Pacte pour le redressement de l'Afrique: Mise en oeuvre du partenariat du millénaire pour le programme de redressement de l'Afrique
Introduction : Soutenir le Partenariat du Millénaire pour le Programme de redressement de l'Afrique
I. Fondements du Pacte pour le redressement de l'Afrique - Mesures stratégiques clès au niveau national
- L'Afrique a besoin d'une bonne gouvernance
- L'économie africaine à l'aube du XXIe siècle
- Améliorer la performance macro-économique
II. Domaines clés d'une action conjointe de la communauté internationale et de l'Afrique
- Vaincre la pandémie du VIH/sidaFournir les services de santé de base
- Investir dans la population : accroître les ressources affectées à l'éducation
- Offrir l'ICT et rétrécir le fossé numérique
- Renforcer les capacités de rechercheAméliorer l'infrastructure clé
- Renforcer la coopération régionale
III. Un nouveau partenariat international avec l'Afrique
IV. Renforcer les partenariats pour le développement de l'Afrique
" L'Afrique n'en est plus à rejeter sur le passé le blâme de ses problèmes. La tâche d'effacer ce passé nous incombe, avec le soutien de ceux qui veulent se joindre à nous pour un renouveau du continent. Nous avons une nouvelle génération de dirigeants qui savent que nous devons assumer la responsabilité de notre propre destin, que nous nous élèverons nous-mêmes au prix de nos propres efforts, en partenariat avec ceux qui nous veulent du bien. "
Nelson Mandela
Introduction
1. Le Partenariat du Millénaire pour le Programme de redressement de l'Afrique (Partenariat) a pris figure d'initiative africaine pour le développement, rassemblant toutes les initiatives de partenariat dans un cadre unique. Le Pacte pour le redressement de l'Afrique est conçu pour fournir au Partenariat un soutien technique et analytique. La présente introduction dessine le cadre général du Pacte pour le redressement de l'Afrique : ses origines, ses aspects et ses buts. Elle met en valeur les questions qui seront examinées aux cours de la Conférence de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA) qui regroupera les ministres africains des finances et les ministres africains du développement et de la planification économique,et qui se tiendra à Alger du 8 au 10 mai 2001.
Aperçu général
2. Adoptée par le Sommet du millénaire des Nations Unies en septembre 2000, la Déclaration du millénaire consacre tout un chapitre à la recherche de solutions aux besoins particuliers de l'Afrique. Appuyer l'Afrique dans les domaines du renforcement de la démocratie, encourager et soutenir les mécanismes régionaux et sous-régionaux de prévention des conflits, promouvoir la stabilité politique, s'attaquer aux enjeux de l'éradication de la pauvreté et du développement durable, y compris l'annulation de la dette, l'amélioration de l'accès aux marchés commerciaux, l'accroissement de l'Aide publique au développement, aider l'Afrique à développer ses capacités à stopper la pandémie de VIH/Sida et d'autres maladies infectieuses, sont les priorités sur lesquelles insiste la déclaration.
3. Le Pacte pour le redressement de l'Afrique représente une part importante des actions menées par la CEA pour appliquer la Déclaration du millénaire. L'idée de développer le Pacte est née d'une déclaration faite par le Secrétaire exécutif de la CEA, M. K.Y. Amoako, lors de la huitième session de la Conférence de la CEA des ministres africains des finances, tenue à Addis-Abeba en novembre 2000. La déclaration appelait à l'établissement d'un Pacte avec l'Afrique sous couvert duquel les pays développés investiraient les moyens nécessaires telles une aide financière, l'allégement de la dette et l'ouverture des marchés pour donner aux économies africaines l'impulsion dont elles ont besoin. En retour, l'Afrique devrait être capable de mettre en place les réformes politiques nécessaires pour permettre à ces économies de décoller.
4. Faisant sienne la proposition du Secrétaire exécutif, la Conférence a adopté une résolution demandant à la CEA de définir les modalités du Pacte pour qu'elles soient examinées lors de la Conférence commune des ministres des finances et des ministres du développement et de la planification économiques de la CEA, prévue à Alger en mai 2001. La résolution suggère également que le Secrétaire exécutif s'entretienne avec des individus et des institutions, y compris les partenaires de développement des Nations Unies et de l'Afrique, pouvant au mieux garantir que le Pacte soit mis en place. Alors que progressaient le processus de définition de le Pacte comme les consultations à ce sujet, il est apparu que les Présidents Mbeki d'Afrique du Sud, Obasanjo du Nigéria et Bouteflika de l'Algérie lançaient une initiative connue sous le nom de Partenariat du Millénaire pour le Programme de redressement de l'Afrique (Partenariat).
5. Découlant de la nette conviction générale que les dirigeants africains ont le devoir pressant d'éradiquer la pauvreté dans leur pays, le Partenariat a pour objectif de conduire, à l'aube de ce nouveau siècle, l'Afrique vers une croissance et un développement durable. Le Partenariat cherche à s'appuyer sur la tendance actuelle au changement et au progrès que reflètent, sur le continent, l'adoption de réformes économiques, la consolidation de la démocratie et les nouvelles méthodes de gestion des conflits. Il reconnaît qu'un nouveau partenariat efficace avec la communauté internationale est essentiel à son succès tout comme il souligne que les gouvernements africains et les africains eux-mêmes ont la responsabilité première de sa mise en oeuvre. Voici les objectifs du Pacte conçu comme un apport technique à l'élaboration et la mise en oeuvre du Partenariat.
6. A peu près à la même époque, le Président Abdoulaye Wade du Sénégal a annoncé son Plan OMEGA pour l'Afrique. Celui-ci établit que le développement d'un capital matériel et d'un capital humain est une condition essentielle à la croissance durable et équilibrée. Il souligne de même la nécessité d'investissements conduits sous l'égide d'une seule autorité internationale dans les secteurs prioritaires. Le Plan OMEGA possède la même vision et les mêmes objectifs que le Partenariat. Tous deux sont inspirés par le besoin de conduire, à l'aube de ce nouveau siècle, l'Afrique vers la croissance et le développement durable et tous deux sont basés sur le précepte que l'Afrique doit endosser la responsabilité première de cet effort. De ce fait, les Chefs d'Etat et de Gouvernement se sont, au Sommet extraordinaire de l'OUA à Syrte (Libye) en mars 2001, mis d'accord pour que le Partenariat et le Plan OMEGA fusionnent.
7. Suite à ce bref aperçu, le reste de l'introduction présente les aspects essentiels du Pacte, soulignant les questions principales qui seront examinées par les ministres, y compris les résultats escomptés de la Conférence ministérielle de la CEA qui se tiendra à Alger.
Les principaux aspects du Pacte
8. Le moment est décisif pour élaborer une nouvelle approche au développement de l'Afrique, approche qui s'appuie sur l'élan fourni par ce que le Partenariat a décrit comme la 'détermination sans précédent des africains à se sortir et à sortir leur continent du malaise du sous-développement et de l'exclusion au sein d'une économie en voie de mondialisation'. Nous sommes à un moment critique où les leçons apprises peuvent être mises à profit au mieux. Le Pacte est donc un instrument opportun, s'appuyant sur des modalités existantes et les meilleures méthodes de développement en train de voir le jour, pour élaborer une véritable réponse aux enjeux du développement en Afrique. Le Pacte ne propose pas de nouvelles formes ou de nouveaux instruments d'aide. Il a plutôt pour but de mettre entièrement à profit l'étendue de ce qui existe déjà et, en apportant un point de vue africain sur l'approfondissement des partenariats, de stimuler une transformation des relations d'aide au développement, notamment en incitant des partenariats entre le public et le privé.
9. Le Pacte s'inspire de nombreuses recherches sur les divers aspects des enjeux du
développement en Afrique. Les six chapitres du document sont :
I. Les fondements du Pacte pour le redressement de l'Afrique-Mesures stratégiques clès au niveau national ;
II. Les domaines clés d'une action conjointe de la communauté internationale et de l'Afrique ;
III. Un nouveau partenariat international avec l'Afrique ;
IV. Renforcer les partenariats pour le développement ;
V. Renforcer le rôle du secteur privé dans le développement ;
VI. Mise en oeuvre du Pacte: La marche en avant.
10. Le Chapitre I traite des mesures nationales essentielles que doivent prendre les dirigeants africains s'ils souhaitent prendre place à bord du 21ème siècle. La bonne gouvernance est un aspect central du Pacte. En Afrique, comme dans le monde entier, on s'accorde généralement sur l'idée que la qualité du gouvernement est un facteur clé de la réduction de la pauvreté. Une gouvernance médiocre se traduit par la corruption, les conflits et des dépenses élevées dans des secteurs improductifs tels que les forces militaires. Une telle situation entrave le développement des secteurs public et privé tout en refusant à la population l'accès à des soins de santé adéquats et à l'éducation. Dans les pires cas, cela débouche sur un cercle vicieux d'appauvrissement, de conflits, de déplacements de population et de fuite des capitaux. Un gouvernement de haute qualité est plus capable de concevoir et d'appliquer des politiques et programmes efficaces. Il est aussi relativement transparent et responsable, exerçant ses pouvoirs conformément à la constitution, faisant régner l'état de droit, assurant une saine gestion des finances nationales et garantissant à la population les libertés civiles, les libertés économiques et les services sociaux essentiels. Enfin, et ce n'est pas le moindre, le capital international recherche dans une économie en voie de mondialisation des pays sûrs et régis par le droit, pourvus d'un bon système éducatif, dans lesquels il investit de préférence. La bonne gouvernance est une condition préalable de la réduction de la pauvreté.
11. Le Pacte souligne les mesures de gouvernance nécessaires au passage, par les dirigeants nationaux africains, d'un accord effectif avec leur concitoyens sur les progrès de développement à réaliser dans les années à venir. Des actions sont à prendre pour renforcer les structures de représentation politique et garantir une plus large participation au pouvoir, promouvoir la transparence et la mise à disposition publique des informations, la participation du secteur privé et de la société civile dans le choix des politiques, et établir une représentation et une participation plus équilibrée entre les sexes.
12. Le Pacte est fondé sur la reconnaissance du fait que, dans les conditions actuelles et compte tenu des tendances actuelles, l'économie des pays africains sera très loin d'atteindre les taux de croissance nécessaire pour réaliser, d'ici 2015, les objectifs internationaux de développement (IDG). L'Afrique est la seule région du monde où le nombre de personnes qui essaient de survivre avec moins d'un dollar par jour est en train d'augmenter. Pour parvenir aux IDG, l'Afrique doit atteindre une croissance de 7% par an : plus de deux fois son taux de croissance actuel. Il faut donc que d'importantes ressources soient mobilisées, aussi bien nationalement qu'internationalement. Le premier Chapitre du document présente les mesures nécessaires pour parvenir à la stabilité macro-économique et à la croissance économique, tout comme celles requises pour obtenir des fonds nationaux et refermer les écarts d'économies.
13. Le Chapitre II décrit les sept domaines critiques pour une action africaine et internationale conjointe. Les sept domaines ont été établis pour englober des questions de survie majeures, pour lever les freins au développement, spécifiques à tout le continent, et créer les opportunités de maximiser son potentiel. Tout d'abord, vaincre la pandémie de VIH/Sida est une question élémentaire de survie qui appelle à une mobilisation immédiate d'urgence. Puis, des services de santé de base sont requis à travers le continent. En effet, sans une population en bonne santé, le développement économique est impossible. Enfin, les systèmes éducatifs africains doivent être réabilités : l'investissement dans les ressources humaines est une condition sine qua non du développement. Dans tous ces secteurs, une réforme des politiques, un renforcement des structures qui fournissent ces services et un accroissement des ressources sont également nécessaires.
14. Une action ciblée dans un domaine choisi peut ouvrir de véritables opportunités. Le quatrième domaine d'action critique du Pacte concerne les Technologies de l'information et de la communication ainsi que le fossé numérique. Si l'Afrique parvient à quitter sa position marginale dans ce domaine, son économie aura alors la possibilité de faire un bond en avant. L'Afrique devrait ensuite renforcer ses capacités de recherche, en particulier dans les secteurs de l'agriculture, de la santé, des sciences de l'environnement et des politiques d'administration. Sixièmement, d'importantes améliorations des infrastructures de base peuvent permettre de dépasser les problèmes rencontrés en terme de compétitivité. Enfin, la croissance économique de l'Afrique ne peut se faire sans un renforcement de la coopération régionale.
L'Afrique a besoin d'un nouveau partenariat international
15. Il est évident que l'Afrique ne peut parvenir à une croissance économique durable et à une réduction de sa pauvreté sans que ne soit modifié le caractère de son partenariat avec la communauté internationale. Le Chapitre III présente les mesures particulières que devrait prendre la communauté internationale comme bases au Pacte pour le redressement de l'Afrique.
16. On a déjà beaucoup appris sur les façons d'améliorer les performances de l'aide au développement. Si celle-ci a connu certains succès, les partenaires, de chaque côté, sont de plus en plus mécontents des résultats obtenus. Aujourd'hui, l'examen des registres, l'identification des meilleures méthodes d'utilisation et l'instauration de nouvelles modalités de coopération se fait avec une honnêteté sans précédent. Pour réussir dans ce domaine, il faut que les Africains décident eux-mêmes de leurs politiques et programmes. Le continent est multiple et aucune solution n'est applicable à toutes les situations. Le Chapitre III traite de la quantité des flux d'investissement, le Chapitre IV de leur qualité.
17. Le Document défend l'idée que l'Afrique n'a pas seulement besoin d'investissements plus importants mais aussi d'une meilleur utilisation de ces ressources. L'accroissement de l'APD est nécessaire si l'on souhaite aider l'Afrique à combler son déficit financier actuel d'environ 10 milliards de dollars par an et lui permettre d'atteindre, en 2015, les IDG en matière de réduction de la pauvreté. (Ce chiffre n'inclut pas les ressources nécessaires au traitement de la pandémie de VIH/Sida). Une aide plus importante devrait être accordée aux pays qui ont démontré une capacité à utiliser correctement cette assistance. Elle devrait toucher les domaines prioritaires.
18. Il faut à tout prix sortir rapidement et durablement de la crise de la dette. Les initiatives actuelles de réduction de la dette doivent être renforcées et poussées, tout comme les possibilités d'aide financière ne doivent pas dépendre autant de prêts, qui comportent le risque de faire retomber un pays dans l'endettement. Le Pacte propose des modifications aux processus de décision, aux modes d'évaluation et de financement des principaux partenaires de développement de l'Afrique et des réformes actuelles en cours.
19. C'est par son commerce international que l'Afrique aura une chance de se développer. Les exportations constituent le moyen d'obtenir des investissements et des financements à long terme : elles sont le moteur incourtournable de la croissance économique. Ainsi, pour que ce moteur fonctionne, il faut que les produits africains aient davantage accès au marché international. L'Afrique se heurte à bien trop de barrières lors de la vente de ses produits à l'étranger - en particulier lorsqu'il s'agit de produits de base manufacturés pour lesquels l'Afrique représenter une concurrence. Le Pacte prévoit la mise en place d'une série de mesures au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), de l'ACP et, de manière bilatérale, avec les partenaires commerciaux afin, dans certains domaines, de rendre plus équitables les conditions d'accès et de fournir, pour d'autres, un accès préférentiel aux marchés.
20. Ce document met en avant le rôle critique que doit jouer le FDI pour répondre aux demandes du continent africain en matière d'investissement. Dans la décennie à venir, l'Afrique soit se développera grâce au dynamisme du secteur privé, soit ne se développera pas du tout. Cette question est exposée au Chapitre V.
21. Le Chapitre IV se concentre sur la partie centrale du Pacte pour le redressement de l'Afrique. L'innovation du Pacte est de proposer la transformation des partenariats entre les pays africains aux meilleures performances économiques et leurs partenaires internationaux. Alors que le chapitre précédent traitait de la quantité d'investissements nécessaire, celui-ci se penche sur la qualité de l'aide apportée. L'idée essentielle est qu'avec une mise à jour et une application systématique des meilleures méthodes d'utilisation de l'aide, et ce dans le cadre du Partenariat, il sera possible de faire fleurir la coopération dans le domaine du développement. Le Pacte comporte quatre principes de base délimitant la nouvelle forme plus large de partenariat discutée dans ce chapitre.
22. Le premier principe est la propriété africaine sur les conceptions à long terme et les objectifs de développement national tout comme sur les politiques et programmes de réduction de la pauvreté ainsi que sur la participation accrue des pays africains à l'économie mondiale. Outre qu'il s'appuie sur les cadres existants au niveau des pays telles que les Cadres généraux de développement et les Stratégies de réduction de la pauvreté, et utilise les institutions et forums existants, le Pacte propose davantage de mesures pour asseoir et accroître la propriété africaine.
23. Des investissements stables à long terme et un soutien prédictible des donateurs constituent le second aspect du nouveau partenariat : ces éléments sont nécessaires au succès des politiques d'aide au développement et de la gestion économique. Plusieurs des principaux donateurs sont en train d'adopter cette approche, en simplifiant et harmonisant leurs conditions de participation et en s'engageant davantage sur le long terme. Un aspect important du Pacte est qu'il cherche à établir les modalités d'institutionalisation de ce principe.
24. Le troisième principe est un partenariat amélioré qui s'appuie sur une responsabilisation mutuelle. Celle-ci permettrait un accord sur les résultats de développement, y compris de soigneuses évaluations et un contrôle des performances à la fois au niveau des pays africains et des partenaires internationaux. Le Pacte prévoit de nouveaux mécanismes de contrôle conjoints sur les performances aussi bien des donateurs que des récipiendaires, et surtout sur les résultats. Cet aspect est l'un des plus innovatifs et l'une des contributions les plus profitables du Pacte. Il sera requis des donateurs plus de transparence et de responsabilité et l'accent sera mis sur les secteurs où ils possèdent des avantages stratégiques.
25. Autre avantage majeur du Pacte, le dernier principe est la reconnaissance de la diversité de l'Afrique. Le continent est une mosaique de pays aux immenses différences. Certains pays peuvent bénéficier immédiatement de toutes les mesures envisagées alors que d'autres ont besoin d'améliorer leur systèmes de gouvernance et de gestion économique avant de pouvoir être éligibles. Le Pacte propose trois catégories générales de pays : "partenariat amélioré", "partenariat limité" et "après-conflit", comprenant des modalités d'assistance appropriées à chaque cas. Ceci ne doit pas être vu comme un classement immuable ou rigide mais plutôt comme un cadre de travail opérationnel permettant d'organiser les relations avec différents types de pays.
26. Le Pacte propose que les pays bénéficiant du partenariat amélioré - ceux qui répondent aux critères du Pacte en matière de gouvernance, de performances économiques et d'engagement envers la réduction de la pauvreté - puissent profiter pleinement de toutes les mesures envisagées et bénéficier de l'amélioration, aussi bien qualitative que quantitative, des investissements. Ces pays devraient recevoir une aide budgétaire directe en accord avec les plans de financement à moyen terme des activités visant à réduire la pauvreté selon les objectifs fixés.
27. Les pays de la catégorie 'partenariat limité' sont ceux actuellement dans l'impossibilité d'utiliser pleinement et efficacement les apports d'aides, qui seront de fait limités. L'éligibilité de ces pays pour un soutien financier sera évaluée en fonction de trois groupes de paramètres. Tout d'abord, les populations pauvres de ces pays ne peuvent être abandonnées. Deuxièmement, il existe un risque qu'un pays obtenant des performances médiocres puisse mettre en péril les perspectives de développement d'un pays voisin. Enfin, le partenariat international est un moyen d'établir une confiance mutuelle - notamment dans le cas des donateurs qui ont des liens historiques importants avec le pays en question. Pour ces pays, le Pacte établit une stratégie en deux temps. Ils peuvent bénéficier de mesures communes dans les domaines sensibles, notamment de programmes dans le domaine du VIH/Sida et d'investissements essentiels pour les services de santé publique, d'éducation et les infrastructures de base, dans le contexte de politiques sectorielles appropriées et de critères de mesure d'efficacité. En parallèle, les partenariats internationaux chercheront à promouvoir la bonne gouvernance et les réformes économiques, pour, petit à petit, amener ces pays aux résultats permettant d'obtenir un partenariat amélioré.
28. Le document propose des mesures spéciales pour la troisième catégorie de pays, appelés 'pays après-conflit'. L'assistance apportée visera à accroître les fonds de reconstruction. Elle interviendra au niveau de la remise en place de l'état et de ces principales institutions, en appuyant la démilitarisation, et de la reconstruction des communautés pour que soient satisfaits les besoins de ces pays.
29. Le Chapitre V traite du futur moteur principal du développement économique africain : le secteur privé. Il est aujourd'hui incontestable que la seule source qui puisse prodiguer le financement à long terme nécessaire à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté est le secteur privé, qu'il soit national ou international. Le Pacte reconnaît que les affaires et les marchés commerciaux sont la pierre angulaire du développement et sont les principaux outils pour passer d'une situation de dépendance vis-à-vis de l'APD à une véritable croissance économique. De manière non négligeable, la croissance économique a déjà lieu grâce à l'impulsion du secteur privé. Le document rappelle donc certains des progrès significatifs réalisés de cette manière au cours des dix dernières années. Un secteur privé vivide et concurrentiel peut jouer un rôle central pour sortir les gens de la pauvreté ; il peut fournir des services correctement gérés et constituer de solides marchés de capitaux. Une place importante est prévue dans le Pacte pour les partenariats public-privé en Afrique comme pour certains mécanismes qui peuvent permettre d'y aboutir, notamment la responsabilisation des gouvernements nationaux et la supervision régionale. Le message délivré par ce Chapitre est un message optimiste : lorsque les conditions seront réunies, le financement du secteur privé menera l'Afrique sur la voie du développement.
30. Le Chapitre VI se penche sur les moyens d'avancer : mettre ces nouveaux partenariats d'aide en pratique. Le cadre de travail général du Pacte prévoit des actions à toutes sortes de niveaux pour exploiter vraiment les initiatives actuelles et les enrichir de nouveaux procédés. Qu'elles soient africaines ou internationales, des mesures seront nécessaires à l'adoption mutuelle des principes du Pacte.
