Généralités

Les changements climatiques représentent une menace grave pour les plans et priorités de développement des pays africains. Plus concrètement, les efforts visant à réduire la pauvreté, renforcer l’accès à l’eau et à des services énergétiques modernes, à développer les infrastructures et à renforcer la productivité agricole pour satisfaire les besoins d’une population croissante vont certainement s’en trouver affectés. Si on n’atténue pas les causes des changements climatiques et si on ne s’adapte pas à leur impact inévitable, le développement général de l’Afrique et sa bonne performance économique actuelle risquent des revers importants. Dans son quatrième rapport d’évaluation, le Groupe intergouvernemental d’experts sur les changements climatiques (GIEC) a calculé que le réchauffement de la planète signifierait pour le continent une hausse de température entre 0,2 °C (scénario optimiste) et 0,5 °C (scénario pessimiste) par décennie jusqu'à l'an 2100, ce qui laisse entrevoir une multiplication des «chocs climatiques» dans la région (sécheresses, tempêtes, inondations, températures extrêmes et élévation du niveau des mers). Dans son dernier rapport spécial sur les phénomènes extrêmes2, le GIEC souligne également l'importance qu’il y a à prendre en compte l'exposition et la vulnérabilité de plusieurs secteurs clefs face aux phénomènes extrêmes en Afrique, notamment l'agriculture et la sécurité alimentaire, l'approvisionnement en eau, la sécurité énergétique, la sécurité régionale et les migrations, les soins de santé et la biodiversité. La grande vulnérabilité du continent face aux impacts des changements climatiques est encore aggravée par la faible capacité d'adaptation des pays africains, dont beaucoup ne peuvent réagir efficacement à ces défis en raison de facteurs tels que la faiblesse de leur économie et de leurs institutions, la pauvreté généralisée, l’inadéquation de leurs technologies et infrastructures sociales, les conflits et des capacités humaines et financières limitées.

Il est donc impératif que les pays africains tracent une nouvelle voie de développement qui favorise la résilience au climat et un développement à faible taux d’émission de carbone.

L'intégration de la problématique du changement climatique dans la formulation des politiques et les activités de développement sera essentielle dans la recherche de solutions aux questions de changement climatique sur le continent. Il a été souligné à la première Conférence sur les changements climatiques et le développement, tenue à Addis-Abeba en octobre 2011, qu'un lien clair entre recherche, politiques et pratique était nécessaire pour explorer et concrétiser les possibilités offertes par les stratégies d'adaptation et d'atténuation. Par exemple, on ne saurait se passer de données scientifiques sur la variabilité des précipitations pour élaborer et appliquer des stratégies concrètes d'adaptation au stress hydrique et aux phénomènes extrêmes. L'intégration d'informations hydrométéorologiques dans les cadres nationaux et régionaux, tel que le cadre intégré de mise en valeur et de gestion des ressources en eau par exemple, est cruciale pour l'élaboration de stratégies efficaces en cas de pertes et de dommages liés aux effets du changement climatique. Transformer les défis posés par le changement climatique en opportunités nécessite donc une participation active de toutes les parties prenantes au développement de l'Afrique, y compris les responsables politiques, les universitaires et les praticiens. C’est ainsi que de nouveaux modèles de développement tels que l’«économie verte» - en d'autres termes un «développement résilient sur le plan climatique et à faibles émissions de carbone» - doivent être examinés sans tarder par toutes les parties prenantes afin d'éviter des divergences et de s'assurer l’appropriation et l'engagement voulus de tous les acteurs. En effet, les politiques et stratégies sectorielles doivent intégrer la problématique des changements climatiques aux niveaux local, national et régional, tout en prenant en compte les politiques arrêtées au niveau mondial en matière de finances et de transferts de technologie. C'est le cas, par exemple, du Cadre de Nairobi, qui devra s’accompagner de politiques efficaces aux niveaux local, nationale et régional. Cela appelle de toute évidence une révision des cadres institutionnels et directeurs actuels pour prendre en compte les stratégies adoptées aux niveaux mondial, régional et national visant à intégrer le changement climatique dans les efforts faits en matière de développement. Il sera essentiel, par exemple, de revoir les cadres régissant actuellement le financement des politiques climatiques pour traiter des questions telles que l'accès des pays africains à ce financement.

