement climatique ont accentué.
Dans un discours liminaire sur «Lutter contre les défis de l'énergie, de l'eau et de la sécurité alimentaire en Afrique», M. Lopes a exhorté les gouvernements régionaux à adopter des politiques en faveur de l’industrialisation verte, qui, si elles sont appliquées à juste titre, pourraient offrir des opportunités d'investissement incroyables et de réels dividendes.
Il dit: «En 2050, la jeunesse africaine à elle seule constituera plus d'un quart de la population active mondiale. Avec une classe moyenne montante et une urbanisation rapide à un rythme qui est plus de deux fois le taux de croissance urbaine de la planète de 3,7% par an - la demande en nourriture, énergie et eau augmentera invariablement».
Il conclut sur une note positive en comparant les performances actuelles de l'Afrique avec celle des pays dans d'autres régions du monde en insistant sur la nécessité de tirer parti des opportunités qui se présentent à l'Afrique pour son programme de transformation, même malgré les changements climatiques.
Il dit: «Avec une croissance moyenne du PIB qui devrait atteindre les 6% cette année, et avec une prospérité continue favorable, l'Afrique est susceptible de dépasser les records de croissance de l'Asie en 2050. Elle est déjà le continent le plus dynamique, en dépit d'une économie mondiale en difficulté et il est impératif pour l'Afrique de capitaliser sur la croissance pour une transformation réelle».
Il a fait valoir que l'une des principales voies de croissance pour l'Afrique est l'industrialisation, en rappelant «qu’il a fallu 155 ans à la Grande-Bretagne pour doubler son PIB au cours de la révolution industrielle et l'Afrique a réalisé la même chose au cours des douze dernières années».
Il souligne: «La clé pour l'Afrique est le type de voie d'industrialisation qu’elle choisit de sorte qu'elle puisse faire partie de la solution de développement durable sans avoir à renoncer à son droit d'industrialisation».
M. Lopes a eu l'occasion de partager une stratégie pour l'avenir de l'Afrique établie en six points --- s’appuyant sur des idées qu'il a abordées lors de la troisième Conférence annuelle sur les changements climatiques et le développement en Afrique (CCDA - III) qui s'est tenue à Addis-Abéba, Éthiopie en octobre dernier.
Il a d'abord mentionné le potentiel immense de l'Afrique de faire un bon en avant vers un nouveau paradigme techno-économique propre, d'autant plus que «seulement 0,3 % de la lumière du soleil qui brille sur les déserts du Sahara et du Moyen-Orient pourrait fournir tous les besoins énergétiques de l'Europe», citant l'Institut de la Commission européenne pour l'énergie.
A cet égard, il fait valoir que, parce que l'Afrique n'est contrainte à des préférences technologiques, elle pourrait suivre la voie de l'énergie verte et écologique, abandonner les anciens modèles à intensité carbonique et poursuivre une voie de développement à faible intensité carbonique.
Deuxièmement, il a appelé à investir davantage dans la climatologie, les services et la production de données de haute qualité en matière de climat pour faciliter le développement de systèmes d'alerte rapide et lancer la recherche si nécessaire sur les incidences du changement climatique, la vulnérabilité et l'adaptation à ce changement; et créer une économie de la connaissance.
Il a rappelé que l'une des entreprises fondamentales et prioritaires du programme du climat pour le développement en Afrique est de rendre l'information climatique largement disponible; et a cité, comme bon exemple, la conférence qui s'est tenue l'année dernière à Arusha, en Tanzanie afin de définir les besoins de l'Afrique dans les domaines de la recherche qui pourrait contribuer à l'information et les connaissances climatiques, guider les décisions politiques et la planification du développement.
Troisièmement, il propose des améliorations majeures dans la capacité institutionnelle et politique de l'Afrique, en faisant valoir «qu'il faut investir dans des mécanismes pour un engagement concerté de tous les acteurs principaux», y compris les climatologues et les spécialistes de sciences sociales, les économistes dans le domaine du développement, les décideurs, les entrepreneurs et les utilisateurs de l'information climatique.
Il a ensuite scruté les avantages des partenariats durables Sud-Sud qui pourraient aider à la gestion des risques, en disant que c'était l'une des raisons de sa présence au Sommet de Delhi sur le développement durable.
«En partageant systématiquement les expériences et les leçons apprises, les pays sujets à des catastrophes confrontés à des défis semblables peuvent parvenir à de meilleures solutions en matière de changement climatique. Par exemple, les pays d'Afrique, des Caraïbes et les petits États insulaires du Pacifique font face aux mêmes défis.
Il souligne: «Ces pays peuvent redoubler d'efforts pour relever ces défis et établir une coopération Sud-Sud afin de se concentrer sur leur défi unique et préparer plusieurs options qui les isolent des vulnérabilités actuelles et développer des opportunités futures. Il est essentiel pour l'Afrique d’aller au-delà de la somme totale des capacités de chaque pays».
Son cinquième point était sur la nécessité de tirer profit de l'agriculture en Afrique. Il explique: «Avec une population croissante et une demande sans cesse croissante de produits alimentaires, les investissements dans l'agriculture sont essentielles» et ajoute que «l'investissement dans les technologies de production, l'innovation, l'utilisation efficace de l'eau et la gestion durable des terres sont indispensables».
Il a insisté sur la nécessité de tirer parti de la capacité du secteur privé à intensifier les investissements dans la transformation agricole qui pourrait créer des emplois et diversifier les produits d'exportation pour libérer l’important effet multiplicateur du secteur dans l'économie.
Enfin, il fait état de l'utilité du tourisme à l'avantage de l'Afrique. Il cite: «Selon l'Organisation mondiale du tourisme, l'Afrique est l'une des destinations touristiques les plus dynamiques», et dit que l'on reconnaît déjà l’importance de l’urgence du besoin pour l'industrie du tourisme; les gouvernements nationaux et les organisations internationales doivent développer et mettre en œuvre des stratégies pour faire face aux conditions du changement climatique.
Il pousse les scientifiques et les décideurs politiques à ne pas perdre espoir face aux défis que le changement climatique pose à l'Afrique, en disant: «le changement climatique fût responsable du bon comme du mauvais dans le passé. Cela s’est produit sans que les humains aient la moindre idée de ce qui se passait. Maintenant, nous le savons. Pour éviter le mauvais et avoir pour objectif le bon, l’Afrique a la possibilité de prendre l'initiative et ne pas être un simple spectateur».
Le Sommet de Delhi sur le développement durable est organisé chaque année en tant que plate-forme internationale pour faciliter l'échange de connaissances sur tous les aspects du développement durable.
La Commission économique pour l'Afrique est avant tout la première institution des Nations Unies en Afrique. Une partie de son travail consiste à aider les gouvernements régionaux à développer et mettre en œuvre des programmes de développement durable et de changement climatique.