31. Le Forum des Chefs d'Etat du Partenariat sera un moment décisif pour cimenter la mise en place du Pacte. Cette rencontre a été proposé par le Partenariat lors de son forum au plus haut niveau, réunissant des dirigeants d'un groupe choisi de pays aux approches similaires. Ce groupe peut constituer le leadership continental nécessaire puisqu'il répond aux conditions du 'partenariat partagé' proposé par le Pacte. Le Forum des Chefs d'Etat peut tenir plusieurs rôles majeurs. Tout d'abord, il peut diriger politiquement et au plus haut niveau l'intiative. Il peut ensuite devenir un mécanisme de responsabilisation mutuelle par rapport aux objectifs convenus. Les dirigeants africains pourront ainsi soulever, avec les partenaires internationaux de l'Afrique, les problèmes importants relatifs à l'aide apportée au continent et demeurer cohérent dans leur décision tout comme dans leur association avec leur homologue au niveau des pays développés, l'OCDE. Troisièmement, le Forum établira, en collaboration avec les institutions pertinentes et compétentes du continent, les mécanismes pour que le plus grand nombre possible de pays africains se lance dans l'examen attentif des performances en matière de gouvernance et de gestion financière. Enfin, le Forum examinera ouvertement la question de la diversité à l'intérieur du continent africain.
Questions devant être examinées par la Conférence des ministres et résultats escomptés
32. Le présent document est établi par la CEA pour la Conférence conjointe des ministres africains des finances et des ministres africains du développement et de la planification économiques, qui se tiendra à Alger en mai 2001. La Conférence d'Alger constitue la première opportunité pour les ministres africains de donner leur point de vue sur les fondements et principes directeurs du Pacte pour le redressement de l'Afrique, les approches proposées pour sa mise en oeuvre, son impact sur la transformation des relations d'aide au développement, les domaines principaux sur lesquels les programmes mettent l'accent, et les liens prévus entre le Partenariat et le Pacte.
33. Les discussions ministérielles porteront en particulier sur les questions suivantes :
(a) Quelles devraient être les principales mesures stratégiques à lancer par les gouvernements africains au niveau national ?
(b) Quelles mesures stratégiques sont demandées de la part des partenaires internationaux de développement ?
(c) Quelles sont les transformations essentielles recherchées au niveau du partenariat avec l'Afrique ?
(d) De quelle manière peuvent être mis en pratique les quatre principes directeurs du Pacte ?
(e) Comment renforcer les liens entre le Partenariat et le Pacte ?
34. Grâce à l'attention donnée à ces questions par les ministres, la Conférence aidera à établir un point de vue africain sur la transformation à apporter au partenariat avec la communauté internationale pour le développement de l'Afrique. La Conférence permettra de mieux faire comprendre, à tous les interessés, les conséquences opérationnelles et les engagements mutuels implicites au Pacte, et aidera à mobiliser le soutien international pour ce partenariat. Les discussions avisées des ministres africains sur le Pacte montreront que les objectifs fixés par le Partenariat peuvent effectivement être atteints. Les discussions peuvent aussi faciliter la fusion du Plan OMEGA et du Partenariat dans le contexte des accords passés à Syrte en mars dernier.
35. En dernière analyse, la mise en oeuvre des objectifs du Partenariat ne peut se faire qu'au niveau des pays. En fonction des résultats de la Conférence, la CEA travaillera avec les dirigeants africains sur les modalités de mise en pratique du Partenariat. Les détails des programmes seront approfondis dans l'ouvrage préparé parallèlement à ce document, qui sera lui présenté à la Conférence d'Alger.
[sommaire]
CHAPITRE PREMIER
LES FONDEMENTS DU PACTE POUR LE REDRESSEMENT DE L'AFRIQUE
MESURES STRATEGIQUES CLES AU NIVEAU NATIONAL
36. Les pays africains se heurtent à des défis redoutables s'ils entendent mener à bien un agenda de transformation économique suffisant pour échapper à la pauvreté et occuper pleinement leur place au XXIe siècle. La gouvernance en est le secret. Les dirigeants politiques africains doivent conclure un pacte avec leurs peuples sur les progrès du développement dans les années à venir. Avec des mécanismes participatifs et inclusifs permettant d'élaborer les politiques et les programmes appropriés, les gouvernements africains n'ont aucune raison de se trouver en retard dans la fixation de leurs propres agendas de développement. Avec les capacités institutionnelles nécessaires pour mettre en oeuvre des politiques et programmes efficaces, les ressources internes n'ont pas à être gaspillées et l'aide internationale peut être utilisée efficacement. Les dirigeants politiques aux niveaux national, régional et international affrontent les défis avec une franchise sans précédent. Nous sommes à un moment critique où les enseignements tirés peuvent être appliqués de la manière la plus fructueuse.
37. Le présent chapitre expose les traits essentiels de la bonne gouvernance. Y sont identifiés les principaux défis que les gouvernements africains doivent relever. La situation économique très difficile que connaît actuellement l'Afrique y est examinée, avant d'aborder les fondements macro-économiques qu'appellent le développement durable et la réduction de la pauvreté. Il y est ainsi proposé un agenda de promotion de politiques efficaces en faveur des pauvres, dont les éléments chevauchent et se renforcent mutuellement.
38. Une série de programmes, secteur par secteur, sont exposés au Chapitre II; ils exigent des mesures communes aux niveaux national et international. Des détails plus complets sur les mesures nécessaires en matière de gouvernance et de réforme économique seront présentés dans le volume à paraître.
[sommaire]
L'AFRIQUE A BESOIN D'UNE BONNE GOUVERNANCE, DE LA PAIX ET DE LA SECURITE
39. Le Pacte pour le redressement de l'Afrique est fondé sur l'engagement des gouvernements africains de mettre leur maison en ordre. Cela signifie avant tout qu'ils établiront une bonne gouvernance et feront régner la paix et la sécurité. C'est là sur quoi se fonde l'engagement de s'attaquer à la pauvreté et de mettre au point des politiques et stratégies favorables aux pauvres, visant à atteindre les objectifs internationaux du développement.
La lutte contre la pauvreté suppose une bonne gouvernance...
40. Il y a des liens étroits entre la bonne gouvernance, des institutions qui fonctionnent et la réduction de la pauvreté. Une économie de marché ne peut bien fonctionner en l'absence de bonne gouvernance et d'institutions qui fonctionnent. Les ressources ne seront pas affectées à leurs utilisations les plus efficientes; les individus se livreront à des activités absolument improductives, comme la corruption sous toutes ses formes. La croissance de la productivité sera gravement menacée. Moins d'emplois seront créés, les revenus des ménages et la protection sociale seront en recul. Les éléments essentiels d'une bonne gouvernance embrasse un éventail de mesures visant à créer des sociétés plus ouvertes et participatives et à promouvoir plus de responsabilité et de transparence dans les affaires publiques. Pour que la pauvreté soit effectivement réduite, il est impératif que l'on s'engage à adopter d'un commun accord des principes de gouvernance portant sur un éventail de questions relatives à la nature et à la capacité de l'État de garantir les droits de chaque citoyen, de renforcer la démocratie et de promouvoir l'état de droit. Cela comprend, entre autres, l'engagement de soutenir les évaluations de la gouvernance et des processus participatifs afin de déterminer les mesures à prendre, d'élaborer des repères appropriés pour mesurer les améliorations apportées à la gouvernance au cours du temps, de mettre au point et d'appliquer un programme de mesures (par exemple, changements dans la législation ou la politique et réformes institutionnelles) afin de remédier aux insuffisances de la gouvernance.
... et la prévention des conflits
41. Les conflits armés sont une cause majeure de la pauvreté et du déclin économique de l'Afrique. La guerre consume des ressources et cause des pertes en vies humaines, elle détruit les avoirs et déplace les populations, elle sape la démocratie et la bonne gouvernance. Les conflits armés ont retardé de plusieurs décennies le développement économique de l'Afrique. La pauvreté de l'Afrique rend la paix d'autant plus essentielle. Malheureusement, la pauvreté contribue aussi aux conflits armés. L'inégalité de l'accès aux ressources explique, entre autres raisons, pourquoi les groupes exclus recourent à la violence. Ceci fait ressortir l'importance d'un développement durable et équitable et d'une amélioration de la gouvernance dans la réduction des conflits. Les interventions en matière de développement humain qui réduisent la pauvreté, réduisent les inégalités dans l'accès aux ressources et encouragent la participation des groupes exclus à la société, jouent toutes un rôle dans l'atténuation des facteurs qui débouchent sur un conflit.
42. L'expérience récente de l'Afrique fait aussi ressortir la nécessité d'institutions et de mécanismes robustes pour la paix et la régionales. Aucun pays ne peut se considérer à l'abri si son voisin est enlisé dans un conflit. Les mécanismes de prévention, de gestion et de résolution des conflits doivent être partie intégrante d'un programme complet de développement.
La route de la bonne gouvernance est bien tracée....
43. Le progrès de la bonne gouvernance passe par des étapes bien dessinées. Les gouvernements africains peuvent consolider systématiquement les structures de la représentation politique de manière à assurer l'inclusion de toutes les parties intéressées dans le pays. Ils peuvent développer leurs capacités institutionnelles et agir dans le respect de la constitution. Les mesures qui promeuvent la transparence et la responsabilité auront un impact sensible sur l'adoption et la mise en oeuvre efficace de politiques favorables aux pauvres.
44. Il importe de rendre accessibles à tous les informations relatives au fonctionnement interne du gouvernement. Dans les assemblées législatives, les marchandages ont plus de chances d'aboutir quand les partis politiques ont accès à des informations qui leur permettent de peser les coûts et les avantages liés aux autres choix possibles. Il convient aussi que des autorités indépendantes assurent toute liberté d'accès aux auditions publiques et autorisent les pétitions. Une charge de médiateur, qui permette aux citoyens de soumettre des cas de décisions administratives injustes à leurs yeux, aidera aussi à limiter au minimum la corruption et à accroître la confiance du public dans l'administration.
45. La participation de la société civile et du secteur privé à la définition des politiques rend plus probable que celles-ci soient appliquées de manière efficace. L'inclusion de tous les groupes sociaux dans les structures de représentation politique et dans les organes exécutifs encouragera une plus grande justice sociale.
46. La représentation et la participation des deux sexes à la prise de décision, cela à tous les niveaux, sont non seulement souhaitables en elles-mêmes, mais aussi de nature à promouvoir un souci accru du bien public et une prestation efficace des services sociaux.
47. L'amélioration des capacités de traitement et de diffusion de l'information, au sein des assemblées législatives, facilite la transparence des évaluations de l'impact économique. Il convient de renforcer les institutions de recherche afin d'offrir des études analytiques approfondies de l'impact économique potentiel des mesures législatives proposées. Les projets de loi proposés devant le Parlement doivent faire l'objet d'une analyse rigoureuse de la part de tous les secteurs de la société civile.
... mais nous devons mettre au point des mécanismes de suivi
48. Le suivi de la bonne gouvernance est une tâche essentielle. La CEA est en train d'élaborer des indices de la bonne gouvernance, sur la base de points de référence correspondants aux normes de la bonne gouvernance, qu'il soit possible d'évaluer au moyen d'une enquête. Les indicateurs reflètent trois dimensions différentes de la gouvernance.
49. La première est la représentation : c'est-à-dire la mesure dans laquelle tous les secteurs de la société sont représentés, de manière équitable et efficace, dans les structures du gouvernement et les processus de prise de décisions. Il s'agit d'indicateurs tant qualitatifs que quantitatifs, centrés sur l'inclusion de tous les groupes sociaux et sur la représentation des deux sexes, aussi bien que sur les résultats de la participation de ces groupes au niveau de l'adoption des politiques. Le rôle des médias et le libre accès à l'information constituent un élément additionnel.
50. La deuxième est l'efficacité institutionnelle. Les indices sont centrés sur les points suivants : respect de l'organe exécutif pour l'état de droit; mesure dans laquelle les assemblées législatives s'entendent à rédiger et promulguer des textes de loi; indépendance et capacité du système judiciaire; mesure dans laquelle les institutions chargées de faire respecter la loi s'acquittent de leurs tâches et sont soumises au contrôle nécessaire; existence d'institutions de réglementation et de contrôle transparentes et crédibles; étendue de la participation de la société civile et du secteur privé; qualité de la décentralisation et capacité d'une prestation efficace des services aux pauvres.
51. La troisième dimension, ce sont les capacités de gestion économique. Un bon régime macro-économique est essentiel, mais non suffisant en lui-même. Les indicateurs considéreront aussi un ensemble central de problèmes qui sont au coeur de la relation entre la gouvernance, d'une part, la croissance économique et la réduction de la pauvreté, de l'autre. Ce sont les suivants : efficacité du système de production et de distribution du revenu; audits indépendants; reconnaissance du rôle du secteur privé; discipline budgétaire; système d'achat transparent et crédible; mesure dans laquelle est connu le mode de répartition des crédits budgétaires entre les deux sexes; indépendance, efficacité et crédibilité du contrôle administratif, et détermination d'alléger la pauvreté. Transparence, responsabilité et capacité sont les vertus cardinales.
52. Il convient de souligner que le projet de la CEA va au-delà d'une activité de suivi, et qu'il ne vise pas à proposer un classement des pays. Il s'agit d'un mécanisme conçu pour promouvoir le dialogue, identifier les meilleures pratiques et les secteurs où de nouvelles réformes et de nouveaux progrès s'imposent, et pour encourager l'attachement des gouvernements à la bonne gouvernance.
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L'ECONMIE AFRICAINE A L'AUBE DU XXIe SIECLE
53. Au cours des années 90, l'Afrique a vu progresser sensiblement ses taux de croissance économique. Cependant, le redressement économique est fragile et les niveaux de vie sont encore très bas. Les prévisions pour l'an 2015 donnent à penser que l'Afrique n'atteindra pas les objectifs internationaux de développement concernant la réduction de la pauvreté, même dans le scénario de croissance le plus favorable. En outre, la transformation structurelle, qui est la clé d'une croissance soutenue et de la réduction de la pauvreté, ne s'opère pas assez vite pour faire reculer sensiblement la pauvreté.
54. La croissance récente de l'Afrique n'est pas soutenue par une épargne et un investissement solides au niveau national. De plus, les économies africaines restent vulnérables aux changements dans les conditions climatiques et sont fortement tributaires d'une aide extérieure concessionnelle. De fait, la croissance économique n'a été que de 2,1 % en moyenne durant la dernière décennie, c'est-à-dire inférieure au taux de croissance démographique (2,8 %) et très inférieure au taux de 7 % qui serait nécessaire pour réduire de moitié d'ici 2015 le nombre d'Africains vivant dans la pauvreté.
55. La pauvreté demeure répandue et profonde. A l'opposé de ce qui se passe dans les autres continents, le nombre d'Africains qui essaient de subsister avec moins d'un dollar par jour est passé de 217 millions en 1987 à 302 millions en 1998, soit 52 % de la population. En Afrique, le revenu moyen des pauvres n'est que de 83 cents (83 centièmes d'un dollar) par personne et par jour. En outre, l'Afrique a la pire répartition du revenu dans le monde, avec un coefficient de Gini de 51 %.
56. Si les tendances actuelles persistent, l'objectif de réduire la pauvreté de moitié d'ici 2015 ne sera pas atteint. Selon les scénarios de base et de croissance faible, la population de l'Afrique sub-saharienne passera de 302 millions à un chiffre compris entre 361 et 426 millions en 2015. Si elle entend réduire si peu que ce soit la pauvreté, l'Afrique doit atteindre des taux de croissance qui n'auraient pas de précédent dans son histoire récente.
57. La transformation structurelle est la clef d'une croissance durable et d'une moindre vulnérabilité des économies africaines aux chocs externes. Mais le rythme de la transformation structurelle déçoit par sa lenteur. L'Afrique est très en retard, notamment dans son développement industriel. Elle dépend encore dans une très large mesure des secteurs primaires (agriculture et minéraux).
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AMELIORER LA PERFORMANCE MACRO-ECONOMIQUE
58. L'Afrique a besoin de devenir compétitive. Il lui faut des politiques macro-économiques efficaces et durables qui soient en mesure de surmonter les faiblesses structurelles de ses économies, de tirer parti de ses avantages comparatifs et de donner une priorité absolue à la réduction de la pauvreté.
59. Le Pacte reconnaît que la stabilité macro-économique et le développement économique durable sont le fondement de la réduction de la pauvreté. Plusieurs facteurs peuvent contribuer à une croissance économique durable. On s'accorde désormais largement à reconnaître que les cinq caractères ci-après d'une économie sont essentiels à cet égard :
une politique macro-économique saine;
une population en bonne santé et de bon niveau éducatif;
une économie à structure diversifiée;
une faible dépendance de l'extérieur;
une économie à faibles coûts de transaction.
60. En outre, les pays africains ont besoin de mobiliser davantage de ressources, tant internes qu'externes. Le reste de la présente section est consacré à exposer les défis à relever dans chacun de ces domaines.
Une politique macro-économique saine
61. Une politique macro-économique saine est cruciale pour assurer durablement des taux élevés de croissance par habitant, parce qu'elle augmente les taux nationaux d'épargne et d'investissement et réduit les taux d'inflation. Contrairement à des mythes généralement acceptés, cette politique de croissance est bonne pour les pauvres parce qu'elle élève leur revenu, par exemple en diminuant le taux d'inflation.
62. En Afrique, les politiques économiques traditionnelles n'ont généralement pas favorisé l'investissement et la croissance. Malgré deux décennies d'ajustement, la mauvaise gestion et les distorsions économiques ont laissé un héritage. Certains groupes influents continuent de tirer profit de politiques économiques faussées.
63. Les mesures que doivent prendre les gouvernements africains visent avant tout à maintenir une politique macro-économique saine, à combiner la détermination de réduire la pauvreté avec les objectifs internationaux de développement et les principes fondamentaux de la macro-économie.
Une population en bonne santé et de bon niveau éducatif
64. Une population saine et de bon niveau éducatif est indispensable à la croissance et à la réduction de la pauvreté. La santé et l'éducation peuvent seules arracher à leur situation défavorisée ceux qui s'enlisent dans la pauvreté. Chez les pauvres, le capital humain est souvent de qualité médiocre, avec un chef de famille illettré. Du fait de la pauvreté et de l'analphabétisme, la famille n'a qu'un accès limité aux centres sanitaires et aux écoles. La famille pauvre compense la médiocre qualité du capital humain et les taux élevés de mortalité par un plus grand nombre d'enfants. Dans ces familles nombreuses, les filles ont des chances plus faibles de recevoir une éducation que les garçons, et elles auront à leur tour des familles nombreuses qui leur interdisent d'échapper au piège de la pauvreté. A moins que ce cycle ne soit brisé, les perspectives de croissance économique et de réduction de la pauvreté sont faibles.
65. Les mesures spécifiques permettant de résoudre ce problème sont exposées plus en détail au Chapitre II, dans les sections consacrées au VIH/sida, à la santé publique et à l'éducation.
Une économie à structure diversifiée
66. Il importe d'avoir une économie à structure diversifiée parce qu'elle produira des revenus plus élevés et sera mieux à même de résister aux chocs externes, tels que sécheresses, inondations et modifications des termes de l'échange. De plus, en Afrique, la majorité des pauvres sont prisonniers d'une agriculture à petite échelle, qui leur donne peu de chances d'améliorer sensiblement leur condition. Les chances d'échapper à la pauvreté augmentent à mesure que la part du secteur agricole se rétrécit et que celle du secteur manufacturier augmente. La diversification structurelle s'accompagne de plus hautes capacités technologiques, avec la fabrication de produits à valeur ajoutée plus élevée.
67. L'objectif de la diversification structurelle exige des gouvernements africains qu'ils mettent en oeuvre des stratégies de croissance équilibrées. De manière générale, l'Afrique se caractérise par une forte interdépendance sectorielle entre agriculture et industrie, d'où il résulte que la stratégie la plus efficace de croissance durable consiste à rechercher une croissance portant sur l'ensemble de l'économie. Afin d'atteindre l'objectif d'une croissance équilibrée et de l'industrialisation, l'Afrique a besoin de réaliser des taux de croissance par habitant de 4,1 % dans l'agriculture et de 3,0 % dans l'industrie.
68. Il faut que les gouvernements africains élaborent et appliquent des stratégies dans les secteurs suivants : agriculture, industrie, industries extractives et pétrole, services. Ceci suppose, d'autre part, des stratégies visant à abaisser les coûts de transaction, accroître la rentabilité et réduire les risques courus par les investisseurs, enfin à promouvoir l'intégration économique régionale.
69. L'industrialisation basée sur les ressources est prioritaire : il faut prendre des mesures pour développer les industries correspondant aux avantages comparatifs de l'Afrique, mais qui se distinguent par une valeur ajoutée plus haute, une productivité en croissance plus rapide et une élasticité de la demande mondiale plus grande que les exportations africaines traditionnelles de matières premières.
70. L'agriculture et le développement rural sont essentiels à la réduction de la pauvreté : il faut venir à bout des goulets d'étranglement au niveau infrastructurel, patronner la recherche dans les nouvelles technologies agricoles et environnementales, et maintenir les politiques de commercialisation appropriées.
Une faible dépendance de l'extérieur
71. Une économie faiblement dépendante de l'extérieur a une meilleure chance d'accéder à la croissance durable parce que le coût du service de dettes extérieures élevées peut s'avérer débilitant. Un lourd fardeau de la dette absorbe les ressources dont le gouvernement a besoin pour fournir aux pauvres des services essentiels et pour édifier l'infrastructure nécessaire à une activité économique efficiente. Les mesures visant à réduire la dépendance de l'extérieur sont donc de la plus haute priorité.
72. A cet égard, nous pouvons mettre l'accent sur deux séries de mesures. La première vise à rechercher un allégement accéléré de la dette au titre de l'Initiative pour les pays pauvres lourdement endettés (HIPC). La plupart des pays africains lourdement endettés sont déjà engagés dans ce processus. Cependant, il peut s'avérer difficile de concilier les conditions d'une macro-économie saine, telles qu'imposées par les institutions de Bretton Woods, et la réduction de la pauvreté. Un partenariat international évolué s'impose pour faire face à ce défi et résoudre le conflit d'intérêts qui se situe actuellement au coeur de la coopération internationale pour le développement.
73. La deuxième série de mesures qui s'impose aux gouvernements africains est d'éviter de souscrire des prêts qui risqueraient d'engendrer de nouveaux fardeaux de la dette. Toute assistance acceptée, si elle ne s'assortit pas de la capacité réaliste d'assurer les rendements escomptés, n'aura d'autre effet que de créer une dette additionnelle à laquelle ne répondent pas des avoirs égaux ou supérieurs, mettant ainsi en route une fois de plus le cycle de l'endettement.