La Conférence, organisée par ClimDev-Afrique, constitue une enceinte propice à la concertation et au dialogue entre diverses parties prenantes intéressées par le climate et le développement en Afrique. ClimDev-Afrique est une initiative conjointe de la Commission de l’Union africaine (CUA), de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et de la Banque africaine de développement (BAD). C’est un programme intégré, qui garantit une grande interaction entre les activités programmatiques organisées par le Centre africain pour la politique en matière de climat (CAPC), celles de l’Unité de lutte contre le changement climatique et la désertification et les activités d’investissement du Fonds d’investissement de ClimDev, qui dépendent respectivement de la CEA, de la CUA et de la BAD. Il a été approuvé, lors de leurs réunions régionales, par les chefs d’État et de gouvernement africains, ainsi que par les ministres africains des finances, du développement économique et de la planification, et par les ministres de l’environnement. Il s’agit de répondre au problème pressant que les changements climatiques posent à la réalisation des objectifs que l’Afrique s’est fixés en matière de développement. Il faut, plus précisément, affiner sensiblement les données climatiques concernant l’Afrique et mieux les utiliser pour la prise de décision en appuyant les activités concernant les capacités d’analyse, la gestion des connaissances et les activités de diffusion. De plus, dans leur décision Assembly/AU/Dec.448(XIX) sur les préparatifs de la dix-huitième session de la Conférence des parties à la Convention-Cadre sur les changements climatiques, adoptée au sommet des 15 et 16 juillet 2012, les chefs d’État africains ont demandé à la CEA, à la BAD et à leurs autres partenaires de renforcer leurs efforts en vue de fournir l’appui nécessaire à une bonne préparation de la session sur le plan de la facilitation et de la coordination. À cet égard, la Conférence sera une occasion importante de coordonner les efforts des uns et des autres. C’est le CAPC, organisme d’exécution et secrétariat de ClimDev-Afrique, qui organise la Conférence. Elle se tiendra les 19 et 20 octobre 2012 au Centre de conférences des Nations Unies à Addis-Abeba (Éthiopie). Cette année, le thème retenu pour la Conférence est Faire avancer le savoir, les politiques et la pratique en matière de changement climatique et de développement. On a ainsi voulu souligner la nécessité urgente de chercher à réaliser sur le continent un développement à l'épreuve des changements climatiques et qui ne soit pas anti-écologique grâce à des pratiques et des politiques plus éclairées. La Conférence se concentrera sur trois sous-thèmes qui visent à mettre en évidence des stratégies et des pratiques optimales dans les domaines de la prestation de services relatifs au climat en faveur du développement, de l’accès à une énergie durable pour tous les Africains d’ici 2030, et des questions non réglées dans les négociations sur le climat, et ce pour les raisons suivantes:

Prestation de services relatifs au climat en faveur du développement:

  • Plusieurs institutions africaines ont commencé à répondre au besoin d'améliorer la prestation des services liés au climat en Afrique. C’est en effet un préalable à la gestion ou à la réduction des risques et à la maximisation des possibilités associées au climat. Ces services garantissent un développement résilient face aux changements climatiques et facilitent donc une adaptation en temps réel à la variabilité du climat et aux changements climatiques.
  • Les systèmes d'observation hydrologique et météorologique, y compris les données terrestres, atmosphériques et océanographiques, constituent un élément crucial pour la gestion et la prévention des risques climatiques. Les systèmes actuellement en place pourraient être renforcés et remis à neuf dans de nombreux cas et de nouveaux systèmes doivent s’y ajouter. En outre, l’analyse des données et la recherche sont essentielles pour comprendre les effets de la variabilité du climat et du changement climatique à court et à long terme respectivement.


Accès à une énergie durable pour tous les Africains d’ici 2030:

  • Le développement est la priorité première de l'Afrique et l'accès à des services énergétiques modernes est crucial si l’on veut relever les défis du développement économique et social sur le continent. Des services énergétiques modernes meilleurs, fiables et sûrs contribueraient à renforcer les possibilités de production, à améliorer les conditions de vie et à stimuler le développement économique. L'Afrique est confrontée à la grave menace du réchauffement climatique, qui devrait affecter des secteurs clés, dont l'agriculture, l'approvisionnement en eau, l’énergie et la sécurité régionale. Dans
  • Le secteur de l'énergie, il est impératif pour l'Afrique de tracer une voie de développement qui soit résiliente face aux changements climatiques et à faible taux de carbone. Cela peut vouloir dire, par exemple, investir dans un panaché de sources d'énergie renouvelables et d'autres sources comme le gaz naturel.
  • L'Assemblée générale des Nations Unies a déclaré l'année 2012 «Année internationale de l'énergie durable pour tous». Elle a voulu ainsi promouvoir un accès mondial à l'énergie durable pour tous d'ici l'an 2030, par des voies respectueuses du climat, des investissements dans le rendement énergétique et les énergies renouvelables. Ce sousthème sera l'occasion de définir et d'analyser les enjeux, les obstacles et les perspectives en la matière.


Questions non réglées dans les négociations sur le climat: pertinence pour l’Afrique:

  • La Plate-forme de Durban pour une action renforcée contient des échéances: 2015 pour que le Groupe de travail spécial termine ses travaux et 2020 pour le début de l’exécution. L'échéance de 2015 est relativement courte compte tenu de l’expérience antérieure dans ces négociations et les obstacles rencontrés. Trois grands défis seront abordés au titre de ce sous-thème:
  • Le cycle de négociations ne doit pas compromettre ou retarder l'adaptation. Face aux évolutions observées dans l'apparition, le moment et la gravité des pluies, dans les températures et dans les dégâts causés par des parasites ou des maladies, les agriculteurs africains n’ont pas attendu pour adapter leurs systèmes productifs.
  • L'écrasante majorité des habitants du continent dépendent des services écosystémiques pour leur subsistance. Il s'agit là d'une relation fragile entre les systèmes naturels et le bien-être de l'homme et comme telle, il y a un besoin urgent de l'intégrer dans les processus de négociation.
  • Les négociations sur le climat doivent être guidées par la connaissance et la science. Les échanges d'idées actuels entre les institutions de savoir africaines (et leurs scientifiques) avec les négociateurs sont essentiels pour pouvoir défendre des positions étayées par les faits. Pour être effective, cette interaction nécessite un renforcement des mécanismes institutionnels.