Une économie à faibles coûts de transaction
74. De faibles coûts de transaction sont essentiels pour qu'une économie de marché fonctionne avec efficacité. Des services publics (électricité, eau) fonctionnant mal et de coût élevé, ainsi qu'une infrastructure (routes, voies ferrées, ports et aéroports) de mauvaise qualité, ont l'effet d'une taxe sur l'esprit d'entreprise, ralentissant ainsi la croissance économique. Des procédures bureaucratiques lentes et imprévisibles, quand elles entravent l'obtention de patentes et d'autres documents nécessaires, et la corruption constituent également une forme de taxe sur le secteur privé. Les entreprises tant nationales qu'internationales sont attirées par les pays où les coûts de transaction sont faibles, ce qui a pour effet de marginaliser encore davantage les pays africains. Le bon fonctionnement du système financier est non moins essentiel au développement, car il réduit le coût de l'argent pour les investisseurs nationaux et internationaux.
75. Pour surmonter cet obstacle, il faut agir selon trois axes distincts. Premièrement, la modernisation de l'infrastructure s'impose, ce qui recouvre notamment une intégration régionale plus poussée. Les tâches spécifiques sont exposées en détail au Chapitre II, dans les sections sur les technologies de l'information et communication, l'infrastructure et l'intégration régionale. Deuxièmement, la gouvernance doit être améliorée, comme on l'a indiqué plus haut. Troisièmement, il faut offrir de meilleurs services financiers : créer des systèmes financiers internes, en particulier des réseaux de micro-crédit à l'intention des pauvres; et offrir des incitations fiscales, des garanties de l'investissement, et une assurance pour l'investissement étranger direct, y compris celui en provenance d'autres pays africains.
Une mobilisation des ressources nationales
76. La mobilisation efficace des ressources nationales est une condition préalable essentielle de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté. Si l'Afrique entend atteindre l'objectif de réduire de moitié le nombre des pauvres d'ici 2015, il lui faut réaliser une croissance par habitant de 4,4 % par an - soit un taux brut annuel de 7 % environ. Bien que cet objectif soit presque certainement impossible à atteindre, il nous permet de centrer l'attention sur la nature et la portée des mesures nécessaires pour réduire sensiblement la pauvreté sur le continent. Comment y parviendra-t-on ?
77. Le premier impératif est de promouvoir l'investissement. L'Afrique a besoin d'un investissement sensiblement plus important pour atteindre les objectifs de réduire de moitié le nombre des pauvres, de se doter de structures pleinement développées, et d'équilibrer la croissance et l'industrialisation. Des taux d'investissement équivalents à 33 % du PIB (40 % pour l'Afrique subsaharienne) sont nécessaires pour atteindre les objectifs internationaux du développement, et de 32 % (39 % pour l'Afrique subsaharienne), pour réaliser une croissance sectorielle équilibrée et l'industrialisation. Il est donc nécessaire de créer un environnement propice à l'investissement. Ceci englobe des mesures d'ordre institutionnel, juridique, infrastructurel et financier. Au niveau national, il est essentiel d'inspirer confiance dans la viabilité à long terme de politiques macro-économiques appropriées et d'assurer une gestion économique et une gouvernance efficaces. Un autre préalable, s'agissant de mobiliser l'investissement interne et d'attirer l'IED, est de moderniser l'infrastructure de manière à permettre l'exploitation des secteurs économiques qui comportent un avantage comparatif.
78. Un problème majeur consiste à mettre en place des systèmes financiers fonctionnant bien et diversifiés, en accord avec les traditions juridiques et culturelles du pays concerné, ainsi que la capacité d'une réglementation adéquate, qui réponde aux besoins multiples en services financiers; il sera ainsi possible, simultanément, de mobiliser les réserves d'épargne intérieure encore dormantes et de fournir aux chefs d'entreprise des moyens de financement immédiatement disponibles. L'élaboration des modalités appropriées d'assurance, y compris le partenariat entre secteur public et secteur privé, et la réassurance, qui peut limiter au minimum les risques courus par les entreprises de toute dimension, présentent un intérêt particulier à cet égard.
79. Ici intervient le problème de combler le déficit de l'épargne. L'épargne intérieure des pays africains est actuellement beaucoup trop faible pour soutenir l'investissement et la croissance aux niveaux qui permettraient de réduire la pauvreté. En Afrique, l'investissement interne (moyenne pondérée) est tombé au cours des dernières décennies de 25 % du PIB (1974-1980) à 19 % (1991-1996), et de 22 % à 17 % en Afrique subsaharienne. Durant la même période, l'épargne intérieure est tombée de 15 % du PIB à 10,5 % (de 13 % à 9,5 % en Afrique subsaharienne, exception faite de l'Afrique du Sud, du Nigéria et du Gabon). L'écart entre l'épargne et l'investissement est de 8 % environ (1991-1998). L'épargne intérieure a baissé le plus dans les pays les plus pauvres et l'écart épargne-investissement ne s'est amoindri que dans les pays dont la performance est la meilleure. Ces faibles niveaux d'épargne s'expliquent en premier lieu par le montant faible, et souvent en baisse, du revenu réel.
80. Comme le taux d'épargne (moyenne pondérée) est d'environ 15 % en Afrique en comprenant les pays qui réalisent la meilleure performance, il reste donc environ 18 % du PIB (25-29 % en Afrique subsaharienne) à couvrir au moyen de ressources externes. Il subsiste ainsi un déficit résiduel de financement du développement égal à environ 9 % du PIB (13-17 % en Afrique subsaharienne) qui doit être couvert chaque année avec des flux moyens d'APD d'un montant égal à environ 9 % du PIB (12 % en Afrique subsaharienne).
81. Pour faire disparaître l'écart épargne-investissement, il est nécessaire d'adopter une série de mesures, dont certaines viseraient à arrêter la fuite des capitaux et feraient revenir dans les pays africains l'épargne placée à l'étranger. Ces objectifs supposent à leur tour des réformes permettant d'accroître la rentabilité de l'investissement interne et de limiter les risques. Dans l'intervalle, les gouvernements peuvent étudier les possibilités de créer des caisses de pension et autres mécanismes permettant de mobiliser l'épargne des ménages.
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CHAPITRE II
DOMAINES CLÉS D'UNE ACTION CONJOINTE DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ET DE L'AFRIQUE
82. Le Pacte pour le redressement de l'Afrique se préoccupe des nécessités pressantes d'aujourd'hui. Il vise à faire face aux problèmes urgents de la survie et à surmonter les obstacles qui s'opposent au développement économique de l'Afrique. Le présent chapitre s'occupe des problèmes communs au continent tout entier, qui appellent des mesures à appliquer dans tous les pays. Quatre principaux problèmes sont identifiés :
Vaincre la pandémie du VIH/sida : une question de survie.
Améliorer la qualité des ressources humaines, en améliorant la santé et l'éducation de base.
Améliorer la compétitivité de l'Afrique, en utilisant les technologies de l'information et de la communication (ICT), l'investissement dans les capacités de recherche et le développement infrastructurel.
Promouvoir la coopération régionale.
83. Un agenda hardi de développement en faveur des pauvres suppose que ces problèmes soient affrontés sans détour dans toute l'Afrique. Un thème commun se retrouve tout au long de ces sections : l'importance de créer des biens publics régionaux. Notamment dans les domaines de la science, de la technologie, de l'infrastructure, de la gouvernance régionale, les biens publics régionaux représentent une contribution critique aux perspectives de réduction de la pauvreté.
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VAINCRE LA PANDEMIE DU VIH/SIDA
84. Quelle est la nature du problème ? L'échelle de la pandémie du VIH/sida est terrifiante. Elle menace non seulement la vie de dizaines de millions d'Africains, mais la viabilité économique et politique même de nombreux Etats du continent. C'est le problème numéro un de survie de l'Afrique. Sans un effort efficace pour vaincre le VIH/sida, tous les progrès de l'Afrique sur le plan du développement et de la gouvernance seront reperdus. Dans les pays gravement touchés, la pandémie réduit la croissance d'un point de pourcentage ou plus chaque année. Actuellement, les ressources nécessaires pour élargir les programmes d'éducation et de prévention, pour moderniser les services de santé, pour fournir soins et traitements aux malades atteints du VIH/sida et pour atténuer l'impact économique de la pandémie sur les secteurs clés tels que l'éducation représenteront de 5 à 10 milliards de dollars par an. Ce chiffre se situe bien au-delà de la capacité de l'Afrique en matière de mobilisation de ressources. Mais, sans cet effort, les perspectives d'avenir de l'Afrique sont fort sombres.
85. De plus, le VIH/sida ne respecte aucune frontière. La pandémie sera vaincue au niveau régional ou ne le sera pas. Rien que pour cette raison, un partenariat régional et une action collective sont absolument essentiels.
86. Que doivent faire les gouvernements africains ? Il faut considérer la lutte contre le VIH/sida comme une priorité nationale qui appelle une direction au plus haut niveau. Les mesures de lutte recommandées sont notamment les suivantes :
a) Impulsion donnée par des conseils nationaux du sida, conduits par les dirigeants politiques du pays au plus haut niveau, afin d'assurer une ligne cohérente au sein de toutes les institutions gouvernementales et de mobiliser des campagnes nationales exhortant tous les secteurs du gouvernement et de la société à lutter contre la diffusion du VIH/sida..
b) Mobilisation des ressources. Les dépenses exigées par la lutte conte le VIH/sida doivent recevoir un rang de priorité et il faut faire appel aux gouvernements, à la société civile, aux entreprises et autres sources de financement.
c) Intervention déterminante des malades atteints du VIH/sida dans tous les aspects de la politique et de la programmation.
d) Lutte contre l'opprobre, le refus de la réalité et la discrimination par des mesures légales (chaque fois que nécessaire), l'éducation du public et les initiatives des dirigeants.
e) Intervention des chefs religieux, du monde des affaires, des syndicats et de la société civile à tous les niveaux.
f) Prise de contact avec les jeunes, scolarisés et non scolarisés, dans un effort pour modifier leurs comportements et les faire participer à la planification et à l'exécution des programmes de lutte contre le VIH/sida.
87. Le " Consensus et Plan d'action africains " de FAD 2000 visant à vaincre la pandémie du VIH/sida présente un plan plus détaillé qui doit servir à guider l'action pratique.
88. Que doivent faire les partenaires internationaux ? Il faut que les partenaires internationaux de l'Afrique concluent un partenariat global à long terme avec les gouvernements africains, la société civile, les organisations internationales et les sociétés pharmaceutiques dans le but de combattre le VIH/sida.
a) Fournir des subventions et non des prêts pour traiter les malades du sida en utilisant la thérapie anti-rétrovirale très active (HAART). Il n'est pas logique de fournir sous forme de prêts les traitements médicaux essentiels.
b) Faciliter l'accès aux produits pharmaceutiques génériques. Le droit commercial international autorise des mesures visant à tourner dans certains cas l'obligation stricte de respecter les droits conférés par un brevet. En vertu du régime de " brevet forcé ", un gouvernement peut faire face à une situation d'urgence en autorisant l'utilisation d'un brevet essentiel dans les limites du pays, aux conditions fixées par le gouvernement. En outre, l'accord de brevet forcé peut être revu par l'OMC. Les partenaires de l'Afrique pour le développement devraient soutenir activement la production de produits pharmaceutiques génériques à bon marché.
c) Travailler avec les sociétés pharmaceutiques à réduire le coût des médicaments brevetés. Il faudrait envisager des mesures telles que des exemptions fiscales au bénéfice des sociétés qui vendent aux pays africains à des prix abordables.
d) Financer la recherche sur des vaccins propres à soigner les types de VIH les plus répandus en Afrique.
e) Fournir un soutien à la mise en place de capacités afin de concevoir et de gérer des programmes de prévention et de traitement du VIH/sida. Un programme efficace de lutte contre le VIH/sida ne peut réussir que si les services de santé publique sont en état de fonctionnement.
89. Pour compléter les mesures susmentionnées, il existe un agenda régional de recherche, au niveau tant des laboratoires (créer des vaccins et des médicaments anti-rétroviraux améliorés, etc.) que de la définition des politiques (identifier les meilleures pratiques et en tirer les enseignements, édifier des coalitions transnationales). Ce sont là les biens publics régionaux qui bénéficient de partenariats aussi bien internationaux qu'intra-africains.
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FOURNIR LES SERVICES DE SANTE DE BASE
90. Quelle est la nature du problème ? L'Afrique souffre d'un large éventail de maladies infectieuses et parasitaires qu'il est possible de prévenir. On évalue à un chiffre compris entre 1 et 1,5 million le nombre de victimes de la tuberculose et du paludisme chaque année. La rougeole et les infections hydriques prélèvent un lourd tribut sur les enfants africains. Ces maladies non seulement causent des souffrances humaines, mais aussi contribuent à l'appauvrissement, du fait de la perte de capital humain, d'une moindre productivité de la main d'oeuvre, et du détournement de ressources humaines et financières nécessité par les soins et le traitement de ces maladies. D'autre part, la plupart des pays africains ne peuvent simplement pas se permettre les services de santé nécessaires. Les dépenses sanitaires atteignent rarement 4 % du PNB et descendent souvent aussi bas que 1 % - taux extrêmement insuffisant pour les besoins. Le montant moyen des dépenses publiques de santé est peut-être de 10 dollars par personne et par an, les individus touchés et leurs familles versant un montant comparable. Les évaluations réalistes du coût des soins de santé minimaux sont de l'ordre de 45 à 60 dollars par an (contre 2000 dollars ou davantage dans les pays à revenu élevé). Un agenda de développement favorable aux pauvres doit prendre au sérieux cet écart de financement.
91. Que doivent faire les gouvernements africains ? Un relèvement efficace des prestations sanitaires n'est possible qu'en réformant les politiques sectorielles et en améliorant les systèmes de prestation des services publics (c'est-à-dire grâce à une bonne gouvernance), et dans le contexte d'une amélioration de la performance économique. Cependant les gouvernements africains devraienbt aussi adopter le principe de donner priorité aux services de santé publique de base. En outre, il convient d'adopter des objectifs spécifiques pour la tuberculose et le paludisme :
a) Tuberculose : l'initiative de l'OMS, " Arrêter la tuberculose ", demande une réduction de 50 % d'ici 2010 des taux de mortalité et de prévalence, avec des objectifs intermédiaires qui consistent a diagnostiquer la condition de 70 % des sujets atteints d'une tuberculose infectieuse et à soigner 85 % d'entre eux d'ici 2005, et à lancer d'ici novembre 2001 des plans quinquennaux de lutte contre la tuberculose dans les pays gravement touches.
b) Paludisme: le plan de l'OMS, " Faire reculer le paludisme ", demande une reduction de 50% d'ici 2010 dans les maladies associées au paludisme avec des domains prioritaires centrés sur un diagnostic rapide et un traitement efficace, la prevention grace a des moustiquaires imprégnées d'insecticide, la prévention et le traitement du paludisme chez les femmes enceintes, etc.
92. Que doivent faire les partenaires internationaux ? Les évaluations d'ensemble indiquent qu'il existe un déficit de 25 à 40 dollars par personne et par an dans le secteur de la santé publique de base pour les pays à faible revenu. Il en résulte qu'un montant de 10 à 16 milliards de dollar par an serait nécessaire pour couvrir les besoins des pays et des communautés à faible revenu en Afrique, ce qui représente à peu près dix fois plus que les montants de l'aide actuelle.
a) Poser le principe qu'un partenariat international devrait soutenir les services sanitaires essentiels et que ce financement devrait être exempt de toute conditionnalité non liée à la prestation efficace des soins de santé publique.
b) Fournir un appui financier aux services de santé et aux programmes de santé publique, y compris l'éducation sanitaire, les programmes destinés à vaincre la tuberculose, à faire reculer le paludisme, à vacciner contre la rougeole, etc.
93. Quant au VIH/sida, il existe un agenda régional de coopération et de partenariat axé sur la recherche médicale, l'identification des politiques nationales, et les enseignements communs à tirer. Les maladies infectieuses seront vaincues au niveau régional ou pas du tout.
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INVESTIR DANS LA POPULATION :
ACCROITRE LES RESSOURCES AFFECTEES A L'EDUCATION
94. Quelle est la nature du problème ? Les systèmes d'éducation africains sont en crise. La dernière décennie n'a pas marqué de progrès significatif sur le plan des niveaux d'alphabétisation et d'éducation. Sans une population mieux instruite, l'Afrique ne réussira pas à échapper à la pauvreté, à surmonter le VIH/sida, ni à accéder à la démocratie et à la bonne gouvernance.
95. Que doivent faire les gouvernements africains ? De nombreux pays africains ont fait de grands efforts pour offrir un enseignement primaire universel. Ces efforts doivent être poursuivis et d'autres pays doivent les imiter.
a) Il faut donner un rang prioritaire dans les budgets nationaux aux ressources destinées à l'enseignement primaire et secondaire, à l'alphabétisation des adultes et à la formation des enseignants. Il faut aussi rationaliser et renforcer les réseaux de prestation des services publics pour garantir que les allocations sectorielles seront utilisées aux fins prévues.
b) Il faut s'efforcer en particulier d'éliminer l'écart entre les sexes dans l'éducation, en cherchant à scolariser les fillettes.
96. Que doivent faire les partenaires internationaux ? Les partenaires internationaux de l'Afrique doivent conclure un partenariat d'ensemble à long terme avec les gouvernements africains, la société civile, les organisations internationales et les sociétés pharmaceutiques dans le but d'assurer un enseignement primaire universel et gratuit. Cela suppose les mesures ci-après :
a) Accroître les engagements de dépenses pour l'éducation. Selon les évaluations de l'UNICEF, les coûts de l'introduction de l'enseignement primaire universel en Afrique s'élèveraient à 2 milliards de dollars par an, à quoi s'ajoutent les coûts de la construction de nouvelles écoles et du relèvement de la qualité de l'enseignement. L'enseignement secondaire universel coûterait en outre 5 à 10 milliards de dollars par an.
b) Etablir le principe qu'un partenariat international devrait soutenir la fourniture de l'enseignement élémentaire et que ce financement devrait être exempt de toute conditionnalité non liée à la prestation efficace de la fourniture de l'éducation.
c) Chercher à mobiliser une vaste coalition formée de gouvernements, de la société civile et de partenaires internationaux dans le but de faire en sorte que la gratuité de l'enseignement primaire soit assurée à tous.
d) Soutenir l'enseignement tertiaire et la recherche. Ceci va du renforcement de l'appui aux collèges techniques et professionnels spécialisés (instituts de formation pédagogique, écoles d'infirmières, cours d'ICT) à la rénovation des universités et instituts de recherche scientifique les plus importants d'Afrique.
97. L'éducation est un bien public régional. Cette observation s'applique en particulier à l'enseignement supérieur et à la recherche, étant donné l'importance des activités de recherche technique, scientifique et de définition des politiques pour tous les pays du continent. Mais même une alphabétisation de base et l'enseignement primaire comportent des bénéfices au niveau régional du fait de la mobilité de la main d'oeuvre.
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OFFRIR L'ICT ET RETRECIR LE FOSSE NUMERIQUE
98. Quelle est la nature du problème ? Au XXIe siècle, la richesse sera créée à partir d'une transmission et d'une utilisation efficaces de l'information. La technologie de l'information et de la communication (ICT) est le moyen de mobiliser ce potentiel. Mais si l'Afrique est marginalisée dans l'économie mondiale, elle est hyper-marginalisée dans l'économie de l'information mondiale.
99. Un fossé numérique est apparu entre les pays et à l'intérieur des pays sur le plan de l'accès à l'ICT et de son utilisation, y compris Internet et la communication en large bande. Le fossé numérique à l'intérieur des pays se traduit par les obstacles substantiels à la participation des pauvres et des marginalisés à la révolution ICT dans les pays africains. Le fossé numérique entre les pays se traduit par le fait que les pays en développement ne partagent que 4,6 % du total mondial des sites Internet, tandis qu'ils groupent 85 % de la population mondiale.
100. Que doivent faire les gouvernements africains ? Ils doivent prendre une série d'importantes mesures, à savoir :
a) Faciliter la mise en place des infrastructures ICT nécessaires :
Mettre au point des plans et stratégies concernant l'infrastructure nationale d'information et communication dans le but de réduire les coûts de l'utilisateur final.
Moderniser et développer l'infrastructure et les réseaux de télécommunications aux niveaux national et régional.
Soutenir les initiatives continentales ICT, telles que SCAN-ICT, qui renforcent la capacité africaine d'influer sur les investissements ICT et d'élargir leur impact.
b) Etablir des systèmes juridiques et régulateurs efficaces :
Créer des institutions régulatrices indépendantes.
Approfondir le processus de libéralisation et de privatisation dans le secteur des télécommunications.
Soutenir les réseaux de régulateurs aux niveaux sous-régional et continental; ouvrir des marchés transfrontières et d'échelle continentale qui puissent attirer l'investissement privé; faciliter les activités de réseaux d'experts ICT sur la gouvernance d'Internet et soutenir le Centre africain d'information sur les réseaux.
c) Utiliser l'ICT dans des secteurs spécifiques :
Cibler la jeunesse et soutenir l'éducation. Cela peut comprendre : des initiatives portant sur les écoles et l'enseignement tertiaire (initiatives SchoolNet et VarsityNet); des programmes du réseau pour la jeunesse non scolarisée (OosyNet); et l'utilisation des compétences acquises dans la diaspora.
Dans le secteur des soins de santé : création de réseaux de professionnels de la santé, élaboration de bases de données et ouverture de sites Web concernant la santé, mise au point de projets de médecine à distance, création de systèmes d'information multimédiatique et de sites d'échanges basés sur le Web concernant l'éducation sanitaire.
101. Que doivent faire les partenaires internationaux ? Une action internationale s'impose pour étendre les réseaux ICT aux pays africains et offrir un plus large accès à l'ICT à l'intérieur des pays africains. Les mesures à prendre consistent à :
a) Promouvoir les initiatives existantes et de nouvelles initiatives en matière d'ICT:
Développer l'initiative Dotforce lancée par le G-8 à Okinawa et patronnée par la Banque mondiale, le Global Development Network et l'Université africaine virtuelle.
Soutenir les initiatives novatrices, par exemple les bibliothèques numériques d'études africaines dans les bibliothèques européennes et américaines, accessibles aux universités africaines.
Forger des mécanismes de partenariat comme le Partenariat pour les technologies de l'information et de la communication en Afrique (PICTA) et le Global Knowledge Partenership (GKP).
b) Soutenir les infrastructures et capacités :
Financer l'investissement dans l'équipement et le logiciel.
Appuyer la formation du personnel aux fins de planifier, élaborer et gérer des applications Internet.
Aider les pays africains à créer des circuits principaux aux niveaux national et régional et à mettre en place des institutions régulatrices.
102. La technologie de l'information et de la communication (ICT) est un excellent exemple du " cercle vertueux " de la coopération et de l'intégration régionales. Les grands investissements d'ICT s'avèrent le plus rentables au niveau régional, tandis que l'utilisation de l'ICT facilite l'intégration économique régionale.
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RENFORCER LES CAPACITES DE RECHERCHE
103. Quelle est la nature du problème ? L'Afrique a d'énormes besoins en matière de recherche, mais ses institutions de recherche, universités et bureaux de planification sont très insuffisants sur ce point.
104. Avant tout, beaucoup des problèmes les plus urgents qu'affronte l'Afrique concernant l'agriculture, la gestion de l'environnement et la santé exigent des recherches scientifiques. Ils représentent des obstacles majeurs à la compétitivité de l'Afrique.
105. L'Afrique demeure principalement consommatrice de technologies, idées, plans et stratégies produits ailleurs. C'est là un obstacle majeur à un développement qui serait inspiré par l'Afrique elle-même. Les régions à faible revenu ou à revenu intermédiaire - y compris l'ex-Union soviétique - groupent environ 84 % de la population mondiale et 42 % du PIB des pays du monde entier, mais ne représentent que 13 % de ses publications scientifiques et pas plus d'un pour cent du nombre total des brevets européens et américains. L'Afrique est la plus mal partagée de toutes ces régions : elle est pratiquement invisible sur une carte mondiale de la recherche. Même en ce qui concerne les études africaines, les principaux centres de recherche et les grandes conférences se situent hors du continent africain.
106. Dans le domaine des politiques nationales, beaucoup trop de temps et de ressources humaines est consacré à s'occuper de l'assistance de la communauté internationale : négociations avec les donateurs, longues réflexions sur les plans des donateurs, rédaction et présentation de rapports sur les programmes financés par les donateurs. Les idées et plans de haute qualité provenant d'Afrique - surtout ceux qui ont un caractère novateur - n'ont qu'une faible chance d'être correctement débattus, perfectionnés et mis en oeuvre.
107. Que faut-il faire ? On peut identifier plusieurs domaines clés ouverts à la recherche, à la planification, au suivi et à l'évaluation, à mener en commun par l'Afrique et la communauté internationale :
a) Promouvoir la recherche scientifique visant à trouver des solutions à certains des problèmes les plus urgents de l'Afrique.
La recherche agricole est un domaine prioritaire. Il y a un besoin urgent de mettre au point des types de cultures améliorées (rendement plus élevé, résistance accrue à la sécheresse, valeur nutritive supérieure), de meilleures technologies (récupération et utilisation de l'eau, culture d'espèces différentes en lignes alternées) et d'améliorer la productivité du bétail.
Il faut conduire des recherches médicales et sur la santé publique. Ceci inclut la mise au point de vaccins contre le VIH/sida et la tuberculose, des mesures médicales et environnementales destinées à faire reculer le paludisme et d'autres maladies infectieuses transmises par les insectes, et des techniques à bas prix d'approvisionnement en eau et d'assainissement.
La science de l'environnement est d'importance vitale s'agissant d'améliorer la gestion des ressources naturelles et d'enrayer la dégradation de l'environnement.
b) Créer des institutions et des réseaux de recherche.
Les partenaires internationaux doivent chercher des moyens novateurs de financer la recherche et le développement de technologies qui soient appropriées aux problèmes de l'Afrique, cela au moyen de subventions à la R&D, de fonds spéciaux, d'avoirs fiscaux, etc.
Il faut s'efforcer en commun d'accroître la capacité à long terme de recherche scientifique dans l'enseignement supérieur et les institutions spécialisées de l'Afrique. Il faut encourager l'éventail de recherches le plus large possible dans le but de dégager des idées nouvelles et d'atteindre un volume critique de connaissances spécialisées.
Le respect de la liberté des universitaires est indispensable si l'on entend garder dans le pays des chercheurs qualifiés. Les gouvernements africains doivent respecter l'autonomie des institutions d'enseignement supérieur et la liberté de recherche, d'expression et d'association des universitaires et des chercheurs.
Promouvoir la constitution de réseaux universitaires et la tenue de conférences en Afrique même. Il y a beaucoup d'initiatives sous-régionales de collaboration aux fins de la recherche, mais on doit regretter l'absence d'un réseau ou d'une conférence d'études africaines au niveau continental, qui réunirait les chercheurs africains et autres travaillant sur l'Afrique.
c) Promouvoir la recherche et les partenariats en matière de définition des politiques nationales.
Renforcer la capacité nationale de concevoir et d'appliquer les stratégies nationales de réduction de la pauvreté. Le contrôle par les Africains eux-mêmes des politiques et programmes nationaux de base suppose que les stratégies nationales visant à atteindre les objectifs internationaux de développement doivent être conçues, planifiées et évaluées par des Africains. Ceci suppose des centres de recherche solides et indépendants.
Susciter de nouveaux mécanismes de suivi et évaluation des politiques nationales et des programmes d'assistance qui illustrent les priorités internes de chaque pays. Élaborer de nouveaux mécanismes de suivi et évaluation, par exemple des audits sociaux et écologiques indépendants des politiques et programmes.
d). Encourager les initiatives communes de recherche et d'éducation intra-africaines.
Soutenir les centres d'excellence régionaux qui existent dans la recherche scientifique, technique et concernant la définition des politiques.
Collaborer et constituer des réseaux au niveau de l'enseignement supérieur et des institutions de recherche, afin d'assurer la spécialisation et des économies d'échelle.
Harmoniser les diplômes délivrés afin d'accroître la mobilité de la main d'oeuvre.
108. Les résultats de la recherche sont l'exemple numéro un d'un bien public régional. Les produits de la recherche scientifique, technique et concernant la définition des politiques, même dus à un seul pays africain, présentent un très grand intérêt pour les autres. Tous sont certains d'en tirer profit. Mais il est nécessaire à cette fin de concentrer les connaissances spécialisées et (dans le cas de la recherche scientifique) l'équipement de spécialistes, résultat que la mise en commun des ressources régionales permettra le mieux d'atteindre.
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AMELIORER L'INFRASTRUCTURE CLE
109. Quelle est la nature du problème ? L'infrastructure " dure " - télécommunications, électricité, transport, eau et assainissement - est essentielle à la croissance économique. Mais l'Afrique est en retard dans ces domaines. Les grandes distances et la faible densité démographique s'ajoutent à la multiplicité des frontières nationales pour créer d'énormes obstacles à la mise en place de l'infrastructure nécessaire. En 1997, l'Afrique, non comprise l'Afrique du Sud, comptait 171 000 kilomètres de routes pavées, c'est-à-dire moins que la Pologne. Hors l'Afrique du Sud, le continent ne dispose que de 5 millions de téléphones et la plupart des Africains vivent à deux heures du téléphone le plus proche. On évalue à 18 milliards de dollars par an le montant des investissements nécessaires dans l'infrastructure. Mais il faut aussi que l'infrastructure soit mieux gérée pour que l'investissement ainsi accru s'avère rentable : le continent est rempli de routes semées de nids de poule, de canaux d'irrigation exposés à la salinisation, et de centraux téléphoniques hors service. La mise en commun des ressources, comme les eaux des principaux fleuves africains, peut aussi se faire plus efficacement. Ces faiblesses contribuent à expliquer les coûts élevés, la faible compétitivité, la mauvaise intégration des marchés et la lenteur de la croissance. Elles sont aussi un facteur de pauvreté et d'inégalité, surtout dans les zones rurales écartées.
110. Quelles mesures doivent prendre les gouvernements africains et les partenaires internationaux ? Il faut davantage de ressources, mais assurer une meilleure efficience de la gestion et de l'entretien est non moins important. Il sera capital de faire appel au financement du secteur privé.
a) Valoriser l'investissement.
Remettre en état les ports, les voies ferrées et les grands axes routiers.
Moderniser les réseaux d'électricité, de distribution d'eau, d'assainissement et de télécommunications en milieu urbain. L'investissement nécessaire à cette fin peut être obtenu en grande partie auprès du secteur privé.
Développer l'infrastructure rurale. Cela coûte cher et ne sera rentable économiquement qu'à long terme, de sorte que l'investissement public est ici nécessaire.
b) Améliorer les politiques et la gestion.
Chercher des moyens plus efficaces d'entretenir l'infrastructure existante.
Réglementer efficacement les projets infrastructurels du secteur privé, en tant que prélude à une libéralisation du secteur.
Mettre en place des partenariats entre secteur privé et secteur public pour l'investissement et l'entretien.
Faire participer les communautés et les usagers à la construction, à l'entretien et à la gestion.
c) Utiliser plus efficacement les ressources mises en commun.
Promouvoir l'utilisation la plus efficace possible des ressources partagées au voisinage des fleuves.
Encourager une utilisation efficiente des terres de pâturage transfrontalières en autorisant une liberté de circulation accrue des éleveurs de troupeaux.
d) Améliorer la coopération régionale.
Améliorer les réseaux de transport transfrontaliers.
Faire des investissements communs dans les systèmes de contrôle du trafic aérien afin d'assurer la sécurité des vols dans toute l'Afrique.
Mettre en commun les réseaux de distribution d'énergie afin de tirer profit des économies d'échelle et de la concentration géographique des sites potentiels de production d'hydroélectricité.
Améliorer les réseaux régionaux d'ICT et leurs liens avec les infrastructures mondiales de l'information.
Créer des " arêtes " transfrontalières d'infrastructure de haute qualité afin d'attirer l'investissement.
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RENFORCER LA COOPERATION REGIONALE
111. Les avantages de l'intégration et de la coopération régionales sont un thème commun à l'ensemble du présent chapitre. Les pandémies telles que le VIH/sida exigent une approche régionale, tandis que d'autres initiatives clés destinées à stimuler la croissance économique et à réduire la pauvreté sont considérablement facilitées par une coopération à l'échelle continentale. L'Afrique a besoin d'investir davantage dans les biens publics régionaux. Cette dernière section est centrée sur quelques-uns des supports institutionnels de cette coopération et de cette intégration.
112. Quelle est la nature du problème ? L'Afrique est le continent le plus divisé avec 165 frontières différentes, séparant 51 pays. L'Afrique souffre d'une absence marquée d'intégration économique. Les pays de faible surface et sans littoral sont ceux qui pâtissent le plus de cette fragmentation. L'expérience des autres régions du monde indique que le regroupement en blocs commerciaux régionaux est une condition préalable du développement. La création de biens publics régionaux, en particulier de technologies qui intéressent l'ensemble de la région, comme l'ICT, l'infrastructure, la recherche médicale et agricole, l'enseignement supérieur, constitue un autre atout de départ indispensable. L'Afrique a un besoin absolu des supports institutionnels de cette coopération, comme on peut le voir très clairement dans la faiblesse des structures régionales au service de la paix et de la sécurité.
113. Que doivent faire les gouvernements africains, les organisations régionales et les partenaires internationaux ? C'est là un domaine de choix pour le partenariat régional et international. Beaucoup des mesures spécifiques ont déjà été mentionnées plus haut, dans le contexte des marchés financiers, du VIH/sida, de l'ICT, de la recherche et de l'infrastructure.
114. Des instruments régionaux additionnels au service de la coopération internationale pour le développement constitueront un mécanisme utile pour garantir que les biens publics régionaux et les projets régionaux d'infrastructure recevront le rang prioritaire qui leur est dû.
115. Les supports institutionnels régionaux de la coopération sont la dernière pièce de ce puzzle. L'agenda ici présenté est de grande portée, mais il illustre un large consensus à travers toute l'Afrique que le continent doit trouver les moyens de réaliser une unité économique et politique plus poussée. Un premier pas essentiel consiste à renforcer la capacité des organisations régionales et sous-régionales existantes qui se préoccupent de la paix et de la sécurité, de la coopération et de l'intégration économiques et d'un large éventail d'activités spécialisées. Il s'agit non seulement de renforcer les capacités de ces organisations prises isolement, mais aussi, pour celles-ci, de trouver d'urgence les modalités de l'harmonisation et de la coopération.
116. L'intégration régionale ne saurait progresser exclusivement sous l'impulsion du niveau le plus élevé. Les initiatives bilatérales et sous-régionales, les activités de la société civile et du secteur privé sont autant de composantes de cet agenda. L'harmonisation régionale et sous-régionale de l'éducation, des systèmes juridiques et des régimes d'imposition sont des domaines d'activité importants, ainsi que le renforcement des liens transfrontaliers aux niveaux des gouvernements, des législatures, des organisations religieuses, des entreprises et des institutions d'enseignement.
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CHAPITRE III
UN NOUVEAU PARTENARIAT INTERNATIONAL AVEC L'AFRIQUE
117. S'il est vrai que, pour que l'avenir de l'Afrique soit plus brillant, il faut avant tout que les dirigeants du continent assurent une gestion plus efficace de leurs pays respectifs, d'autre part, l'Afrique ne peut manifestement connaître une croissance durable et réduire la pauvreté à moins d'un partenariat transformé avec la communauté internationale. Le présent chapitre énoncera les mesures spécifiques que la communauté internationale a besoin de prendre pour conclure un Pacte pour le redressement de l'Afrique.
118. La première section analyse la nature du partenariat pour l'aide, demandant ce qu'il est nécessaire de changer pour rendre ce partenariat véritablement efficace dans l'avenir. La deuxième section détaille les mesures que la communauté internationale doit prendre pour amplifier les flux de ressources à destination de l'Afrique. On trouvera sur tous ces points une étude plus détaillée dans le volume à paraître.
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POURQUOI LE PARTENARIAT INTERNATIONAL APPELLE UNE REFORME
119. Le consensus croissant de l'Afrique sur les politiques du développement ouvre la voie à une réflexion sur ses relations avec la communauté internationale en matière de coopération pour le développement. De graves problèmes existent concernant les modalités actuelles de l'assistance. Cette section est consacrée à analyser les principaux problèmes inhérents aux rapports actuels en matière d'aide. On y pose la question de savoir quels sont les plus sérieux problèmes posés par l'aide, telle qu'elle a été fournie à l'Afrique. Les enseignements tirés jettent les fondements de la transformation proposée dans les partenariats internationaux avec l'Afrique, qui se situe au coeur du Pacte pour le redressement de l'Afrique et qui est présenté au Chapitre IV.
L'aide a connu des succès ...
120. Les avocats et les praticiens de l'aide internationale au développement peuvent se référer à d'importants succès. L'un des meilleurs exemples est le Plan Marshall, après la deuxième guerre mondiale, par lequel les Etats-Unis ont fourni une assistance généreuse et efficace à la reconstruction de l'Europe, en liaison avec l'impératif politique de garder l'Europe occidentale hors de la sphère d'influence soviétique et avec l'objectif économique d'ouvrir les marchés européens aux exportations américaines. On a beaucoup escompté par la suite que ce modèle d'assistance transitoire conduisant à une croissance économique soutenue des pays bénéficiaires pourrait être reproduit dans les pays en développement. L'aide a financé d'importants succès s'agissant de créer des types améliorés de culture (technologie de la révolution verte en Asie, variétés du maïs au Kenya et au Zimbabwe). La coopération internationale a éliminé la variole dans le monde entier et la cécité des rivières dans l'Afrique de l'Ouest. L'infrastructure a été édifiée en grande partie avec les fonds de l'aide, des vies et des moyens d'existence ont été sauvés dans des communautés frappées par la famine. Et durant la dernière décennie, grâce à l'aide internationale, un nombre croissant de pays africains ont réussi à mettre en place les réformes nécessaires en matière de gouvernance et de gestion économique pour réaliser des taux de croissance respectables. Ces expériences donnent à penser qu'un partenariat international orienté vers des objectifs spécifiques - venir à bout du VIH/sida, élargir la couverture de l'enseignement, développer l'infrastructure - peut certainement atteindre ses objectifs. Les domaines prioritaires du partenariat international dans la prochaine décennie sont tracés au Chapitre II.
... mais un mécontentement mutuel s'affirme de plus en plus
121. Dans l'ensemble, néanmoins, le bilan de la coopération internationale pour le développement n'est pas à la hauteur des grands espoirs qu'elle avait suscités. On a assisté à un cycle de hautes espérances, de promesses grandioses, de réalisations incomplètes des objectifs, et de déceptions parmi les bénéficiaires. Souvent, les spécialistes internationaux ont donné des conseils inappropriés et les gouvernements africains ont été encouragés à emprunter des fonds pour des projets qui n'avaient qu'une faible chance de succès, ou sur la base de politiques économiques dont le résultat était incertain. On n'a pas prêté une attention suffisante aux conditions internes indispensables à une utilisation efficace de l'aide ou à la réforme des politiques. Et, dans certains cas, l'affrontement de la guerre froide a imposé la pratique que les gouvernements ne recevaient de fonds qu'en fonction de leur fidélité à un patron déterminé du jeu géopolitique. Trop souvent, il en est résulté que les pays africains ont accumulé des dettes qu'ils ne pouvaient payer, et une nouvelle génération d'Africains grandit accablée par les dettes que ses anciens dirigeants ont contractées. Tandis que les donateurs tendent à rejeter sur les bénéficiaires le manque de volonté politique et une mise en oeuvre médiocre des intentions, les gouvernements africains préfèrent rejeter la faute sur des conseils irréalistes, le décaissement lent et insuffisant de fonds, et un environnement économique international défavorable.
Des enseignements ont été tirés ...
122. Quatre décennies de partenariat international ont laissé derrière elles un riche capital d'enseignements. Dans le climat mondial actuel, il semble que les gouvernements africains aussi bien que leurs partenaires internationaux soient davantage prêts à examiner le bilan avec honnêteté et humilité, et à reconnaître que des réformes sont nécessaires. Ce franc dialogue constitue la base à partir de laquelle examiner la possibilité de rapports totalement nouveaux en matière d'aide.
123. Pour améliorer l'efficacité de l'aide, il faut que change le comportement tant des bénéficiaires que des prestataires de l'aide. Comme on l'a souligné au Chapitre premier, les bénéficiaires de l'aide devront se doter d'une bonne gouvernance, améliorer la gestion macro-économique et appliquer des politiques favorables aux pauvres. Il faut mettre en place les capacités nécessaires. Le contrôle par les Africains des programmes et politiques concernant l'aide n'a souvent pas été réalisé - mais il a été couronné de succès partout où il s'est manifesté. L'efficacité de tout programme ou de toute réforme d'ordre économique ou social est étroitement associée à la mesure dans laquelle des institutions et individus des pays concernés ont pris en main la recherche préalable, la mise en route, la discussion et l'exécution. Les meilleurs programmes et projets de développement sont ceux que les dirigeants du pays contrôlent le plus complètement.
124. Le continent africain est divers et il n'existe pas de potion magique ni de scénario applicable à tous les cas. Les conditions varient énormément. Certains pays sont en conflit et d'autres sortent de périodes de conflit. Il y a des pays stables et démocratiques, avec des systèmes juridiques viables et justes et des politiques économiques saines. D'autres pays s'orientent dans ce sens et ont atteint un stade plus ou moins avancé de leur marche. Et, par malheur, certains pays qui montraient de grandes promesses trahissent des signes révélateurs de rechute. Cependant, la conception des programmes et politiques a supposé trop souvent que les mêmes prescriptions seront applicables partout. L'expérience a montré que ce n'est pas le cas : l'aide doit être accordée à des conditions appropriées aux bénéficiaires. Sinon, un pays à performance médiocre peut emprunter de l'argent pour des programmes irréalisables à long terme et ne faire qu'accumuler de plus grandes dettes.
... la difficulté est de les mettre en oeuvre
125. Transformer l'aide est une tâche commune aux bénéficiaires et aux donateurs. Les tentatives de réforme passées ont produit des avantages chaque fois limités, mais elles ont eu généralement une visée trop localisée - ou n'ont été le fait que d'un seul donateur ou d'un seul secteur - pour aboutir à des avantages de grande portée. C'est pourquoi il existe maintenant un climat d'ouverture beaucoup plus grande dans la communauté des donateurs concernant une réforme de l'aide. Un nombre croissant de donateurs se montrent d'autre part disposés à essayer des approches de partenariat novatrices au niveau national. Ce dont l'Afrique et ses partenaires pour le développement ont besoin, c'est de tirer parti de l'élan qui se dessine pour s'orienter vers une transformation globale et décidée en commun du cadre des partenariats en matière de développement.
126. On a prêté beaucoup d'attention aux aspects techniques de l'aide au développement, mais le processus de la fourniture de l'aide a aussi suscité l'intérêt ces derniers temps. La plupart des partenaires internationaux inscrivent la " bonne gouvernance " des bénéficiaires au nombre des objectifs d'ordre politique, ce qui inclut la transparence et la participation des parties intéressées à la prise de décision. Mais, pour de nombreux bénéficiaires, le processus d'aide est lui-même visiblement dépourvu de ces mêmes qualités. Comment un processus d'aide peut-il promouvoir la démocratie s'il n'est pas lui-même transparent, ne requiert pas la participation des parties intéressées et s'il peut être changé ou arrêté par une seule partie, unilatéralement et sans consultation ? Même les données de base sur les flux d'assistance produites par le CAD (OCDE) ont peu d'intérêt pour les bénéficiaires aux fins de la planification. L'expérience montre que, chaque fois que le processus de prestation de l'aide est lui-même ouvert à la participation des bénéficiaires et que l'information est partagée plus librement, les perspectives de coopération pour le développement s'améliorent. Cela signifie qu'une transparence et une responsabilité accrues des partenaires internationaux de l'Afrique constitueront un facteur capital d'une meilleure efficacité de l'aide.
127. Un autre enseignement est que l'assistance à horizon de planification rapproché est imprévisible et que, si elle fait l'objet de modifications ou de perturbations unilatérales sans consultation avec les bénéficiaires, elle atteint rarement ses objectifs. Des programmes et projets marqués par des décisions d'arrêt et de reprise intermittents réalisent souvent bien peu. Cela favorise une conception cynique et à courte vue de l'aide chez les bénéficiaires qui se sentent alors peu tenus de collaborer aux résultats attendus. Des événements exceptionnels, par exemple un coup d'état militaire, exigeront toujours des réactions exceptionnelles, mais les politiques et les décaissements de l'aide sont subordonnés à un trop grand nombre d'autres influences externes d'ordre politique ou administratif. L'Afrique a besoin qu'on lui fournisse une assistance stable et à long terme.
128. Il est nécessaire d'autre part que les partenaires externes de l'Afrique assument la responsabilité de secteurs stratégiques déterminés. Tirer parti d'un avantage comparatif permettra de réduire les coûts de transaction et d'améliorer les résultats. Par exemple, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et l'Union européenne pourraient prêter plus d'attention au financement des projets régionaux d'infrastructure. Sur la base de stratégies globales de développement contrôlées par les pays, les organismes bilatéraux peuvent continuer d'affecter une plus grande part de l'assistance du pays donateur aux secteurs sociaux, où elle est généralement plus efficace, d'après certains indices, que les interventions d'institutions multilatérales. Grâce à leur interaction avec diverses organisations de la société civile, certains donateurs bilatéraux ont eu un impact particulièrement frappant avec leurs interventions dans le secteur social.
129. Recevoir de l'aide peut constituer un fardeau écrasant. L'assistance des donateurs est souvent surchargée de conditionnalités, qui imposent aux bénéficiaires de lourdes tâches bureaucratiques et engendrent l'incertitude et le cynisme. Chaque donateur peut imposer des conditionnalités différentes qui accroissent le volume de travail des bénéficiaires et peuvent même se contredire. Trop de marchés liés à l'aide imposent d'acheter des biens et services dans le pays donateur. Trop d'aides prennent la forme d'une assistance technique dont la performance passée est médiocre. Bien des conditionnalités sont influencées par des considérations politiques et il n'existe pas de critère clairement défini pour s'y conformer. Tous ces facteurs rendent problématique le succès de l'aide. L'heure est manifestement venue de s'efforcer de simplifier et harmoniser les conditionnalités de l'aide.
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ACCROITRE LES FLUX DE RESSOURCES
130. Même en admettant que des mesures efficaces soient prises dans chaque pays pour accroître l'investissement, l'Afrique connaîtra un déficit de ressources de l'ordre de 10 milliards de dollars par an si elle entend atteindre des résultats substantiels sur les plans de la réduction de la pauvreté et de la croissance économique. Les ressources additionnelles nécessaires pour venir à bout du VIH/sida sont comprises entre 5 et 10 milliards de dollars par an. Ce déficit de ressources peut être comblé par les moyens suivants : augmentation de l'aide publique au développement, annulation de la dette, investissement du secteur privé, amélioration de l'accès des produits africains aux marchés internationaux. Il est nécessaire d'agir dans chacun de ces domaines.
Il faut augmenter l'aide
131. Quelle est la situation aujourd'hui ? L'Afrique n'a pas besoin seulement d'une aide plus efficace. Elle a aussi besoin d'une aide plus abondante. Les transferts nets d'APD par habitant vers l'Afrique sont aujourd'hui inférieurs de plus d'un tiers, en termes réels, à leurs montants en 1990. Même en tenant compte de l'augmentation escomptée de l'investissement extérieur, l'Afrique affronte un déficit financier de l'ordre de 10 milliards de dollars par an.
132. Que faut-il faire ? Il importe de fournir plus d'aide à l'Afrique si cette aide peut être utilisée efficacement. L'accroissement de l'assistance internationale doit donc cibler les pays et les secteurs qui peuvent l'absorber et fournir des résultats. Sous l'égide du MAP, le Pacte pour le redressement de l'Afrique envisage une stratégie à deux axes afin d'augmenter les flux d'aide tout en garantissant aussi que ces ressources accrues seront utilisées avec efficacité.
133. Premièrement, il faut cibler les pays qui ont une capacité prouvée de bien utiliser l'aide pour promouvoir la croissance et réduire la pauvreté. Ces pays, dont la situation intérieure est stable grâce à des programmes solides, ont besoin de ressources additionnelles pour tirer parti de leurs possibilités et être en mesure de montrer à la population que les sacrifices consentis en valaient la peine. Ceci conduit au partenariat élargi qui se situe au coeur du Pacte pour le redressement de l'Afrique - thème central du Chapitre IV.
134. Deuxièmement, il faut axer l'assistance sur les domaines prioritaires pour la survie et afin de s'attaquer aux obstacles clés à la croissance de toute l'Afrique et à la réduction de la pauvreté. Vaincre le VIH/sida est une priorité de base : la pandémie représente une menace à la survie de dizaines de millions d'Africains. Fournir des services de santé et une éducation de base permet d'accroître le capital humain de l'Afrique. Investir dans l'ICT, les capacités de recherche et l'infrastructure revient à attaquer d'autres obstacles majeurs au développement de l'Afrique.
Il faut trouver une issue rapide et durable à la crise de la dette
135. Quelle est la situation aujourd'hui ? La dette de l'Afrique est totalement insoutenable. Les mesures prises jusqu'ici ne sont pas suffisantes pour offrir une solution durable et ne répondent pas à la situation propre de l'Afrique. Plus précisément :
a) Les initiatives actuelles de réduction de la dette sont trop timides et trop lentes.
b) Les options actuelles en matière d'aide financière à l'Afrique font encore trop largement appel aux prêts, ce qui comporte le risque de retomber dans l'endettement. Même les fonds de l'IDA, bien que prêtés à des taux extrêmement concessionnels doivent être remboursés, avec le risque d'un nouvel endettement si les objectifs économiques ne sont pas atteints.
c) Les pays qui émergent d'un conflit ont trop peu d'instruments financiers à leur disposition pour couvrir leurs besoins propres en matière de reconstruction.
136. Que faut-il faire ? L'Afrique a besoin d'échapper durablement au problème de la dette. Cela suppose des mesures sur plusieurs fronts.
a) La plus grande partie de la dette de l'Afrique doit être annulée sans retard. Il faut prendre des mesures pour mettre en place des mécanismes d'allégement de la dette qui aillent au-delà de l'Initiative renforcée pour les pays pauvres lourdement endettés.
b) Pour veiller à ce que les pays affranchis de leur dette ne contractent pas de nouvelles dettes non supportables, les pays ayant droit à bénéficier de l'initiative HIPC doivent pouvoir recourir plus largement au financement sous forme de dons.
c) Les partenaires ne doivent pas offrir un soutien générateur de dette aux fins de plans irréalistes ou en faveur des pays à performance médiocre.
d) Les pays qui sortent d'un conflit affrontent des problèmes uniques. L'allégement de la dette peut fournir un " dividende de paix " qui dégagera des ressources précieuses pour les secteurs clés.
e) Des dispositions du type Brady Bond, fondées sur l'échange volontaire d'une dette commerciale pour diverses options possibles, dont des obligations ou de nouveaux fonds, doivent être envisagées pour plusieurs pays africains à revenu intermédiaire lourdement endettés.
137. Un nouveau partenariat international avec l'Afrique implique des changements importants dans la prise de décisions, l'évaluation et les pratiques de financement du développement suivies par les principaux partenaires de l'Afrique pour le développement, à savoir notamment les pays donateurs agissant sur le plan bilatéral et les institutions de Bretton Woods. Des réformes dans le sens souhaité sont déjà envisagées ou en cours d'exécution. Le Pacte cherche à lier ces réformes à des objectifs précis et à des procédures convenus d'un commun accord et suivis par les parties intéressées.
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Les produits africains ont besoin d'un accès beaucoup plus aisé aux marchés internationaux
138. Quelle est la situation aujourd'hui ? C'est grâce à l'intensification du commerce international que l'Afrique se développera. Les exportations sont le moyen d'obtenir un investissement et un financement à long terme; elles sont le moteur nécessaire de la croissance. Mais l'Afrique continue de rencontrer des obstacles dans l'accès aux marchés internationaux, des tarifs frappant précisément les produits pour lesquels les pays africains sont les plus compétitifs - exportation de textiles, habillement et chaussures, qui exigent une main d'oeuvre nombreuse, produits agricoles transformés. Pour un large éventail de produits, le montant des droits augmente avec le niveau de traitement. Les réglementations européenne et américaine concernant le traitement préférentiel sont extrêmement restrictives. A moins que ces règles ne soient sensiblement remaniées en faveur de l'Afrique, le rôle des exportations dans la croissance continuera d'être entravé de l'extérieur.
139. Que faut-il faire dans le contexte du partenariat international avec l'Afrique ? On trouvera ci-après un résumé des recommandations :
a) Conduire le nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales prévu en tant que " cycle pour le développement " et réviser les traités de Marrakech axés sur les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs du développement international (IDG).
b) Remanier les règles du commerce international afin d'offrir à tous des chances plus égales, ce qui implique les mesures suivantes :
Imposer des disciplines strictes concernant le dumping des excédents agricoles produits dans les pays développés.
Remanier les dispositions pertinentes des accords ACP pour élargir le champ autorisé des achats de matières premières par les pays en développement.
Exempter l'Afrique de certaines obligations dans l'accord MIC, permettant ainsi aux gouvernements d'accorder un traitement préférentiel aux sociétés nationales.
Élargir les dispositions des accords de l'OMC concernant les préférences spéciales et différentielles afin de soutenir l'industrialisation et la diversification économique.
c) Veiller à ce que les accords commerciaux internationaux permettent à l'Afrique d'exploiter ses avantages comparatifs :
Prêter assistance aux pays africains pour qu'ils aient accès aux nouvelles technologies et les assimilent à des conditions concessionnelles. L'accord MIC oblige à prêter attention à la promotion du transfert de technologies et à la protection des connaissances techniques autochtones.
Revoir les restrictions imposées à l'immigration dans le contexte de la libéralisation des services, surtout de ceux où l'Afrique a un avantage comparatif.
d) Améliorer la capacité technique de l'Afrique, de manière qu'elle joue un rôle effectif dans les accords commerciaux internationaux :
Aider les pays africains à participer pleinement aux processus d'établissement des règles du commerce international et leur fournir une assistance technique pour les aider à satisfaire aux conditions de l'OMC.
Rationaliser et simplifier les procédures d'accès aux ressources prévues dans les divers protocoles relatifs au commerce, de manière que les pays africains puissent recevoir davantage de fonds.
Fournir des ressources additionnelles pour couvrir les coûts de mise en oeuvre des accords multilatéraux.
e) Promouvoir l'intégration économique régionale en Afrique :
Développer les marchés régionaux de capitaux.
Réduire ou éliminer les tarifs et les points de contrôle pour le commerce inter-africain, ouvrant ainsi des marchés plus larges aux produits manufacturés africains.
Offrir des incitations fiscales et des réglementations simplifiées à l'investissement des Africains en Afrique.
Encourager la mobilité de la main d'oeuvre en libéralisant et en harmonisant la législation en matière de citoyenneté, de résidence et d'imposition, et promouvoir la compatibilité des diplômes délivrés par les divers systèmes d'enseignement.
Harmoniser la valeur des diplômes pour améliorer la mobilité de la main d'oeuvre.
Renforcer la capacité des organisations régionales et sous-régionales existantes, y compris avec la fourniture de services d'experts juridiques et techniques aux organisations intergouvernementales s'occupant de la mise en commun des ressources et des initiatives communes à plusieurs pays.
Les rôles présent et futur du secteur privé dans le développement de l'Afrique sont exposés en détail au Chapitre V.
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CHAPITRE IV
RENFORCER LES PARTENARIATS POUR LE DÉVELOPPEMENT
140. Le présent chapitre porte essentiellement sur la valeur ajoutée essentielle du Pacte pour le redressement de l'Afrique, à savoir la relation transformée en matière d'aide entre l'Afrique et ses partenaires internationaux pour le développement, qui est ici proposée. Le Pacte vise à recentrer l'attention sur le développement à long terme. Il repose sur le postulat que les dirigeants africains sont déterminés à appliquer les stratégies de réduction de la pauvreté grâce à une croissance durable et à la détermination réciproque des Africains et de leurs partenaires extérieurs de conclure des partenariats à long terme pour soutenir ces stratégies.
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PRINCIPES DIRECTEURS
141. Le partenariat international est depuis longtemps une composante essentielle du développement de l'Afrique. Mais, comme l'analyse du Chapitre IV l'a montré, le bilan en est mitigé s'agissant d'atteindre les objectifs du développement pour l'Afrique. Des enseignements ont été tirés qui nous permettent de formuler des principes directeurs essentiels, lesquels peuvent apparaître comme le strict minimum pour assurer le fonctionnement des partenariats futurs au service du développement. A cette fin, le Pacte envisage des partenariats fondés sur quatre principes directeurs fondamentaux, à savoir :
a) Contrôle par l'Afrique des visions et objectifs du développement national, aussi bien que des politiques et programmes de réduction de la pauvreté, et participation accrue des pays africains à l'économie mondiale.
b) Flux de ressources stables et à long terme à destination de l'Afrique, et prévisibilité de l'appui des donateurs à long terme.
c) Partenariat transformé basé sur la responsabilité mutuelle des résultats convenus du développement, ce qui recouvre l'examen par des égaux et le suivi de la performance parmi les pays africains aussi bien que les partenaires internationaux.
d) Reconnaissance de la diversité de l'Afrique. Certains pays peuvent tirer immédiatement profit de l'éventail complet des mesures énoncées, tandis que d'autres ont besoin de progresser sur le plan de la gouvernance et de la gestion économique avant de remplir les conditions exigibles.
142. Sur la base de ce qui précède, le Pacte envisage une transformation des relations en matière d'aide, les projets fragmentaires laissés à l'initiative des donateurs cédant la place à un appui prévisible à long terme aux programmes contrôlés par les Africains. Il envisage aussi que les conditionnalités, souvent perçues par les Africains comme une intrusion, seront délaissées au profit d'une relation adulte entre donateurs et bénéficiaires de l'aide, caractérisée par le dialogue et l'édification d'un consensus et étayée par la bonne gouvernance et la gestion économique saine des pays africains.
143. Ces principes dessinent la route à suivre pour l'avenir. Chaque principe conduit à des mesures spécifiques qui peuvent être prises pour transformer la relation entre l'Afrique et ses partenaires internationaux et déboucher ainsi sur une croissance durable et la réduction de la pauvreté. Le Pacte envisage une série non figée de rapports entre l'Afrique et ses partenaires internationaux, chacune des parties tenant l'autre pour responsable de la performance d'ensemble dans le sens des objectifs de développement convenus d'un commun accord. Les gouvernements africains prendront l'engagement de respecter des principes convenus de gouvernance et d'observer les critères d'une gestion saine des finances publiques, tandis que les partenaires internationaux auront le souci de respecter les priorités, stratégies et politiques énoncées par les gouvernements africains et de réduire les coûts de transaction en harmonisant et améliorant leurs modalités et pratiques en matière d'aide.
144. Le Pacte ne propose pas de nouvelles modalités ou instruments mais fait appel à un certain nombre d'innovations et d'approches, ainsi que de pratiques en matière d'aide, qui sont déjà mises à l'épreuve pour mieux assurer le contrôle national et le développement participatif. Ce qui est nouveau, c'est que les quatre principes directeurs, mis en oeuvre de la manière voulue, sont présentés comme un ensemble minimal de principes qui régissent les partenariats envisagés au titre du Pacte.
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DES RAPPORTS TRANSFORMES EN MATIERE D'AIDE : LEUR MISE EN OEUVRE
145. Comment mettre en oeuvre les quatre principes directeurs ? Comment allons-nous démocratiser les rapports en matière d'aide ? La présente section énonce quelques-unes des mesures nécessaires.
Contrôle africain des politiques et programmes
146. Le caractère central du contrôle pour le succès de la réforme des politiques est bien reconnu. Mais comment concrétiser ce contrôle ? La première composante se situe à l'intérieur des pays africains eux-mêmes.
147. Le contrôle englobe direction et capacité de définir et d'appliquer des stratégies garantissant le bien-être économique et social des nationaux du pays considéré. L'identification au niveau national des priorités et stratégies de développement constitue la première et capitale démarche. Des représentants élus doivent promouvoir un large consensus autour des stratégies nationales et des choix politiques liés à celles-ci. Ceci fait, les autorités publiques doivent être résolues et capables de gérer les affaires du pays de manière efficace et responsable. Les conditions préalables sont les suivantes : processus participatifs aux fins de fixer les priorités et d'édifier un consensus; capacité analytique de définir de saines options et de prendre des décisions politiques responsables; volonté politique d'apporter les correctifs nécessaires, en apprenant par l'action; et mécanismes permettant l'examen par les paires et le suivi de la performance. En outre, nous pouvons reconnaître une tendance encourageante, dans les limites du continent, à apprendre à partir des meilleures pratiques, et à mettre en place des institutions nationales de recherche et de définition des politiques. Bref, il est nécessaire d'identifier et utiliser des processus conduits par les Africains eux-mêmes pour aider à remplir ces conditions préalables.
148. La deuxième composante réside dans l'acceptation, de la part des donateurs internationaux, de coordonner et canaliser leurs programmes d'aide conformément à des agendas et approches contrôlés par les Africains, de soutenir des institutions et processus nationaux qui favorisent l'édification d'un consensus et une gestion économique responsable, et de réorienter les programmes d'assistance technique vers les besoins nationaux à long terme en matière de capacités.
Quelle est la meilleure pratique actuelle ?
149. Les partenaires internationaux ont introduit et expérimenté certaines initiatives importantes qui offrent la promesse d'accroître sensiblement le contrôle africain. En particulier, il faut citer le Cadre de développement intégré (CDF) et les Documents stratégiques sur la lutte contre la pauvreté (PRSP) - introduits dans les deux cas par les institutions de Bretton Woods - qui englobent la vision du contrôle et des partenariats au niveau national. La Banque mondiale voit dans le CDF un cadre qui rassemble toutes les parties intéressées dans un processus de développement national autour d'un programme de développement défini et élaboré au niveau national, et dans les PRSP la modalité opérationnelle qui met en pratique les principes du CDF. Les PRSP sont aussi le mécanisme qui déclenche tout le financement concessionnel de l'Association internationale de développement (IDA), du guichet d'aide libérale de la Banque mondiale, du Mécanisme de réduction de la pauvreté et de croissance (Poverty Reduction and Growth Facility - PRGF) du FMI ainsi que de l'allégement de la dette prévue par l'Initiative pour les pays pauvres très endettés. De même, au coeur de la réforme de l'ONU, se situe le Plan cadre des Nations Unies pour l'aide au développement (UNDAF), qui est conçu pour garantir le soutien du système des Nations Unies aux priorités choisies par les pays eux-mêmes. Ces priorités prennent la forme d'un tout bien articulé dans un Bilan commun de pays (CCA) établi par l'équipe nationale de l'ONU. L'UNDAF et le CCA offrent des outils susceptibles de promouvoir avec force le contrôle par les Africains ; les coordonnateurs résidents des Nations Unies ont exprimé leur enthousiasme pour l'UNDAF, qui est à leurs yeux le principal mécanisme de coordination au niveau national..
150. Les gouvernements africains, au niveau le plus élevé, ont entériné le processus PRSP et la mise en oeuvre a démarré. Entre temps, le CDF est expérimenté dans un nombre limité de pays. L'examen des premières expériences faites de l'application des PRSP fait apparaître un certain nombre de problèmes opérationnels et de tensions qui pourraient éventuellement saper le contrôle national.
151. Les principales préoccupations jusqu'alors exprimées portent sur les points suivants : insuffisance de la capacité nationale d'établissement des PRSP; tension entre le contrôle national et les exigences d'une évaluation commune par les représentants de la Banque mondiale et du Fonds concernant l'adéquation des PRSP en tant que base de l'allégement de la dette prévu par l'Initiative pour les pays pauvres lourdement endettés; difficulté de concilier le temps nécessaire (deux ans en moyenne) pour préparer des PRSP complets et contrôlés au niveau national et, d'autre part, la nécessité d'alléger d'urgence la dette au titre de l'initiative HIPC; et lourdes exigences imposées à une faible capacité institutionnelle par les conditions inhérentes à l'établissement participatif et consultatif des PRSP. Une étude indépendante des implications sociales plus larges de l'Initiative pour les pays pauvres lourdement endettés, menée par la Commission des droits de l'homme (ONU) [Fantu Cheru, Africa's Human Rights and Debt Relief Conditions (Commission des droits de l'homme), janvier 2001.] a en outre fait apparaître des conflits entre objectifs. Les pays bénéficiaires ont généralement donné priorité au souci de satisfaire aux conditionnalités macro-économiques inflexibles imposées par le FMI et la Banque mondiale pour alléger la dette, au détriment des politiques de réduction de la pauvreté.
152. On craint aussi que la préoccupation de préparer les PRSP ait détourné l'attention des donateurs du plan de développement national à plus long terme que le gouvernement a mis au point. De même, le souci primordial de réduire la pauvreté, inhérent aux PRSP, a relégué à une place secondaire les problèmes qui sont d'une importance critique pour que l'Afrique participe réellement à l'économie mondiale.
153. Pour faire face à ces insuffisances, il faut mettre en place des processus qui fassent clairement apparaître les perspectives africaines sur les PRSP et appliquer les enseignements tirés à l'évolution des PRSP et du CDF. L'évaluation indépendante des PRSP de la Tanzanie commandée par le gouvernement, parallèlement à l'évaluation menée conjointement par le personnel de la Banque et du Fonds, constitue à cet égard une importante initiative. Les consultations de la société civile sur les PRSP organisées par plusieurs pays (Ghana, Mali, Ouganda et Tanzanie) représentent de bons exemples d'une préparation participative des PRSP. Entre temps, des ONG africaines nationales et régionales patronnent activement des consultations de la société civile sur le suivi et évaluation de l'expérience faite des PRSP.
154. Au niveau régional, le groupe d'apprentissage des PRSP lancé par la CEA est conçu comme un forum de dialogue africain sur les PRSP. Le groupe d'apprentissage, qui se réunit chaque année, partagera les expériences des pays sur le processus PRSP, marquera du doigt les obstacles et tensions rencontrés dans ce processus, identifiera les insuffisances de la capacité nationale et recommandera les mesures que les gouvernements africains et leurs partenaires pourraient prendre.
155. Des processus d'exercice de la responsabilité au niveau national sont en cours d'élaboration dans un certains nombre de pays, comprenant un examen annuel des dépenses publiques, des stratégies de lutte contre la corruption, des processus de réforme institutionnelle et une réforme du gouvernement local (instruments clés pour une décentralisation de la responsabilité et de son exercice effectif).
156. Il est possible d'approfondir le contrôle par les Africains au moyen de forums régionaux qui fixent des agendas. Le Forum africain de développement (FAD) a été institué par la CEA avec cet objectif. Dans le court temps écoulé depuis sa mise en place, en 1999, le FAD a été loué comme l'un des grands forums de l'Afrique parce qu'il rassemble des représentants des gouvernements nationaux, leurs homologues de la société civile, ainsi que leurs partenaires extérieurs, en vue d'un dialogue centré sur les priorités, politiques, solutions et partenariats de développement de l'Afrique.
157. La " Grande table " patronnée par la CEA est un autre forum de haut niveau qui réunit les Ministres des finances africains, leurs homologues des pays de l'OCDE aux Ministères de la coopération pour le développement, et de hauts fonctionnaires des organismes d'aide en vue d'un dialogue sur des problèmes de développement de grande importance pour l'Afrique. La " Grande table ", qui a tenu sa première réunion en novembre 2000 à Addis Abeba, constitue aussi un forum idéal pour approfondir le dialogue en cours sur la transformation des rapports en matière d'aide.
158. Le contrôle des Africains sur les objectifs et les idées doit être complété par la capacité de réalisation. Le renforcement des capacités est une composante essentielle du contrôle. Tirant parti de son avantage comparatif, et des ressources dont il dispose, le Fonds de renforcement des capacités africaines (African Capacity Building Fund - ACBF) pourrait jouer un rôle important à cet égard. L'approche doit s'inspirer des enseignements tirés de l'expérience décevante des essais passés pour renforcer les capacités africaines par des injections massives d'assistance technique.
159. Au-delà des services qu'il fournit actuellement, l'ACBF est en bonne position pour aider les pays africains à formuler des cadres nationaux cohérents aux fins de renforcer la capacité du service public à partir d'évaluations systématiques des besoins nationaux à cet égard. Ces cadres serviraient de base pour acheminer toute l'assistance technique des donateurs et le soutien à la mise en place des capacités. L'ACBF fournirait un capital d'amorçage pour créer des fonds nationaux d'affectation spéciale auxquels les gouvernements pourraient avoir accès pour mobiliser les riches connaissances spécialisées qui existent en dehors des secteurs publics au bénéfice de l'assistance technique à court terme et de l'affectation temporaire de conseillers dans le secteur public.
Les accords de partenariat doivent assurer des flux de ressources stables à long terme.
Il faut simplifier et harmoniser les conditionnalités.
160. Les deux dernières décennies se sont caractérisées par des suspensions répétées du soutien des donateurs, source de désorganisation, qui s'expliquent par plusieurs raisons. De nombreuses interruptions ont été attribuées au fait que des pays ne réussissaient pas à satisfaire aux conditionnalités imposées par la Banque/le Fonds, et d'autres, à certains développements politiques. Une importante étude sur la FASR conduite en 1997 a établi que depuis sa mise en place, en 1986, la FAS ou la FASR avaient interrompu 51 fois les programmes qu'elles appuient dans 28 pays. Dans près d'un tiers de ces cas, " la cause première des interruptions de programme n'était pas liée à la nécessité de corriger des déviations marquées de la politique " [Conditionality in Fund-supported Programs-Policy Issues (SM/01/60), février 2001]. En même temps, le nombre moyen de conditionnalités a augmenté et dépassé les limites de ce qui était exigé en vertu des objectifs du programme.
161. Un partenariat vraiment efficace exige que l'on passe d'une conditionnalité excessive à des relations prévisibles à plus long terme illustrant une relation adulte caractérisée par la confiance. Une telle relation implique d'abord que les pays africains démontrent leur détermination de gérer efficacement l'aide reçue aux fins du développement et d'assumer la responsabilité de leurs activités de développement. Sont essentiels à cette fin l'établissement de liens plus étroits entre le choix des politiques, la planification et l'affectation des ressources (par exemple, à l'aide de mécanismes tels que les Cadres de dépenses à moyen terme) et le renforcement d'autres aspects de la gestion des dépenses publiques, de manière que les plans et budgets se traduisent en actions concrètes. Cela supposera une forte volonté politique dans le processus de formulation et d'exécution du budget, des politiques qui soient claires et cohérentes et qui reconnaissent la réalité des difficiles compromis budgétaires, enfin un souci de la transparence et de l'exercice effectif des responsabilités au moyen d'audits effectifs et d'autres arrangements propres à assurer une surveillance.
162. Quant aux donateurs, il faut parallèlement qu'ils soient disposés à réaligner leurs politiques et pratiques d'assistance en harmonie avec l'esprit du contrôle de l'Afrique sur son développement. Ce changement doit comporter un abandon plus résolu de l'appui aux projets fragmentaires, qui parfois s'est trouvé en désaccord avec les objectifs sectoriels, au profit d'un soutien à long terme des programmes qui soit acheminé par l'entremise du cadre de dépenses à moyen terme du pays bénéficiaire, les donateurs étant d'autre part véritablement résolus à prévenir toute perturbation dans les relations en matière d'aide qui résulterait d'incidents fortuits.
Quelle est la meilleure pratique actuelle ?
163. L'attention portée au contrôle national et aux partenariats responsables a donné naissance au sentiment renouvelé qu'il fallait renforcer d'urgence la capacité de gestion financière publique. L'Union européenne (UE) et la Banque mondiale ont l'intention d'établir un Fonds d'affectation spéciale pour faciliter des évaluations approfondies des politiques se rapportant aux dépenses publiques et des pratiques de gestion en la matière, en vue d'identifier des points de référence et des indicateurs de performance concernant la gestion des dépenses publiques. De même, l'une des équipes techniques oeuvrant dans le cadre du partenariat stratégique avec l'Afrique centre ses travaux sur une meilleure compréhension des problèmes connexes et sur l'amélioration de la gestion financière publique dans les pays africains à faible revenu.
164. Les Gouvernements britannique (par l'entremise du Department for International Development - DFID) et rwandais sont parvenus à un accord formel sur le partenariat pour le développement, accord à long terme destiné à soutenir le plan national rwandais de développement 2020. Le Rwanda s'est engagé à accélérer la transition de la période de crise et d'urgence vers la réconciliation nationale, la bonne gouvernance, la croissance économique et la réduction de la pauvreté. De son côté, le DFID s'est engagé à aider le gouvernement rwandais à atteindre ses objectifs, grâce à un appui financier souple et durable, et à maintenir son engagement sur une période de 10 ans. Un trait particulièrement novateur réside dans l'accord conclu par les deux gouvernements de faire contrôler le progrès vers ces objectifs par un évaluateur externe indépendant sur la base d'indicateurs convenus entre eux.
165. L'initiative des Pays-Bas de renforcer leur appui au programme en faveur des pays ayant une bonne performance et l'engagement pris par le Royaume-Uni de délier la totalité de son aide aux pays les moins avancés sont des exemples analogues et louables des efforts de donateurs bilatéraux pour s'orienter vers des rapports adultes en matière d'aide.
Des rapports transformés en matière d'aide doivent être fondés sur la responsabilité mutuelle. Les évaluations doivent être mutuelles, transparentes et/ou indépendantes.
166. Responsabilité est le mot clé. Jusqu'à présent, la responsabilité n'a été attendue que d'une seule partie : il est demandé aux bénéficiaires de présenter des rapports aux donateurs et de se soumettre aux évaluations des donateurs. Au coeur du Pacte pour le développement de l'Afrique se situe la mise en place d'instruments se prêtant à une responsabilité mutuelle, contrepartie à la détermination des gouvernements africains de se doter d'une bonne gouvernance. Les gouvernements africains devront démontrer tant à leurs nationaux qu'aux partenaires extérieurs que les ressources publiques aussi bien que les fonds étrangers sont correctement utilisés. Il est nécessaire d'effectuer un suivi systématique des pratiques de gestion budgétaire et d'établir des rapports à ce sujet, de publier et de soumettre à l'examen du public les rapports périodiques du Vérificateur général des comptes, de renforcer les systèmes et pratiques d'audit, de créer une capacité nationale de collecter des données fiables en temps utiles afin de suivre et d'évaluer la performance, et de renforcer la fiabilité des systèmes de responsabilité.
167. La responsabilité mutuelle n'est autre chose que l'engagement commun des pays africains et des donateurs externes de suivre les progrès réalisés vers les objectifs convenus entre eux et d'accepter un examen par des égaux. Ce suivi importe non seulement aux fins d'établissement de rapports, mais aussi pour identifier les contraintes et prendre des mesures correctives.
168. Les bénéficiaires et les donateurs doivent parvenir à un accord sur des points de référence du suivi qui soient aisés à comprendre. Les objectifs internationaux de développement (International Development Goals - IDG) représentent une série minimale d'indicateurs permettant de suivre les résultats du développement, ce qui s'accorde avec la place privilégiée faite à la réduction de la pauvreté. Cependant, il est également nécessaire de tirer au clair les implications opérationnelles et les capacités nécessaires pour surveiller de près les dépenses publiques liées à la lutte contre la pauvreté, ce qui est aujourd'hui requis afin de démontrer le lien entre allégement de la dette et pauvreté.
Quelle est la meilleure pratique actuelle ?
169. A titre de suivi de la déclaration du Millénaire sur l'Afrique, la Tanzanie est le premier pays qui ait présenté un rapport sur les progrès réalisés vers les IDG. Des rapports analogues sont attendus d'autres pays. Entre temps, les efforts se poursuivent au sein de l'ONU pour clarifier et préciser ces objectifs aux fins de suivi. De même, le Gouvernement du Burkina Faso, en collaboration avec l'Union européenne, a mis en route un effort expérimental louable pour suivre les résultats du développement dans les secteurs éducatif et sanitaire. Cet effort expérimental consiste à suivre la réforme des conditionnalités dans ces secteurs et à offrir une base systématique au gouvernement pour évaluer et réorienter ses politiques.
170. La Tanzanie est aussi allée de l'avant en utilisant les réunions du Groupe consultatif en tant que mécanisme dont le but est non de promettre une assistance, mais d'examiner et de suivre les engagements en cours.
171. En 1997, le Gouvernement malien et le CAD (OCDE) ont lancé un examen et évaluation conjoints de l'assistance - initative de pointe destinée à fournir une évaluation critique de l'expérience faite en matière de coopération pour le développement entre le Mali et ses partenaires extérieurs. L'examen a révélé de graves problèmes concernant la coordination de l'aide, l'efficacité de l'aide et la médiocre intégration des programmes d'aide dans les structures nationales de gestion; il a ainsi déclenché un processus fondamental de réforme de l'aide qui continue de se dérouler.
172. Les rapports annuels du CAD (OCDE) fournissent des informations sur la performance de chaque donateur, auxquelles on peut emprunter pour donner forme à des partenariats renforcés. Ces rapports contiennent des données sur les engagements, les décaissements, les transferts nets, l'aide liée et déliée. Cependant, l'information fournie contient de nombreuses lacunes contenant les exigences du pays bénéficiaire. Il est nécessaire d'urgence d'établir un mécanisme qui fournira au pays bénéficiaire des données sur l'assistance répondant à ses besoins en matière de planification [Gerry Helleiner, " Towards Balance in Aid Relationship : Donor performance monitoring in low-income countries ", Cooperation South, 2, 2000]. Ceci devrait englober la commande d'une évaluation indépendante, à mener chaque année, de l'aide au développement qui tienne compte des exigences des bénéficiaires en matière d'information, d'analyse et d'examen, à savoir notamment sur les points suivants :
a) Données propres au pays bénéficiaire concernant la fourniture de ressources.
b) Mesure dans laquelle les dépenses d'ODA entrent dans les limites du système budgétaire du pays bénéficiaire.
c) Intégration et coordination de l'assistance dans les priorités et plans nationaux.
d) Ce qui n'a pas été tenu dans les promesses de l'ODA.
e) Existence d'un financement compensatoire et pour imprévus.
f) Mesure dans laquelle l'assistance du donateur est liée à l'obligation d'achat.
g) Proportion de l'ODA dépensée en assistance/coopération technique.
h) Evaluations qualitatives du contrôle national (par des évaluateurs indépendants).
i) Horizon chronologique des engagements en matière d'ODA : mesures de stabilité et de prévisibilité.
j) Division de l'ODA en aide humanitaire et assistance au développement.
k) Mesure dans laquelle les donateurs répondent aux demandes d'information des bénéficiaires.
173. Un semblable mécanisme d'établissement des rapports aiderait à déplacer le centre d'intérêt des rapports vers la coordination de l'aide et, à ce titre, aiderait le pays bénéficiaire à conduire son propre processus de budgétisation et de planification. Associée à l'établissement systématique de rapports sur la gestion budgétaire de la part des pays bénéficiaires, cette approche serait en harmonie avec la prévisibilité d'un soutien des donateurs à plus long terme et aurait en outre l'effet de faciliter la performance et l'évaluation des donateurs au niveau national.
174. L'équipe de travail du CAD sur les pratiques des donateurs, récemment créée, représente un pas digne de remarque dans ce sens. L'équipe de travail examinera les pratiques des donateurs et identifiera les bonnes pratiques dans le domaine des modalités d'assistance, cela dans la perspective du renforcement du contrôle national et dans le souci de soutenir le processus de développement dans les pays partenaires. L'équipe de travail sera informée par les propositions apparues dans les études et initiatives menées par divers membres du CAD, y compris celles relatives à l'harmonisation des rapports, des décaissements, des procédures d'audit, et à la mise en commun de l'assistance technique. L'équipe de travail examinera aussi à cet égard le rôle potentiel de la technologie de l'information.
175. Les Directives du CAD sur la réduction de la pauvreté, récemment publiées, offrent une liste de contrôle énumérant les problèmes nationaux en rapport avec la réduction de la pauvreté et une liste de contrôle complète des problèmes d'organisation et de procédure qui y sont liées. Ces directives ont tiré grand parti d'une publication antérieure, DAC Scoping Study of Donor Poverty Reduction Policies and Practices (1999), selon laquelle la performance actuelle de cet organisme demeurait très en deçà des attentes dans ce domaine. De même, le Groupe informel des secrétariats d'organisations multilatérales (qui comprenait la Banque mondiale, le FMI et le PNUD) centre maintenant son attention sur un suivi stratégique des changements intervenus dans les procédures et comportements des institutions en vue de donner corps aux partenariats dirigés par les pays.
176. Se conjuguant avec le suivi de la performance, les examens par des égaux peuvent être un mécanisme essentiel pour aider à enraciner la responsabilité mutuelle. Le mécanisme d'examen par des égaux créé par le CAD s'est avéré efficace à cet égard. Le moment est peut-être arrivé d'envisager de donner aux bénéficiaires une voix dans ce mécanisme. Cependant, la première démarche que doivent accomplir les pays africains eux-mêmes est d'accepter pleinement le principe d'examens par des égaux.
177. La deuxième démarche est de parvenir à un accord sur une série convenue en commun d'indicateurs repères sur la base desquels ces examens puissent être conduits. Le travail en cours de la CEA sur l'identification des indicateurs permettant de suivre les progrès vers la bonne gouvernance, la gestion des finances publiques, l'intégration régionale et la viabilité économique offre un bon point de départ dans ce sens. En fait, la participation des Etats membres à de tels examens par des égaux doit apparaître comme un préalable nécessaire au succès du type de partenariats élargis envisagés en vertu du Pacte.
178. Enfin, il importe de considérer les choix qui s'ouvrent en vue d'établir des mécanismes de suivi et évaluation indépendants. Par exemple, les audits sociaux et environnementaux de programmes et de mesures spécifiques pourraient être commandés à des institutions indépendantes. Avec le temps, ces audits sociaux et environnementaux peuvent devenir un outil important des procédures d'évaluation mutuelle complétant ou même remplaçant les évaluations privées des donateurs.
Le partenariat doit être conçu en fonction de la situation propre de chaque pays africain.
179. Dans toute l'Afrique, la diversité est la règle. Les sociétés, les économies et les systèmes politiques ont des capacités et perspectives différentes et les partenariats internationaux avec l'Afrique doivent en tenir compte.
180. Le Pacte reconnaît que les pays et sous-régions sont divers. Il y a des pays à faible revenu lourdement endettés, des pays à revenu intermédiaire lourdement endettés, des pays dont la performance est relativement bonne, et des pays qui sortent d'un conflit. Chacun de ces pays a des besoins spéciaux qui appellent l'attention. Tandis que le Pacte fixe des normes très élevées pour un partenariat adulte, il reconnaît que peu de pays peuvent satisfaire dès l'origine à toutes ces normes. Trois groupes de pays sont envisagés : pays à " partenariat renforcé ", pays à " partenariat limité " et pays sortant d'un conflit.
181. Ces catégories décrivent utilement les différences qui apparaissent déjà dans l'engagement et la performance des différents pays africains et dans le niveau et le type d'assiistance au développement qu'ils reçoivent. Le Pacte utilise ces catégories pour différencier les approches du partenariat qu'il est possible d'adopter pour encourager les pays africains à adopter des politiques et prendre des mesures qui amélioreront les perspectives de développement durable et de réduction de la pauvreté. Comme tels, ces groupements ne devraioent pas être considérés comme une tentative pour classer les pays en groupes strictement définis. L'intention est plutôt de récompenser les bonnes performances, tout en plaidant pour la poursuite d'un soutien aux pays dont la performance est moyenne ou médiocre. Le dialogue permanent sous les auspices du CAD (OCDE) sur " l'action dans les pays dont la politique et la performance sont défavorisés par un environnement médiocre " offre quelque orientation sur la manière de définir la portée et la nature de l'assistance à ces pays sur la base des causes profondes de leur médiocre performance
182. Pays à partenariat renforcé. Ce sont les pays qui satisfont à la majorité des critères énoncés dans le Pacte : adhésion à des principes convenus de gouvernance qui se rapportent aux capacités de l'État de gérer les affaires économiques et sociales au moyen de processus participatifs et d'une gestion responsable des finances publiques, et engagement de respecter les principes macro-économiques fondamentaux en vue de réduire la pauvreté grâce à une croissance durable et à large assise. De tels pays méritent des rapports transformés en matière d'aide qui leur permettent de donner tout leur potentiel. Ils doivent s'attendre à bénéficier d'engagements réciproques de leurs partenaires multilatéraux et bilatéraux, y compris une aide accrue au développement dans le cadre d'arrangements à long terme.. Pour ces pays, le passé, caractérisé par le sous-financement des programmes de réforme, doit donc être remplacé par un avenir où les réformateurs qui réussissent sont pleinement récompensés par un soutien prévisible et à long terme des programmes acheminés par des cadres de financement public à moyen terme. En fait, une grande partie de l'augmentation des flux d'aide préconisée au titre du Pacte devrait cibler ce groupe de pays, où existent l'engagement, le climat propice à la définition des politiques et les capacités nationales d'utiliser l'aide efficacement. [Forum on Elusive Partnerships : Working in Countries with Poor Policy and Governance Environments, patronné par le CAD (OCDE), Paris, 5-6 avril 2001]
183. La confiance mutuelle entre partenaires repose avant tout sur une saine gestion des finances publiques. Les critères énoncés dans l'encadré ci-après, s'il y est satisfait, instaureront simultanément la confiance de la nation et celle des donateurs dans la gestion des finances publiques, y compris le montant de l'aide étrangère.
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184. Le contrôle par les pays africains implique l'engagement par chaque pays de lutter contre les obstacles qui sont à l'origine d'une gouvernance médiocre. Ce qu'il faut, ce n'est pas une autre série de principes de gouvernance pour l'Afrique, mais plutôt une action concertée en vue du changement par des réformes endogènes. Il n'y a pas de série universellement acceptée de normes de gouvernance ou d'indicateurs de performance. Les mesures qui visent à améliorer la gouvernance diffèrent selon les pays et doivent être contrôlées par le pays concerné. Leur application effective suppose qu'elles soient incorporées aux stratégies de réduction de la pauvreté et cherchent à atteindre des objectifs mesurables dans un délai prescrit.
185. Les réformes de la gouvernance exigent des pays africains qu'ils s'engagent à fixer des repères en fonction desquels ils mesureront les progrès et mettront en oeuvre des mécanismes de suivi appropriés aux niveaux national et régional. La CEA est en train d'élaborer des indices qui permettront de contrôler le respect de l'engagement d'appliquer les réformes de gouvernance. Cet outil peut être utilisé par les pays pour évaluer leurs progrès, tirer les leçons de l'expérience et offrir une base à l'examen par des égaux. L'encadré ci-dessous illustre ces indicateurs.
186. Les pays à partenariat renforcé doivent s'engager à évaluer systématiquement la gouvernance et à travailler avec tous les groupes sociaux à mettre en place des mesures de réforme crédibles et acceptables qui répondent à leur situation particulière. La réforme devra être conduite selon un ordre de priorités de manière à traiter d'abord les problèmes les plus graves.
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187. Les pays à partenariat renforcé peuvent jouer le rôle de moteur du développement économique du continent. Ils peuvent créer du capital et assumer un rôle dirigeant en technologie. Dans le domaine de la gouvernance, ils peuvent offrir aux autres pays des rôles modèles et, en ce qui concerne la paix et la sécurité, peuvent sous-tendre la stabilité de l'Afrique dans les prochaines décennies. Les pays à partenariat renforcé peuvent être les vitrines de l'Afrique, démontrant sa capacité de réussir.
188. Un cadre financier à moyen terme (revenus et dépenses) constitue un outil majeur des partenariats renforcés. L'appui des donateurs aux budgets de développement et aux projets de développement sectoriel doit être intégré à ces cadres de dépenses, ce qui implique le renoncement à des processus de budgétisation distincts.
189. Pour les pays à partenariat renforcé, l'idéal est de satisfaire à tous les critères en matière de bonne gouvernance, de gestion macro-économique et de politiques efficaces orientées vers la lutte contre la pauvreté. Mais la vérité est qu'un pays ne pourra accéder à cette catégorie choisie que sur la base d'un progrès crédible vers les critères retenus, plutôt que sur un bilan déjà établi.
190. Pour ces pays, les meilleures pratiques dérivant des modalités d'assistance en vigueur peuvent être exploitée à fond. Ils peuvent être pleinement représentés dans l'initiative MAP et ses relations avec le CAD (OCDE). Ils peuvent bénéficier des CDF, des PRSP et des autres meilleures pratiques décrites ci-dessus. Ils seront les premiers auxquels étendre les meilleures pratiques novatrices concernant les flux de ressources stables à long terme avec un minimum de conditionnalités. Ils doivent remplir les conditions fixées pour bénéficier d'un allégement accéléré de la dette au titre de l'initiative HIPC.
191. Au cours des dernières années, la coopération dans la mise au point des meilleures pratiques est passée de l'assistance aux projets au soutien sectoriel, puis à un soutien budgétaire complet. Chaque mécanisme a ses mérites et chacun a représenté un pas dans la bonne direction. Actuellement, certains donateurs ne sont pas en mesure d'utiliser pleinement les mécanismes d'appui budgétaire prévus par le partenariat renforcé. Ces donateurs peuvent continuer de soutenir des programmes sectoriels dans des domaines où la capacité institutionnelle et la politique sectorielle appropriées existent, et qui ne contredisent pas le cadre macro-économique, cela dans le cadre d'une marche progressive vers le partenariat renforcé.
192. Pays à partenariat limité. Quand des pays africains choisissent de ne pas isqué aux principes fondamentaux de la gouvernance et de la macro-économie de manière à adopter les politiques et à entreprendre les isqué o qui amélioreront les perspectives de développement durable et de isqué on de la pauvreté, les niveaux de l'aide au développement ont peu de chances d'augmenter et les autres avantages du partenariat, comme l'allégement de la dette, ne se matérialiseront pas. De isqu pays n'ont accès qu'à un " Partenariat limité ". Par exemple, ils n'ont pas nécessairement mis en place les fondements macro-économiques indispensables, ils se caractérisent peut-être par un niveau élevé de corruption ou un attachement douteux aux principes démocratiques. Dans ces conditions, l'aide ne peut être efficace. Des données empiriques surabondantes prouvent qu'en de telles circonstances, l'assistance ne sera pas utilisée de manière efficace. En isqu, poursuivre l'assistance dans un tel environnement peut en fait aggraver la situation, en amenant le pays à contracter des dettes don't il ne pourra assurer le service. Là où l'assistance internationale cesse de contribuer à la croissance économique et à la isqué on de la pauvreté, la corruption isqué davantage de marquer les comportements économiques.
193. Pour ces pays, le Pacte envisage une approche double. L'octroi d'un soutien éventuel à ces pays est fondé sur trois raisons. Premièrement, il est impossible d'abandonner les pauvres des pays en question. Deuxièmement, le risque existe qu'un pays à performance médiocre puisse mettre en danger les perspectives des pays voisins. Troisièmement, le partenariat international est un moyen d'édifier un climat de confiance mutuelle - surtout dans le cas des donateurs qui ont de solides liens historiques avec le pays concerné. Pour ces pays, le Pacte propose une stratégie à double axe. Ils peuvent bénéficier d'initiatives communes dans des domaines clés, y compris les programmes de lutte contre le VIH/sida et les investissements au profit des pauvres dans la santé publique, l'éducation et l'infrastructure de base, avec l'environnement approprié au niveau des politiques sectorielles et les critères d'efficacité voulus. Entre temps, les partenariats internationaux chercheront à promouvoir la bonne gouvernance et les réformes économiques, conduisant par étapes ces pays vers l'objectif d'accéder au statut du partenariat renforcé. En fait, cette approche double existe déjà dans la pratique en ce que l'aide aux projets se poursuit en faveur de nombreux pays même quand la médiocrité de leur macro-performance a fait mettre fin aux prêts.
194. Les principes fondamentaux du Pacte garderont leur intérêt. Des efforts seront faits pour promouvoir les réformes macro-économiques et les éléments d'une bonne gouvernance - le respect de la loi, les capacités institutionnelles, la paix et la stabilité - avec l'objectif à long terme de faire passer ces pays dans la catégorie du Partenariat renforcé. A mesure qu'un bilan de la réforme y est dressé, le Pacte doit être le véhicule qui fera passer ces pays du statut "Partenariat limité " à celui des pays qui bénéficient de tous les bienfaits du " Partenariat renforcé ". Ce processus se déroulera progressivement, à mesure que les pays adoptent des politiques de réduction de la pauvreté, appliquent une gestion économique saine et un Cadre de dépenses à moyen terme pour la budgétisation, et qu'ils introduisent des réformes de nature à améliorer la gouvernance.
195. Pays sortant d'un conflit. Actuellement, un cinquième environ de tous les Africains vivent dans des pays en conflit ou sortant d'un conflit. Les périodes d'après-conflit sont difficiles et présentent des risques, et des gouvernements fragiles doivent alors tenter un certain nombre de transitions difficiles. Ce sont les suivantes, en partie ou en totalité : de la guerre à la paix, de la dictature à la démocratie, de la division à la réconciliation, des secours d'urgence à la reconstruction et au développement, du déplacement au retour dans les foyers, et de l'économie centralisée à la liberté du marché. Ces tâches extrêmement difficiles exigent la présence simultanée de dirigeants capables dans le pays et d'un appui de la communauté internationale.
196. Un partenariat international peut être basé sur certains principes généraux, qui illustrent l'esprit du Pacte et son applicabilité aux exigences d'une transition d'après conflit. Premièrement, le partenariat international doit commencer de bonne heure et l'assistance initiale doit être souple et libre de toute conditionnalité. La relance de l'économie est une condition préalable du succès des transitions d'après conflit, de toute croissance économique ultérieure et de la réduction de la pauvreté. Dans une telle situation, les obstacles à la reprise de flux d'aide réguliers tels que les arriérés de la dette aux prêteurs multilatéraux, doivent être abordés avec souplesse et générosité.
197. Deuxièmement, les modalités de l'assistance actuelle et planifiée, dans le cas des pays sortant d'un conflit, doivent être élargies. Et de nouveaux instruments spéciaux doivent être mis en place. Un exemple en est fourni par la proposition de la Banque mondiale de créer un Fonds d'après-conflit (Post-Conflict Fund), dont le but est de fournir une assistance rapide et non assortie de conditionnalités pour la reconstruction et les mesures essentielles de réforme économique. La Banque mondiale propose d'autre part d'élargir le champ d'application de l'IDA afin de fournir des subventions qui aideront à couvrir les besoins de financement spéciaux des pays sortant d'un conflit. D'autres instruments d'assistance similaires, qui visent explicitement les pays sortant d'un conflit, doivent aussi être envisagés.
198. Troisièmement, les interventions en matière de gouvernance doivent être centrées sur la reconstruction de l'Etat et de ses institutions clés, sur le soutien à la démilitarisation et la reconstruction des communautés. Il est contraire au bon sens d'imposer des conditionnalités en matière de bonne gouvernance à un pays sortant d'un conflit. Bien plutôt, il faut envisager un éventail de modalités d'assistance pour mettre en place les processus participatifs et les capacités institutionnelles nécessaires. Il y a place pour l'innovation dans ce domaine, surtout en ce qui concerne l'engagement de la société civile et du secteur privé.
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CHAPITRE V
RENFORCER LE ROLE DU SECTEUR PRIVE DANS LE DEVELOPPEMENT
199. Les partenariats renforcés envisagés dans le Chapitre IV représenteront un pas important permettant de répondre aux besoins du développement de l'Afrique. Cependant, la remise de la dette et l'aide publique au développement à elles seules ne suffiront pas à financer le développement du continent. L'Afrique a besoin d'un secteur privé dynamique (domestique et étranger) pour fournir le niveau de fonds nécessaires. Les taux élevés de croissance qui sont nécessaires pour que les gens échappent à la pauvreté ne peuvent être réalisés que par un secteur privé solide. Le Compact reconnaît que les marchés et l'entreprise privée sont la pierre angulaire du succès économique. Pour ce qui est de soustraire les à la pauvreté, l'entreprise privée sera plus efficace lorsque des progrès seront faits pour faire respecter la primauté du droit, réduire les coûts des affaires et promouvoir les politiques économiques menant à une croissance rapide et une ouverture au monde extérieur.
200. Le Compact n'a pas de modèle pour l'avenir du secteur privé en Afrique. Les marchés et l'entreprise privée trouveront le moyen de réaliser un développement économique. Le Compact est optimiste s'agissant du potentiel de croissance que peut générer le secteur privé. De même. il reconnaît et appuie les meilleures pratiques des gouvernements donateurs africains qui peuvent promouvoir et renforcer des partenariats publics et privés.
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LA CROISSANCE REALISEE PAR LE SECTEUR PRIVE EN AFRIQUE : LE POTENTIEL
201. Une croissance réalisée par le secteur privé est essentielle si les pays africains entreprennent une transition ordonnée des niveaux élevés d'APD pour financer le développement économique et social. Le total annuel des apports de capitaux, qui sont de 9.5 milliards USD, devra être doublé au cours des dix prochaines années afin d'augmenter l'investissement/PIB de 33% pour réaliser des taux de croissance annuels de 6 à 8%, ce qui est nécessaire pour que l'Afrique atteigne les IDG(subventions internationales pour le développement) pour la réduction de la pauvreté. Une combinaison de remise de la dette, de réformes du régime d'aide actuel et une politique renforcée de l'environnement devraient permettre une transition contrôlée à des taux inférieurs d'APD et des apports de capitaux privés accrus.
202. Bien qu'il demeure moins élevé dans d'autres régions du monde en développement, l'investissement privé s'est accru depuis 1994. Le FDI augmente. Mais les investissements par les STN en Afrique ne représentent encore que 1.2% du FDI global et seulement 5% du FDI total dans tous les pays en développement. En outre, il est très sélectif. Cinq pays bénéficient de 70% du FDI de l'Afrique : Angola, Egypte, Nigeria, Afrique du Sud et Maroc. Les flux de portefeuilles d'actions, qui ne se sont pas concentrés sur l'Afrique avant les années 90 se sont élever à 3.6 milliards USD en 1996.
203. Les chiffres officiels pour le FDI sous-estiment la situation réelle. Des statistiques produites par les gouvernements et les institutions internationales ont eu tendance à cibler les multinationales, les grandes banques et les émetteurs d'obligations, et ont négligé les secteurs dynamiques des petits et moyens investisseurs expatriés ou régionaux en Afrique, les entrepreneurs venant des autres pays en développement, les actions et les marchés des capitaux à court terme. Dans de nombreux pays, des flux de capitaux privés non identifiés importants sont inscrits comme "transactions non enregistrées", "erreurs et omissions" et "transferts privés". Beaucoup de ces transferts sont en fait destinés à l'investissement dans des petites entreprises et dans l'immobilier. Des améliorations dans les systèmes de procès-verbal en Ouganda et au Zimbabwe, entre autres, ont permis le changement de nom de bon nombre de ces transferts en tant que FDI à petite échelle, brossant ainsi un tableau plus exact et plus optimiste de l'économie.
204. L'Afrique n'a pas de choix excepté de faire appel au capital étranger afin d'augmenter les niveaux de productivité nécessaires pour générer des accroissements durables des normes de vie. Heureusement, les retours du FDI ont été élevés entre 1990 et 1996 et les taux de retour sur investissement étaient de 24 à 30%, ce qui est environ 60% de plus que dans d'autres régions. Tandis que le FDI peut compléter immédiatement les 5% de fonds extérieurs nécessaires, l'objectif consiste à faire en sorte que les flux de capitaux privés fournissent 70% du financement extérieur à moyen terme et 100% à long terme. Cela représente la normalisation économique du continent africain et la fin de la dépendance extérieure.
205. Le FDI actuel en Afrique est focalisé sur une poignée de secteurs économiques. Les sociétés qui exportent des fruits, des légumes, du poisson et des crevettes jouent un rôle plus important que par le passé. L'investissement dans les télécommunications, le tourisme, les boissons et l'industrie agroalimentaire augmente. Cependant, le pétrole et les exportations de minéraux solides continuent de dominer l'investissement étranger. Maintenant l'Afrique fournit plus de pétrole aux Etats-Unis que toute autre région du monde et les revenus du pétrole, s'ils sont bien utilisés, peuvent transformer les perspectives d'un certain nombre de pays africains. En plus des sociétés minières bien implantées, l'exploration minière augmente. On pense que les dépenses de l'exploration minière à elles seules sont passées de 80 millions USD en 1991à plus d'un milliard USD en 1999.
Un secteur privé dynamique et compétitif joue un rôle clé pour sortir les gens de la pauvreté.
206. Une croissance économique durable qui s'appuie sur l'esprit d'entreprise et l'investissement privé positif est la clé de la réduction de la pauvreté. Un secteur privé dynamique et compétitif joue un rôle clé pour sortir les gens de la pauvreté de différentes manières. D'abord, un secteur privé dynamique accroît les revenus des foyers en créant plus d'emplois et de meilleurs emplois. Par exemple, au Kenya, entre 1993 et 1998 le secteur privé a créé 173.000 emplois et le secteur public n'en a créé que13.000, un rapport de 13 à 1.
207. Deuxièmement, les entreprises privées permettent d'échapper à la pauvreté en améliorant la qualité des ressources humaines en revalorisant les qualifications professionnelles et en introduisant de nouvelles technologies. En conséquence le secteur privé a un impact direct sur cet indicateur économique clé : l'éducation. Les intérêts communs au secteur public et au secteur privé représentent un domaine qui mérite exploration et innovation.
208. Troisièmement, le secteur privé joue un rôle important en apportant de nouvelles idées et des innovations au marché sous forme de produits, de procédés et de services élargissant ainsi les choix des pauvres ains que pour les consommateurs qui ont plus de moyens. Le Chapitre II a identifié les faibles capacités de l'Afrique dans le domaine de la recherche et de la technologie en tant qu'entrave au développement économique. Lorsque l'Afrique mûrira économiquement, le secteur privé remplira de plus en plus les exigences nécessires à la recherche et au développement, en partie par elle-même et en partie grâce à des partenariats avec les gouvernements.
209. Quatrièmement, le secteur privé génère les impôts qui financent la partie la plus importante des dépenses gouvernementales qui aident les pauvres telles que la santé, l'éducation, les filets de sécurité sociaux et la recherche agricole. Les impôts des sociétés moins élevés ont un impact négatif à court terme sur les finances publiques, mais cela sera rapidement compensé par une croissance accrue du secteur privé.
210. Le secteur privé peut également fournir directement un éventail d'avantages sociaux. Cela est le plus évident dans la fourniture privée de l'eau, de l'évacuation, de la santé et des services d'éducation. L'expérience mondiale a montré qu'un secteur privé bien réglementé peut fournir des services efficaces et bien gérés, tels que l'électricité fiable, des télécommunications modernes et de l'eau potable, qui sont nécessaires à une économie moderne. Des mesures spéciales peuvent être prises dans le cadre de réglementations pour faire en sorte que les pauvres ne soient pas exclus de la fourniture de services essentiels.
211. Le lien entre les services d'infrastructure et les niveaux de vie améliorés est direct. L'accès facile à l'eau potable améliore la santé et libère du temps pour d'autres activités - pour une femme c'est du temps pour travailler et pour un enfant c'est le temps pour aller à l'école. L'accès à l'assainissement réduit de façon spectaculaire les maladies débilitantes et mortelles, en particulier parmi les enfants. L'accès à l'électricité réduit le temps que passe un foyer pour faire face à ses besoins en énergie, et fournit une source fiable de lumière qui permet à un enfant de faire ses devoirs et améliore l'environnement local. L'accès aux moyens de transport améliorés permet d'acheminer les marchandises au marché plus facilement et à des coûts moins élevés, accroissant ainsi les revenus des fermiers, ou bien permet de se rendre au travail. L'accès aux télécommunications modernes peut mettre un village éloigné en contact avec une vaste gamme de services, y compris la santé et l'éducation et permet aux entrepreneurs locaux d'entrer en contact avec les marchés mondiaux.
212. Un bon exemple de fourniture de service privé c'est les télécommunications. Des entreprises privées ont été les leaders qui ont amené les télécommunications en Afrique grâce à la téléphonie mobile sans fil. L'Afrique est maintenant le leader mondial dans ce domaine en utilisant des téléphones mobiles de pointe aux normes GSM (95.61% en Afrique pour 49.75% dans le reste du monde). Il y a environ 14 millions d'abonnés aux services cellulaires GSM en Afrique. Plusieurs pays ont trois opérateurs nationaux (Egypte, DRC, Madagascar, Tanzanie, Ouganda) ce qui a augmenté la compétition sur les marchés locaux et ont entraîné une réduction des coûts et une amélioration du service. En 2000 le taux de croissance des abonnés était de 101.85% en Afrique ( par rapport à 52% dans le reste du monde). L'Afrique du Sud a le plus grand marché d'utilisateurs : 7 millions, viennent ensuite le Maroc et l'Egypte avec environ 1.5 million d'utilisateurs chacun. Le marché sud-africain est actuellement de 13 milliards de SA Rands et on estime qu'I va croître jusqu'à environ 20 milliards de SAR en 2004. Le marché sud-africain est dominé par deux entreprises privées MTN (45% des parts du marché) et Vodacom (55% des parts du marché). Les personnes qui étaient auparavant dans des régions mal desservies font 35 millions d'appels ((65 millions de minutes) par mois en utilisant 135 cabines téléphoniques communautaires Vodacom 2. Le réseau Vodacom couvre presque 13.000 kilomètres de routes nationales, environ 80% de la population du pays et 52% de la totalité du service terrestre.
213. L'Ouganda fournit un excellent exemple de la façon dont une entreprise peut améliorer la qualité de vie des gens. En Ouganda, au début des années 90 il y avait moins de trois téléphones pour 1000 habitants. Une compagnie de téléphone d'état (UTL) percevaient des prix élevés pour les appels locaux et internationaux. La liste d'attente pour un téléphone était de plus de six ans. Les sociétés citaient souvent le manque de télécommunications comme ayant un effet dissuasif sur les investissements en Ouganda. Cependant, l'accès a commencé à s'améliorer de façon spectaculaire mais seulement après l'arrivée des sociétés privées avec à leur tête CelTel Cellular et MTN. Le marché a considérablement augmenté, de zéro en 1990 à près de 200.000 abonnés. Au milieu de l'an 2000, UTL qui était la propriété de l'Etat ougandais a été privatisé et une troisième licence mobile nationale a été accordée à un consortium allemand de Detecon Gmbh, au Suisse TeleCel International et ! l'égyptien Orascom. La société mère de CelTem :Mobile Systems International Cellular Investment Holdings, a mis au point des plans pour des systèmes cellulaires de pointe dans plusieurs pays africains négligés, y compris les suivants : Tchad, Malawi et République du Congo. Même en Somalie, où il n'y a pas eu de gouvernement central pendant une décennie entière, le secteur privé a pu établir un système de télécommunications très efficace et très compétitif.
214. L'eau potable est essentielle pour améliorer la qualité de la vie. Contrairement aux télécommunications ses attraits pour le secteur privé sont moins évidents - mais il existe des exemples impressionnants de fourniture de réserves d'eau efficaces et profitables. Jusqu'à la fin des années la Guinée a eu un des secteurs de fourniture d'eau les moins développés en Afrique. Moins de 40% des habitants des villes avaient accès à l'eau amenée par des tuyaux. Là où des branchements d'eau existaient le service était souvent interrompu et le traitement des eaux était inadéquat. En 1989, pour améliorer la situation le Gouvernement guinéen a conclu un accord de location-achat pour la gestion du service d'eau à Conakry et dans 16 autres villes. En 1996, les branchements étaient passés de 12.000 à 23.000. L'installation de compteurs a augmenté de 5% à 98% pour les clients privés et à 100% pour les autorités gouvernementales. L'investissement dans la nouvelle capacité de fourniture d'eau combinée avec la réhabilitation et l'entretien ont produit un accroissement substantiel de la population avec un accès à de l'eau potable de 38% à 47% en 1996. Les recettes des sociétés d'exploitation de l'eau ont augmenté dix fois entre 1989 et 1996. Ces résultats sont véritablement impressionnants surtout dans un environnement dans lequel des tentatives antérieures pour s'assurer un accès fiable à l'eau potable ont échoué et dans lequel la durabilité financière semblait impossible à atteindre.
215. L'activité accrue du secteur privé dans l'infrastructure est un des signes les plus encourageants en Afrique. Cela se présente sous deux formes : privatisation des actifs existants de l'Etat, suivis d'habitude par la modernisation et l'expansion et des projets verts. Dans l'ensemble, sauf pour l'Afrique du Sud, à la fin de l'année 1999, 3700 entreprise d'état avaient été privatisées produisant ainsi des recettes de l'ordre de 5 milliards USD. Ces programmes de privatisation tout en mettant les anciennes entreprises de l'état entre des mains privées - avec les bénéfices associés de l'efficacité - ont également été les points d'entrée pour des investisseurs ayant de plus grandes ambitions.
Les marchés de capitaux robustes sont les serviteurs de la croissance
216. Un secteur financier vaste et profond est fondamental pour créer un secteur privé dynamique. Les institutions financières et les marchés de capitaux ont un rôle spécial à jouer pour le développement et la réduction de la pauvreté en mobilisant l'épargne et en allouant les ressources aux utilisations les plus productives. Les institutions financières privées jouent un rôle clé dans ce processus. Au cours de la dernière décennie plusieurs nouvelles institutions financières privées ont été créées en Afrique, par exemple des sociétés de location-achat, des banques d'affaires, banques commerciales, des capitaux risques, des compagnies d'assurances et des marchés de valeurs. Les récompenses de l'investissement en Afrique sont considérables. Le rendement, des investisseurs directs et en portefeuille ont été parmi les plus importants dans le monde et les perspectives sont bonnes.
217. Il y a 12 marchés de valeurs actifs et beaucoup d'autres sont sur le point de devenir opérationnels dans les deux prochaines années. En excluant l'Afrique du Sud, la capitalisation boursière est passée de 5 milliards USD en 1991 à presque 13 milliards USD en 1998, le nombre de sociétés répertoriées est passé de 327 à 412 et la valeur des opérations traitées est passée de 117 millions USD à 1.5 milliard USD. Le marché des valeurs de l'Afrique a réalisé une bonne performance en 1997 affichant une avance de 14% comparée à une perte globale de 13.9 % pour un indexe composite des marchés émergents repères. La Côte d'Ivoire a affiché la meilleure performance avec un gain en dollars de 141%. Le Nigeria a affiché un gain de 131%. L'Afrique du Sud (17,8%) et le Zimbabwe (+16,71%) ont été les deux marchés les plus performants en 1997 en termes d'indice de rendement global parmi les composants de l'indexe des marchés émergents globaux repères.
218. Il y a actuellement plus d'une douzaine de Fonds africains consacrés avec des actifs de plus de 5 milliards USD. En reconnaissance de leur potentiel SFI a ajouté cinq bourses africaines à son index global en 1996 (Botswana, Cote d'Ivoire, Ghana, Kenya et Maurice) en plus de ceux qui existent (Nigeria, Afrique du Sud et Zimbabwe). Deux tiers des marchés de la région sont maintenant inclus dans l'index composite global, ouvrant la voie à la création éventuelle d'un indexe des marchés émergents africains qui pourrait accélérer l'intérêt des investisseurs locaux et étrangers.
219. Les liquidités augmentent dans la plupart des marchés et vont encore s'améliorer à la suite du renforcement de la base des investisseurs locaux, en partie par le transfert vers des modèles de fonds de pension privés, des assurances, et des moyens d'investissement collectif. La capitalisation du marché sera fortement améliorée parce que les joyaux de la couronne (les sociétés de ressources naturelles et d'infrastructure) sont privatisées. Ashanti Gold au Ghana et de Kenya Airways sont deux exemples de privatisation récente. Enfin, les liquidités augmentent à la suite de l'engagement accru des investisseurs locaux et étrangers. Ces investisseurs ont également provoqué une meilleure qualité de la recherche et d'information. Par exemple, il y a maintenant plus de 12 agents de change au Ghana. La forte tendance au régionalisme des bourses africaines qui accroîtra le choix et la liquidité pour les investisseurs de portefeuille est un autre signe positif.
220. Il existe également des occasions importantes pour les mécanismes de financement intermédiaires ciblés sur les entreprises locales petites et moyennes (PME). Par le passé, le manque d'accès au financement pour les PME a été un obstacle majeur à la croissance du secteur privé, alors les banques ont été orientées vers des grands prêts, les demandes de garantie pour les prêts sont élevées et les droits de propriété sont difficiles à documenter ou carrément inexistants. Le côté positif est que lorsque le financement des PME devient disponible, l'opération est rapidement menée. Des options qui ont été testées en Afrique et ailleurs incluent : la facilitation de l'accès au financement pour des affaires locales à travers la fourniture de crédits et de modèles de garantie appropriés, ainsi que l'introduction de segments de la bourse qui sont adaptés aux besoins des petites et moyennes entreprises et là où l'on a recours à des règlements plus flexibles.
La fourniture des crédits peut être un facteur clé pour réduire la pauvreté
221. L'expérience globale de la réduction de la pauvreté indique que les systèmes de micro-crédits qui peuvent aider les pauvres et les marginaux sont parmi les moyens les plus efficaces pour sortir les gens de la pauvreté. Des foyers à faibles revenus, incluant ceux dont le chef de famille est une femme, ont remboursé un très grand nombre de prêts, montrant ainsi que se focaliser sur l'assistance aux pauvres peut aussi assurer de bons bénéfices. Les composants d'une stratégie de fourniture de crédits destinés aux pauvres doivent inclure :
(a) le développement d'un plan de crédit qui permet aux fermiers et aux petits producteurs ruraux d'avoir un accès équitable aux crédits à long et court terme, à l'assurance des récoltes et à d'autres services financiers.
(b) la facilitation de l'accès des pauvres et des démunis aux services financiers en encourageant une vaste gamme d'intermédiaires financiers qui ciblent les petits épargnants et les petits emprunteurs, les micro-entreprises, incluant les institutions de micro-finance, les coopératives, les coopératives de crédit et l'epargne postale. Les pays devraient s'efforcer d'éliminer les obstacles institutionnels et de réglementation tels que les restrictions sur le recouvrement des coûts, l'absence de lois pour des transactions sécurisées et des enregistrements de propriété inadéquats.
(c) l'appui d'une approche complète à la mise au point de systèmes de protection sociale durables en concevant ces systèmes de manière à faciliter la gestion du risque au niveau de l'individu et de la famille, particulièrement pour les femmes².
Comment le secteur privé peut appuyer le développement des capacités commerciales
222. Un rôle élargi pour le secteur privé, à la fois national et international, peut en général créer des bénéfices importants. Les entreprises vont vraisemblablement investir dans le développement des ressources humaines avec des implications positives pour créer des capacités par le biais de l'éducation et de la formation, le développement d'une main-d'œuvre plus spécialisée et des capacités de gestion accrues. Un plus haut niveau d'activité commerciale générera également plus de start-up, appuyant ainsi le développement des petites et moyennes entreprises. Cela peut être encore davantage plus encouragé par des mesures visant par exemple à :
(a) donner la préférence aux rachats par les cadres d'entreprises non essentielles et permettant les paiements par la trésorerie future (c'est-à-dire conserver la propriété des actifs et des dividendes jusqu'au paiement total du prix d'achat).
(b) créer des PME à partir des activités non essentielles (e.g.nettoyage, sécurité, restauration, réparation et entretien, etc.) tout en permettant une période de marché captif.
(c) mettre au point des stratégies de sous-traitance qui comprennent un tutorat et des éléments de formation et une compensation basée sur la performance.
(d) mettre en œuvre des modèles de propriété d'actions basés sur des mécanismes de paiements participant à l'amélioration des bénéfices combinés avec la formation du renforcement de la productivité³.
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BONNE CITOYENNETE DES ENTREPRISES
223. Alors que des grandes sociétés sont devenues les entités les plus riches et les plus influentes de la planète il y a eu une demande croissante de la part des citoyens de s'assurer qu'elles sont sujettes aux exigences de base de responsabilité. Le scandale public provoqué par les désastres environnementaux et l'abus des droits de l'homme, tels que les ateliers de misère et le déplacement forcé des régions d'exploration du pétrole qui ont eu des liens avec certaines sociétés multinationales et leurs sous-traitants ont mis au premier plan les éthiques des sociétés. L'ordre du jour des responsabilités des sociétés est important pour l'Afrique. Les sociétés transnationales investissant en Afrique doivent reconnaître le rôle positif qu'elles peuvent jouer pour renforcer un tissu social fragile en Afrique et diminuer ainsi le risque de leurs investissements. A cet égard, elles peuvent apprendre beaucoup de l'expérience de l'aide. Les valeurs fondamentales du Compact, soit la (co-) propriété africaine, la stabilité et la prévisibilité à long terme, et la responsabilité mutuelle envers des objectifs acceptés sont très pertinents dans ce contexte.
224. Le Compact global initié par le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan en 1999 fournit un cadre pour la bonne citoyenneté des sociétés. Cela se propose de donner un 'visage humain' au marché global en se concentrant sur les responsabilités des sociétés à 'englober, appuyer et mettre en œuvre un ensemble de valeurs de base dans les domaines des droits de l'homme, des normes du travail, et des pratiques de l'environnement'. En 2000, plus de 50 grandes sociétés transnationales de différents secteurs ont pris une publiquement une position sur le Compact global et ses principes.
225. Certains des composants de base de bonne citoyennet6 des sociétés qui reflètent le Compact global et les initiatives associ6es incluent :
(a) Le maintien des codes de conduite de l'environnement tels que mis au point par le Programme des Nations Unies pour l'environnement et adoptés par la Déclaration de Rio (UNCED).
(b) Le respect des normes du travail, tels que mis au point par le BIT. Ceux-ci comprennent le maitien de la liberté d'association et le droit aux négociations collectives, éliminant toutes les formes de travaux forcés ou obligatoires, interdisant le travail des enfants et éliminant la discrimination dans l'emploi.
(c) L'engagement avec les organisations de droits de l'homme y compris le Bureau du Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l'homme et les partenaires clés tels que le Business for Social Responsibility.
226. La décision d'avril 2001 prise par les grandes sociétés pharmaceutiques internationales de renoncer à leur procès intenté au Gouvernement sud-africain, permettant ainsi à l'Afrique du Sud de produire ou d'importer des médicaments génériques pour traiter HIV/AIDS (sida) à un prix bien inférieur à celui des médicaments brevetés des sociétés, est le signal d'une percée importante pour la bonne citoyenneté des sociétés.
227. En plus du FDI le portefeuille d'investissement étranger augmente en importance dans toute l'Afrique. Des mesures importantes peuvent être prises pour promouvoir en même temps une bonne gouvernance des sociétés et encourager la transparence, la divulgation et la responsabilité vis-à-vis du groupe le plus large de participants. Des organisations telles que : International Accounting Standards Committee, International Federation of Accountants, Intergovernmental Working Group of Experts on International Standards of Accounting and Reporting peuvent jouer un rôle important.
228. Il importe de mettre au point les meilleures pratiques pour un ensemble de questions fiscales et financières découlant de la croissance de la production et du commerce internationaux, pour faire en sorte que les pays africains ne soient pas défavorablement affectés par des mesures telles que la manipulation du prix de transfert qui pourrait réduire les paiements fiscaux des sociétés internationales.
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PARTENARIATS PUBLICS-PRIVES
229. Le partenariat public-privé, à la fois dans les pays africains et entre des sociétés internationales et les gouvernements-partenaires internationaux constituent des ouvertures considérables pour renforcer le rôle du secteur privé.
230. Plusieurs projets publics-privés d'infrastructure en Afrique impliquent des concessions. Dans le cadre de ces contrats la Banque mondiale a apporté son aide à l'élaboration de contrats de gestion, de crédits-achats et de concessions pour des services d'infrastructure. Ils incluent des contrats de gestion pour des lignes aériennes (Tchad), des télécommunications (Guinée), de l'électricité (Guinée, Mali, Sierra Leone), des concessions d'électricité (Cote d'Ivoire, Rwanda) et d'eau (Gambie, Guinée) des concessions d'eau (Cote d'Ivoire); et la sous-traitance du service ferroviaire (Tanzanie) et de services contractuels pour le gouvernement (Tanzanie).
231. Une résistance politique à la privatisation totale des aéroports est fréquente, car l'actif représenté par les aéroports a tendance à être considéré comme stratégique pour la sécurité nationale. Cependant, les partenariats publics-privés concernant des contrats d'exécution et de gestion ont été le moyen le plus courant pour faire participer le secteur privé. Par exemple, des arrangements tels que : Construire-Posséder- Exploiter-Transférer (BOOT) ont été utilisés pour la construction de trois aéroports neufs en Egypte. Au Kenya des contrats du type Construire-Posséder-Exploiter (BOO) ont été utilisés pour la construction de terminaux pour marchandises. En Afrique du Sud la privatisation partielle de l'aéroport a eu pour résultat la gestion privée des installations de l'aéroport. Tous les partenariats publics-privés ont accordé à des promoteurs le droit d'augmenter les revenus par la vente de concessions (telles que des restaurants, des aires de stationnement et des boutiques hors taxes). Au Cameroun des entrepreneurs privés se sont engagés à financer à la fois des aéroports rentables et des installations secondaires ayant un trafic trop faible pour être rentables mais essentiel pour l'intégration de la région.
232. Le secteur privé s'est occupé de plus en plus de l'exploitation des installations portuaires d'utilisateurs communs au cours des années 90, faisant suite à la dominance de ce domaine par le secteur public pendant les années 80. En 1999, en Afrique du Nord, le Maroc a signé un contrat avec un consortium privé pour développer une nouvelle installation de conteneurs dans le port de Tanger (Tanger-Atlantique) selon le système Construire-Exploiter-Transférer. Le Kenya et le Mozambique ont été les deux seuls pays de la l'Afrique subsaharienne qui ont attribué des contrats privés pour des exploitations portuaires. Le Mozambique a signé des contrats crédit-bail pour le terminal de charbon de Maputo et pour des terminaux pour conteneurs en 1996. Le Kenya a signé un accord pour l'exploitation d'une installation de conteneurs avec une société internationale en 1996. En 1998, un consortium a investi dans le développement du terminal de grains et d'engrais du port de Mombasa.
233. Les partenariats publics-privés peuvent également réduire la pauvreté. Un exemple est AGETIPS (Agences d'Exécution des Travaux d'Intérêt Public) qui est constituée par des agences indépendantes et à gestion privée pour la réalisation de travaux publics. Ces agences évaluent des petits travaux civils (50.000 à 100.000 USD)et des projets d'entretien promus en grande partie par les communautés publiques telles que des école, des routes et des centres sanitaires et publient des appels d'offres pour des entrepreneurs potentiels. Parce que les contrats exigent des méthodes faisant appel à une main d'œuvre nombreuse il est vraisemblable que seulement des sociétés privées petites et moyennes feront des propositions. Le but consiste à promouvoir l'emploi et à contribuer au développement du secteur privé. Les projets doivent inclure une contribution de la localité- d'habitude 5 à 10% du coût total pour s'assurer de la 'propriété' locale.
234. Commençant en 1993 des réseaux d'entreprise ont été lancés en Afrique de l'Ouest, en Afrique australe et en Afrique de l'Est. En 2000, 500 hommes et femmes d'affaires y participaient. Leur double mission était l'amélioration des climats d'affaires dans les états africains et la promotion du commerce et de l'investissement transfrontières. Les trois réseaux d'entreprises sous-régionaux servent d'instances pour le développement de la capacité commerciale, des transactions intra-régionales et aussi pour la coopération nord-sud.
235. Il y a de nombreuses modalités qui existent pour garantir l'investissement et l'exportation qui peuvent être utilisées et améliorées. La raison d'être de ces modalités est que les gouvernements des pays développés peuvent garantir les risques d'investissement dans des pays en développement.
236. Ici il y a une possibilité pour les fournisseurs d'assurances commerciales. En général, les risques perçus lorsque l'on fait des affaires en Afrique sont considérablement plus élevés que les risques réels. En raison du faible investissement étranger dans les pays africains, les investisseurs potentiels tendent à s'en remettre en matière d'information aux médias plutôt qu'aux réseaux d'information des affaires. Il est bien connu que les médias ont une tendance à se focaliser sur les crises et les catastrophes de telle sorte que des informations précises sur le climat des affaires ne soit pas disponible pour les investisseurs potentiels. Les assureurs commerciaux pourraient exploiter cette différence et garantir eux-mêmes ces risques en se retournant vers les garanties d'investissement du gouvernement pour une réassurance.
237. De meilleures informations seront l'un des facteurs les plus importants pour encourager l'investissement. Cela va d'un système de suivi amélioré pour des données économiques clés, en particulier dans le domaine privé, à des enquêtes ciblées des investisseurs eux-mêmes leur permettant d'en apprendre davantage sur leurs propres motivations, analyses et des problèmes auxquels ils sont confrontés. L'exemple de l'Ouganda montre que des processus légaux et transparents pour le retour des biens saisis et des campagnes de publicité ciblées peuvent être très efficaces. La recherche, la collecte des données et le partage de l'information sont des domaines prioritaires pour le partenariat public-privé au plan national et international.
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CONCLUSION
238. Au cours des prochaines décennies le commerce et l'investissement devraient remplacer l'APD comme source de financement de l'Afrique. L'objectif consiste à faire en sorte que le flux des capitaux privés apporte 70% du financement externe pour le moyen terme et 100% pour le long terme. L'objectif à long terme des partenariats renforcés envisagés par le Compact est de créer des conditions dans lesquelles les relations d'aide sont redondantes en raison de la croissance créée par le secteur privé. La relation d'aide transformée telle qu'exposée dans le Chapitre IV est conçue pour créer un environnement dans lequel la gouvernance locale et la gestion économique dans les pays africains permettront d'attirer le FDI et de développer un secteur d'affaires autochtone florissant où les sociétés internationales constateront qu'il est attractif et profitable d'investir en Afrique. Ainsi, le nouveau partenariat qui est envisagé ne se limitera pas aux gouvernements (des deux côtés) mais permettra d'accepter progressivement le secteur des affaires, des deux côtés.
239. Entre temps, les valeurs fondamentales du partenariat renforcé au titre du Compact auront également une pertinence quant à la manière dont les sociétés étrangères feront des affaires en Afrique. Par exemple, la copropriété africaine de sociétés financées de l'étranger peut être un facteur important pour leur succès. Des investissements qui précisent qu'ils généreront des emplois stables à long terme et des recettes fiscales ont plus de chance de dégager des bénéfices. Des mécanismes de consultation avec les participants et l'obligation de rendre compte s'agissant de résultats convenus peuvent être mis au point en tant qu'outil permettant de développer une bonne citoyenneté.
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CHAPITRE VI
MISE EN OEUVRE DU PACTE : LA VOIE A SUIVRE
240. Le Partenariat du millénaire pour le redressement de l'Afrique (MAP), sous la direction des Présidents Mbeki, Obasanjo et Bouteflika, représente la nouvelle voie à suivre. Le Pacte cherche à identifier et affiner les mécanismes permettant la réalisation pratique de la vision politique de ces deux éminents leaders africains ainsi que du manifeste contenu dans le MAP qui donne un élan politique à cette initiative. Le Pacte est unique du fait de son rôle de facilitateur et de soutien de la transformation préconisée de la relation avec l'aide au développement, transformation nécessaire pour la réalisation des objectifs du MAP.
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LE LEADERSHIP POLITIQUE EN AFRIQUE
241. L'une des conditions préalables à la réalisation des objectifs du Partenariat amélioré, tel que envisagé par les leaders africains, est clairement le leadership politique de haut niveau. Conscient de cela, le MAP a mis en place le Forum des Chefs d'Etat (HSF) en vue de fournir le leadership politique nécessaire. Ce Forum jouera un rôle de pivot essentiel pour la mise en oeuvre du Pacte. Il sera composé de leaders d'un groupe choisi de pays aux approches similaires qui offriront le leadership continental requis et respecteront l'esprit du partenariat tel que prévu dans le cadre du Pacte. Un tel Forum est une composante essentielle pour la discussion des problèmes critiques liés au relèvement de l'Afrique et pour trouver un consensus. L'un des rôles spécifiques du Forum sera d'identifier les pays pouvant faire partie du Partenariat amélioré.
242. Le Forum des Chefs d'Etat symbolise et concrétise la propriété africaine. Il procure le leadership de haut niveau nécessaire pour obtenir un consensus à l'échelle du continent et pour relever les défis de la bonne gouvernance, la gestion économique, les initiatives sectorielles et l'intégration économique régionale.
243. Le Forum des Chefs d'Etat représente également un mécanisme essentiel pour la responsabilisation mutuelle par rapport aux objectifs convenus. Il permet aux dirigeants africains de soulever, avec les partenaires internationaux de l'Afrique, les questions relatives à l'aide apportée au continent africain et de parvenir à une cohérence du leadership au plus haut niveau. Cela devrait se faire en partenariat avec leur homologue au niveau des pays développés, à savoir l'OCDE.
244. Le Forum des Chefs d'Etat, en collaboration avec les institutions pertinentes et compétentes du continent, établira les mécanismes pour que le plus grand nombre possible de pays africain s'engage dans l'examen des performances en matière de gouvernance et de gestion économique. Les pays du Partenariat amélioré présentent également les bases, dans le cadre du MAP, pour un examen externe des progrés réalisés dans la mise en application des engagements pris ou dans la concrétisation des objectifs de développement internationaux. A cet effet, les examens du Comité d'aide au développement (CAD) de l'aide au développement de l'OCDE peuvent servir de modèle. Dans ce contexte, le Forum des Chefs d'Etat peut servir de base politique pour les mécanismes d'examen approfondi des performances des pays en termes de gouvernance et de gestion économique. Ce Forum sera également bien placé pour obtenir l'engagement de haut niveau requis pour mettre en application les leçons tirées de ces examens dans la formulations des mesures et actions à prendre sur le plan national.
245. Le Forum des Chefs d'Etat abordera ouvertement la question de la diversité sur le continent africain. Il représente le leadership politique nécessaire pour dépasser les défis posés par des performances et chances diverses en Afrique. Le choix des pays du Partenariat amélioré présentera un défi politique qui suppose un leadership de haut niveau. A cet égard il faudra dés le départ, et en vue de définir un code de conduite, obtenir un accord explicite sur les indices de performance permettant d'évaluer la bonne gouvernance ainsi que les performances économiques.
Engagements pris par les partenaires internationaux
246. La mise en oeuvre pratique du Partenariat amélioré tel que prévu par le MAP et détaillé dans le Pacte, suppose un engagement de la part des partenaires internationaux de l'Afrique à respecter les quatres principes fondamentaux. Plusieurs partenaires internationaux, à la fois multilatéraux et bilatéraux, ont joué un rôle de chef de file dans la prise de conscience de l'importance de la propriété africaine, des flux de ressources prévisibles à long terme, de la responsabilisation mutuelle et de la pertinence des conditions spécifiques des pays africains. Un groupe choisi de pays, comprenant notamment le Royaume-Uni, les Pays-Bas et les pays nordiques, assumera le rôle de leadership auprés de la communauté internationale, formant ainsi un noyau de pays progressifs partageant la même approche. Ce groupe sera l'homologue du Forum des Chefs d'Etat du MAP et devrait se réunir avec le Forum de manière périodique.
Le soutien technique
247. Le leadership politique à lui seul ne sera pas suffisant pour mener à bien cette initiative: un soutien technique s'avère également indispensable. La mise en oeuvre du MAP et du Pacte pour le relèvement de l'Afrique suppose un secrétariat formé de spécialistes qui sera en mesure de fournir les données, les analyses et les indices et qui pourra assurer le suivi nécessaire pour le bon fonctionnement du Partenariat amélioré. Par ailleurs, parallèlement à ce Forum de spécialistes, il sera nécessaire de mettre en place des organes chargés du suivi au niveau des pays et régional afin de pouvoir engager un dialogue sur les aspects techniques du Pacte et sur ses composantes.
248. A cet égard, les travaux de nombreuses institutions, y compris les initiatives du CAD décrites plus haut, peuvent être utiles. En Afrique, la CEA, travaillant dans le cadre des principes du Pacte, a dores et déja lancé des initiatives significatives qui permettent de générer le dialogue, les données et les analyses nécessaires. Le Forum de développement africain, la "Grande table" et le Groupe d'apprentissage du PRSP sont trois institutions clef entièrement africaines, auprés de la CEA, dont les contributions peuvent également être significatives en termes d'amélioration systématique des modus operandi des examens d'évaluation approfondis, du partage des connaissances ainsi que de la responsabilisation mutuelle. De plus, les travaux de la CEA sur les indices de performance (voir informations au Chapitre IV) peuvent être d'un apport critique. Cette initiative et d'autres devraient permettre la production et collecte des données nécessaires pour pouvoir faire les jugements relatifs au choix des pays pouvant bénéficier du Partenariat amélioré. Dans ce contexte, il faudra veiller à développer et utiliser des indices de performances appropriés. Cependant, l'appartenance à ce groupe choisi se fera en fin de compte par auto-sélection à travers les processus de responsabilisation mutuelle avec les partenaires internationaux
249. Les fonctions de support technique apporté par le CAD aux gouvernements appartenant à l'OCDE pourraient servir de modèle pour définir les rôles du Pacte et de la CEA vis-à-vis du Forum des Chefs d'Etat du MAP.
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CONCLUSION
250. Face à l'assaut de conditions économiques internationales adverses, de conflits, de corruption et de la pandémie du VIH/Sida, il semble que l'Afrique doit courir le plus vite possible ne serait-ce que pour rester à la même place. Pour pouvoir arriver plus loin il faudra courir encore plus vite. Ce pessimisme doit toutefois être contrebalancé par le succés de certains pays africains qui ont surmonté des obstacles importants et connaissent désormais de fort taux de croissance, ou encore par le fait que, même dans les circonstances les plus difficiles, les africains ont fait preuve de formidables capacités de survie et ont connu des succés économiques individuels contre toute attente. Alors que l'énergie et les capacités des africains à réaliser la croissance économique ne sont pas remises en cause, le défi à relever sera de leur offrir un environnement porteur dans lequel ces énergies pourront s'affirmer.
251. Le Programme du Partenariat du Millénaire pour le relèvement de l'Afrique conjointement avec le Pacte pour le relèvement de l'Afrique offrent la vision politique, l'élan et les modalités pratiques pour que l'Afrique puisse mettre en place les conditions nécessaires à la transformation de son avenir. Ils offrent les bases pour une relation transformée du partenariat avec les donateurs internationaux, les créditeurs et le secteur privé qui peut radicalement changer le futur de l'Afrique.